Jeudi, 3 octobre 2024
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    Britney, mon amour

    Ces vedettes qu’on aime, qui nous fascinent… Ne soyons pas dupes. Bien qu’elles aient du talent, pour la plupart, leur image publique est travaillée avec soins, fabriquée par une équipe d’experts, leur permettant de s’élever au rang de stars. Pour le meilleur et pour le pire. Du récent Miss Americana (2020) sur Taylor Swift, en passant par Gaga : Five Foot Two (2017), Kathy Perry : Part of Me, sans oublier le troublant Amy (2015), l’incomparable Janis (2015), pour ne nommer que ceux-ci, je me régale des documentaires musicaux sur les chanteuses. Je les ai pratiquement tous vus. Sauf, peut-être le récent Billie Eilish : The World’s a Little Blurry… Sorry, je trouve le succès de Eilish surfait… Tout ça pour introduire le sujet de ma chronique, inspiré par le visionnement du documentaire Framing Britney Spears.


    Aujourd’hui, j’ai le goût d’exprimer mon amour pour Britney… Mais ça n’a pas toujours été le cas, loin de là… Une jeune chanteuse blonde américaine inonde littéralement les palmarès radio avec une chanson que je trouve nulle! Il faut dire que je suis restée accrochée sur les hits de l’an dernier, avec Torn de Nathalie Imbruglia ou Bitch de Meredith Brooks, qui me paraissaient beaucoup plus féministes et « habillés »… Et pour cause, je viens tout juste de graduer d’un collègue privé pour filles, où le port de la jupe est obligatoire. Jupe que je me suis d’ailleurs empressée de brûler lors de mon après-bal… Et voilà qu’une jeune blonde Américaine lance un vidéoclip où elle rend plus « sexy » que jamais cette maudite jupe, accompagnée d’une moitié de chandail, dans les corridors de son école, en chantant :

    My loneliness is killing me
    I must confess, I still believe
    When I’m not with you I lose my mind
    Give me a sign
    Hit me baby one more time


    Il faut dire qu’au contraire de ce qu’elle chante, elle n’a pas l’air du tout de s’ennuyer, même que, à la fin du clip, elle fait de la gymnastique avec toute sa classe, dans des joggings clairement interdits dans mon école de filles (ou même au Pro Gym, en 2021). Elle m’énervait Britney Spears, avec son air faussement innocent. Ça me paraissait wrong. En 2000, elle remet ça : Oupps!… I Did It Again… Je préférais tellement la skater canadienne révoltée, Avril Lavigne… Plus tard, j’ai compris que toutes ces vedettes de la culture pop étaient construites, par une équipe d’experts, avec l’aide des médias. C’est d’ailleurs une pratique qui remonte bien avant le millénaire, alors que les grands studios hollywoodiens créaient les vedettes de toutes pièces. Mariages arrangés, séances photo fabriquées pour vendre du rêve, tout en vous préservant de la vérité… Dans les années 30, Clark Gable enchaine les relations extraconjugales, mais le « responsable des communications » de la MGM s’est toujours arrangé pour bien « camoufler/ préserver » l’image publique de la star…


    Revenons à Britney Spears. Après des millions d’albums vendus à chanter les déboires d’une jeune vierge innocente qui, « oupps! », perd son innocence, pour devenir dirty, Britney sombre dans la déchéance. Elle se fait raser la tête, perd la garde de son enfant. Étiquetée de
    « mauvaise mère, de droguée, de malade mentale », elle devient une has been… Il y a quelques semaines, sur Crave, je tombe sur le documentaire Framing Britney Spears qui « analyse l’ascension et la chute de la chanteuse Britney Spears, ses luttes personnelles et
    l’influence de son père en tant que tuteur légal ».


    Intriguée par le synopsis, je syntonise. Bouleversée, j’apprends que depuis près de 13 ans, Britney vit sous les termes stricts d’un accord judiciaire décidé en 2008 par un tribunal de Californie, après sa « descente aux enfers ». Comparable à un régime de tutelle, les décisions concernant la chanteuse, aujourd’hui âgée de 39 ans, sont depuis prises par son père qui contrôle toute sa vie, sa fortune, comme son image publique. Cette tutelle étant justifiée par des « troubles psychologiques », on ne peut que poser la question qui tue : quand des millions de dollars sont en jeu, n’y a-t-il pas trop d’argent à gagner sur la souffrance d’un individu pour réellement se soucier de sa santé mentale? Il est primordial d’interroger les motivations de toutes les personnes impliquées, surtout si on juge que la principale intéressée n’a pas accès à son argent… La légende dit que Britney aurait accepté la tutelle, donc accepté de dire qu’elle ne peut pas prendre soin d’elle-même, dans le but d’obtenir la garde de ses enfants. Ironiquement, la mère a grandi comme une « enfant » dans cette procédure, puisque sous tutelle légale depuis plus d’une décennie.


    Malheureusement, Britney est l’exemple parfait d’un produit d’une culture patriarcale, où la femme y joue son rôle : celui d’objet (de produit, de victime). « Quand une femme sort du lot dans une culture misogyne, il y a tout un appareil prêt à la casser » (et à l’exploiter), explique à juste titre un intervenant dans le documentaire. Par exemple, lors de sa séparation avec Justin Timberlake, elle passe rapidement de vierge à salope… Si dans une certaine mesure, Britney participe également à créer son image publique, certes, elle n’a certainement pas orchestré sa chute. La relation que Britney entretenait avec les paparazzis est exemplaire, dans la mesure où l’une ne survit pas sans l’autre.


    Les paparazzis participent à créer la star, renforcer ou détruire le regard qu’on porte sur elle. Aujourd’hui, ils se font d’ailleurs lentement remplacer par les médias sociaux, où ce sont les vedettes (lire des gens engagés par les vedettes) pour entretenir leur image publique. Ceci permet un meilleur contrôle dans cet accès « direct » aux vedettes. Ce sont les nouveaux tabloïds, où la vedette participe à la création de son image. Mais Britney gère-t-elle ses médias sociaux? Les vidéos laissent place à l’interprétation et les fans de Britney, voient un appel à l’aide codé en lien avec la tutelle…


    Ainsi, depuis quelques années, le mouvement « Free Britney », initié par ses fans (dont plusieurs gais), sur les médias sociaux a pris de l’ampleur, questionnant sa mise sous tutelle. Au moment d’écrire ces lignes, j’apprends que le 23 juin prochain, Britney s’adressera directement au tribunal de Los Angeles. Espérons qu’elle retrouvera sa liberté. Le contrôle de sa vie. Et qu’elle racontera, un jour, dans une autobiographie (écrite ou approuvée par elle-même), comment furent tirées les ficelles de son vedettariat.


    INFOS : Framing Britney Spears de Samantha Stark (2021, États-Unis, 1h14)

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