Alors que le film Mourir peut attendre (No Time To Die) prend l’affiche le 8 octobre, on vous propose un retour sur les allusions directes ou indirectes à l’homosexualité dans l’univers de l’agent 007.
L’archétype du sexe masculin et l’espion le plus célèbre du monde n’est pas connu pour son tact envers la gente féminine et les films de l’agent britannique ont souvent donné lieu à de nombreux débats sur le sexisme qui en émanait, du moins, pour la pré-Daniel Craig.
«Cessez le charme, je suis immunisée»
Dans le troisième film de la franchise, Goldfinger, sortie en 1964, l’homosexualité est présentée par le biais du personnage féminin incarnée par Honor Blackman.
Beaucoup moins suggérée dans la version doublée en français, l’homosexualité de la Bond Girl est on ne peut plus évidente en version originale et elle est cheffe d’une équipe d’amazones pilotes d’avions.
Si l’actrice Honor Blackman est alors l’une des plus âgée à incarner une Bond Girl (la moyenne d’âge des Bond Girl est de 30 ans, Honor Blackman avait 39, en 1964) c’est également celle qui porte le surnom le plus sulfureux : Pussy Galore. Inutile de revenir sur le mot «Pussy». Quant à «Galore», il pourrait se traduire par «à profusion» en français.
Si l’homosexualité de Ms. Galore n’est pas explicite dans le film (ce qui n’est pas le cas du livre), elle est toutefois sous entendue par le biais de son patronyme, le fait qu’elle ne soit entourée que de femmes et par une subtile remarque faite à double zéro sept lors de leur première rencontre à bord du jet privé d’Auric Goldfinger. Tandis que l’agent britannique se livre à son habituel jeu de séduction, Pussy Galore lui glisse un «je suis immunisée». Subtil et efficace.
C’est la seule Bond Girl de toute la franchise qui n’apparait qu’en pantalon durant tout le film. Toutefois, la belle blonde finira par tomber dans les bras de l’espion.
On ne sait pas si c’est par peur de perdre leur public ou nons, mais les scénaristes et responsables de la série feront table rase de toutes suggestions d’homosexualité pendant près de 8 ans. Il faut en effet attendre 1971 pour que cela revienne dans la série, sous les traits d’un couple de vilains…
Wint & Kidd
En phase avec son époque, Bond entre avec Diamonds are Forever dans les seventies sur les chapeaux de roue avec le retour de Sean Connery (après l’épisode avec Goerge Lazenby dans Au service secret de Sa Majesté). Des «diamants éternels» qui mettent en scène un couple de tueurs à gage homosexuels : Mr. Wint & Mr. Kidd, joués par Bruce Glover le musicien de jazz Putter Smith.
Il est plutôt agréable de voir que ces deux hommes ne sombrent pas dans la caricature grossière. Ils sont certes très précieux mais n’ont aucun tic de langage. Autre point intéressant, ils s’avèrent être très dangereux et professionnels, là où il aurait été facile de dépeindre des homosexuels comme incapables ou ridicules.
On remarque même une pointe de jalousie dans le regard de Mr. Wint quand Mr. Kidd remarque que Tiffany Case est très séduisante… «pour une femme». Leurs répliques font d’ailleurs partie des meilleures du film.
La diversité sexuelle disparaitra des James Bond pendant une vingtaine d’années.
On a top ?
En 1995, Goldeneye sort sur les écrans, avec un nouveau Bond (incarné par Pierce Brosnam) pour une nouvelle ère : la guerre froide est finie, le mur de Berlin est tombé, l’Est et l’Ouest se retrouvent. Cette fracture est portée par une mise en scène plus contemporaine et réaliste, il y a un peu moins de gadget et plus d’action. L’une des méchantes les plus emblématiques de la série se nomme Xenia Onatopp (interprétée par Famke Janssen) une femme à la solde de l’organisation criminelle Janus dans cet opus. La sexualité du personnage est explicite par sa façon d’éliminer ses victimes en les éliminant tout simplement durant leurs ébats.
Une très courte scène laisse sous-entendre qu’elle est probablement bisexuelle en lançant à la Bond Girl Natalya Simionova, un « Toi tu attends ton tour ».
Une première fois ?
L’homosexualité disparait quelques temps pour revenir dans le monumental Skyfall sorti en 2012 avec Daniel Craig.
Le méchant du film, Silva (Javier Bardem), un ancien espion du MI6 est très maniéré et son attirance pour l’agent ne laisse aucun doute lorsque lors d’une scène lui caressant le visage, il rétorque à Bond «Il faut une première fois à tout James». Et Bond de répondre «Qu’est ce qu’il te fait croire que c’est ma première fois ?». Le mythe du mâle viril à la Bond qui a perduré durant 50 ans s’effondre en une fraction de seconde.
Une scène mémorable et un trait d’humour qui déconstruit un peu l’image machiste du personnage. Pourtant, cette ligne de dialogue a bien failli être coupée au montage, à cause de l’insistance du studio, soucieux la voir disparaître. En effet, dans le documentaire Being James Bond disponible sur Apple TV+, la productrice de la franchise, Barbara Broccoli, est revenue sur ce petit conflit interne : «Je me souviens que le studio nous a demandé de couper cette réplique et nous avons dit non, non, non. Nous avons résisté.»
Notons que quelques minutes plus tard Silva réitère sa proposition érotique en lançant à Bond durant une partie de tir «Au tir ou à autre chose je te prends comme tu veux».
Au chapitre des scènes «homoérotique» durant l’ère Craig, on se souviendra aussi de la scène de torture de Casino Royale, où un Bond totalement nu se voit félicité sur son corps musclé par un Le Chiffre glacial qui le torture tout de même.
On regardera aussi attentivement le chemin que prendra la relation entre Bond et Q (interprété par l’acteur ouvertement gai Ben Whishaw). En effet, «le couple» a suscité les fantasmes de plusieurs fans sur internet, et la mise en scène de Sam Mendes dans Spectre pourrait suggérer une certaine «tension sexuelle» entre le Quatermaster et l’agent.
On retiendra que l’homophobie très présente dont Bond fait preuve dans les romans de Ian Fleming est (heureusement) passé sous silence dans les films. On se souviendra notamment que dans la version littéraire originale anglaise de Goldfinger, Bond définit les homosexuels comme « un troupeau d’inadaptés sexuels malheureux, stériles et pétris de frustrations » …
Dans les films, si quelques clichés transparaissent (notamment avec un certain maniérisme), la question de la sexualité n’est après tout pas importante puisqu’elle peut s’appliquer tant aux ennemis qu’aux agents du MI6.
Un bisou entre «ennemis»
Récemment, en pleine promotion du nouveau James Bond, l’acteur Rami Malek s’est laissé aller à une révélation amusante sur un épisode du tournage du film avec Daniel Craig.
Ennemis jurés à l’écran dans Mourir peut attendre (No Time To Die), Craig et Malek se sont embrassés sur le tournage. Une révélation faite par l’interprète de Lyutsifer Safin, le méchant de cet opus de James Bond, lors de son passage dans un talk-show américain pour la promotion du film.
«On avait une scène très compliquée et on la répétait avec notre réalisateur, explique Rami Malek. On était assis à une table pendant des heures en train de réfléchir sur des idées et on est enfin parvenus à trouver une solution.»
Daniel Craig a alors surpris son partenaire. «Il m’a pris, m’a soulevé et je ne sais pas qui a initié la suite, si c’était lui ou moi, mais un bisou a été échangé, confie Malek. « Je vais dire que c’est Daniel qui a initié le baiser, et il m’a vraiment pris au dépourvu.»
Et le comédien de 40 ans de poursuivre :« J’ai marqué une pause, j’ai repris mon souffle et je me suis demandé si ça faisait de moi une Bond girl ?»