Tous les dix ans, Dario Bivona change de vie. Après avoir évolué dans le milieu pharmaceutique jusqu’à 30 ans et en communications pendant la décennie suivante, le Québécois d’adoption a plongé tête première en pâtisserie. Sacré champion de la première saison de l’émission Le meilleur pâtissier du Québec, version locale du phénomène The Great British Baking Show, il vient de lancer son premier livre, Les desserts de Dario.
Que retiens-tu de ton expérience au Meilleur pâtissier du Québec ?
Dario Bivona : Le côté humain de l’émission et surtout l’après-tournage. Je suis resté proche des juges, des animateurs et des autres participants. On a un groupe Facebook sur lequel on se parle presque tous les jours. On s’envoie des photos de nos gâteaux. Durant la promo de mon livre, je leur ai partage des trucs sympathiques. Et quand je passe à la radio, j’essaie de nommer certaines compétences que m’ont transmis les autres participants.
Comment décris-tu ta signature ?
Dario Bivona : J’ai une touche italienne. J’intègre souvent des alcools fins et des fruits dans mes desserts. J’ai un style assez rustique et j’aime qu’on puisse voir que mes créations ont été faites maison. Je cherche la simplicité en général. Trop souvent, la pâtisserie décourage les gens. Chez moi, j’ai des livres de pâtisseries super compliquées qui sont magnifiques à voir, mais dont je n’ai fait aucune recette. Je ne voulais pas offrir un livre de ce genre.
De quelle façon la pâtisserie est-elle entrée dans ta vie ?
Très jeune, je vivais avec ma grand-mère et ma tante, parce que mes parents travaillaient en Allemagne. J’ai commencé à observer ma grand-mère dans la cuisine. Quand mes parents sont rentrés en Italie, nous allions luncher chez ma grand-mère deux ou trois fois par semaine. J’aimais aussi passer des journées entières chez elle. Je l’aidais à faire des pâtes à la maison. Je la voyais préparer des sauces, des tartes et des gâteaux. J’ai commencé à expérimenter un peu avec elle. Puis, j’ai continué avec ma mère, qui a toujours dit qu’elle voulait que mon frère et moi soyons indépendants. Il y a 35 ans, ce n’était pas commun dans les familles italiennes. Si une famille était composée de filles et de garçons, c’était presque toujours les filles qui apprenaient à faire la cuisine et les gars ne faisaient rien dans la maison.
Quand as-tu quitté l’Italie ?
Dario Bivona : J’ai d’abord participé à Erasmus, un programme d’échange étudiant en Europe, avec mon meilleur ami. On voulait aller en Espagne pour faire comme dans le film L’auberge espagnole, mais on a été pris dans le nord de la France, en Champagne-Ardenne. À l’époque, je ne parlais pas un mot de français ! Comme je voulais vivre une immersion totale, je suis resté là-bas durant les vacances de Noël. Un déclic s’est alors produit dans ma tête et j’ai commencé à parler en français. Après Erasmus, j’ai terminé mes études en Italie en un temps record et je suis reparti à Paris pour y faire une maitrise en biologie-biochimie.
Pourquoi ne pas être resté là-bas ?
Dario Bivona : J’aimais la ville, mais pas trop les Parisiens. J’avais de bonnes connaissances, mais pas autant d’amis proches qu’en Italie. Je me sentais toujours comme l’étranger parmi les Français de souche. J’étais toujours l’Italien, des fois le « Rital ». Je savais que je ne ferais pas toute ma vie là-bas. Après ma maitrise, j’ai songé à poursuivre mes études en Belgique, en Suisse ou au Québec. J’ai choisi de m’établir à Montréal pour faire une maitrise en pharmacologie en 2006, à l’âge de 24 ans. Je pensais rester trois ans maximum, mais je suis tombé en amour avec Montréal et les Québécois en général. L’accueil était totalement différent de ce que j’avais vécu à Paris. J’ai tissé des amitiés profondes. Je me suis senti tout de suite à la maison.
L’émission couronne le meilleur pâtissier amateur du Québec, mais tu possèdes un immense bagage de connaissances. Te considères-tu comme un professionnel ?
Dario Bivona : Je ne me considérerai jamais professionnel pour la simple et bonne raison que c’est nécessaire pour moi d’avoir fait des études pour se définir ainsi. Je fais de la pâtisserie à un niveau plus poussé depuis seulement deux ou trois ans. Par exemple, avant l’émission, j’avais fait un Saint-Honoré une seule fois.
En quoi ton livre se démarque-t-il des autres ?
Dario Bivona : Par son approche en crescendo. On part des recettes de base que j’invite les gens à maitriser, pour ensuite s’épanouir davantage en pâtisserie et essayer de nouvelles choses. Au début, ce sont des recettes que même les enfants pourraient faire avec nous. Puis, on se rend jusqu’à des recettes plus élaborées. Si on passe du début à la fin, on apprend des techniques. Le livre nourrit notre confiance. J’ai également intégré quelques recettes sans gluten, sans produits laitiers et sans noix pour qu’il soit accessible à tout le monde. Je trouve ça triste quand j’apporte un dessert […] quelque part et qu’une personne ne peut pas en manger à cause d’une allergie ou d’une intolérance.
Quand tu testais tes recettes, est-ce que ton copain les goûtait toutes ?
Dario Bivona : On en a mangé beaucoup et ça commence à se voir ! Heureusement, il aime beaucoup les pâtisseries, mais il essaie de ne pas en manger tout le temps. J’ai la chance d’avoir un copain qui travaille dans un grand bureau avec beaucoup de monde. Avant ma participation à l’émission, j’envoyais un gâteau de temps en temps pour que ses collègues en profitent. Durant l’émission, c’était un gâteau par jour !
Quel métier occupes-tu en parallèle ?
Dario Bivona : À la base, je suis conseiller en communications et j’ai travaillé en recherche de financement pour le Souk de Montréal. Présentement, je suis dans une année de pause pour me concentrer sur le livre et de nouveaux projets liés à la pâtisserie. L’automne prochain, je vais offrir des ateliers de pâtisserie à l’Institut culturel italien. J’aimerais concocter un deuxième livre. Et je vais probablement offrir des conférences sur ma participation à l’émission, mon expérience d’immigrant et mes changements de carrière.
INFOS | LES DESSERTS DE DARIO BIVONA, Dario Bivona, Les Éditions de l’Homme, Montréal, 2023 144 pages.