Éternel étudiant à Coventry où il traîne la rédaction d’une thèse qui n’en finit plus, Robin Grant mène une existence solitaire qui flirte plus souvent qu’autrement avec la dépression. Ted, un ancien compagnon d’études, fera soudainement intrusion dans sa vie et la bouleversera brutalement.
Marié et père d’un enfant, Ted est engoncé dans ses certitudes sur la vie et sur les autres et gonflé de son importance. Sa perception des événements est continuellement orientée vers sa propre personne et ses souvenirs biaisés par son désir d’en faire la clé de voûte des événements et de faire correspondre ces derniers aux clichés qu’il entretient à leur égard.
Ted soupçonne fortement Robin d’être gai et, en conséquence, s’est juré de demeurer sur ses gardes si celui-ci est à proximité de son jeune fils (établissant ainsi un lien immédiat entre homosexualité et pédophilie). C’est dans ce contexte que Robin se retrouvera éventuellement accusé de grossière indécence sur la personne du jeune garçon. Est-ce la réalité ou une vision biaisée et hystérique de celle-ci?
L’un des plaisirs de ce roman est l’habileté avec laquelle l’auteur — Jonathan Coe — partage son récit entre les perceptions multiples d’un même événement au gré des différents personnages. Il est d’ailleurs assez amusant de constater que certains ont des certitudes quant au déroulement d’un incident, certitudes qui ne sont souvent basées que sur du vent.
il n’hésite également pas à faire pénétrer le lecteur dans l’univers de certains personnages secondaires, illustrant ainsi avec brio le rôle prépondérant que peut jouer un événement somme toute banal.
Un roman amusant et cynique qui accomplit le difficile exploit de divertir tout en amenant graduellement à réfléchir sur les mécanismes influençant notre perception de la réalité.
Une touche d’amour / Jonathan Coe. Monaco Éditions du Rocher, 2002. 247p.
