Véritable coup de poing littéraire se situant à l’intersection du texte poétique et de la biographie, le récit de Daniel Gagnon-Barbeau ramène à la surface les souvenirs d’un homme se remémorant les abus subis alors qu’il était encore tout jeune.
Devant un sujet si douloureux, nulle surprise que l’ouvrage porte la mention de « complainte » : un terme on ne peut plus approprié puisqu’il désigne un texte marqué par la douleur et les lamentations. Ce qui demeure malgré tout étonnant c’est que, en dépit de l’horreur ainsi présentée, le texte demeure empreint d’une grande charge poétique.
Au cœur de la lecture, on se surprend à être déchiré entre deux émotions contradictoires : la douleur et la fureur suscitées par les souvenirs de l’auteur ainsi dépeints et une admiration devant la forme utilisée pour les relater.Au gré des chapitres, le récit alterne entre différentes périodes : le choc de l’enfance, le regard de l’adulte sur un passé brisé, l’humiliation, puis la colère.
« … assis sur un canapé d’une villa luxueuse, ou étalés impudiquement sur une table de hasard au fond d’un hangar, nous avions pour seul tort, pour seul crime, d’être beaux et jeunes. »
« Les souffrances des enfants ne leur semblaient pas de véritables maux. Ils rejetaient du revers de la main nos plaintes. Ils souriaient quand nous leur disions que nous avions mal. Ils n’avaient aucune pitié. Il n’y avait pas de viols doux. Il n’y avait pas de viols modérés ou de viols amis ou amoureux. » Un récit bouleversant !
INFOS | Dans les ténèbres de l’omerta : complainte/Daniel Gagnon-Tremblay. Montréal : Sémaphore, 2023, 112 p. (Mobile)