Première dramédie à mettre en scène un personnage central non binaire, la série Glamorous navigue entre comédie et critique sociale et même si elle n’évite pas certains clichés, elle s’en tire fort honorablement, bien campée entre plaisir coupable et plaisir tout court.
Madolyn Addison (Kim Cattrall), ancienne mannequin internationale et maintenant magnat de la marque de cosmétique Glamorous by Madolyn, erre dans un centre commercial du New Jersey. Elle y croise Marco Mejia, interprété.e par Miss Benny (youtubeuse et influenceuse assez connue) et, impressionnée par son savoir-faire et son franc-parler, elle décide de l’embaucher comme second.e assistant.e.
Les accords non binaires apposés au personnage de Marco ne sont pas innocents puisque cet élément constitue l’un des pivots de la série. Du haut de ses talons, cellui-ci est plongé.e au cœur d’une industrie où le rose peut rapidement virer au gris puisque la compagnie connait son lot de problèmes financiers et cherche désespérément à gagner un nouveau public. L’arrivée de cet.te novice, littéralement sorti.e de nulle part, n’est par ailleurs pas sans susciter rivalités et jeux de pouvoir chez plusieurs de ses collègues, de même qu’un intérêt très charnel.
L’un des grands atouts de la série est d’aller bien au-delà du « queer de service » en présentant plutôt une galerie de personnages diversifiés et bien développés. La première assistante, Venetia (Jade Payton), est bisexuelle et tombe dans l’œil d’une designeuse, Britt (Ayesha Harris) : mais saura-t-elle voir plus loin que sa carrière ? Marco se retrouve au cœur d’un triangle amoureux entre Ben (Michael Hsu Rosen), un geek du département graphique, et Parker (Graham Parkhurst), un sportif baraqué. On y retrouve également la présence de plusieurs drag queens, dont Priyanka (Mark Suknanan), grande gagnante de la première saison de Canada’s Drag Race.
Le personnage secondaire le plus charismatique et désarmant demeure cependant Chad (Zane Phillips), fils de Madolyn, dont l’existence est partagée entre la direction des ventes et la musculation intensive. L’acteur arrive à combiner un look survitaminé de Captain America gai (Gayptain America?) et une insécurité à fleur de peau quant à sa propre valeur. Le personnage aurait cependant mérité d’être plus approfondi.
Créée par Jordon Nardino, qui a œuvré au succès de Smash et de Desperate Housewives (Beautés désespérées), la série est truffée de répliques hilarantes : « Nous sommes des soldats au service du rouge à lèvres » ; « Poussez-vous, je suis gai », « Le film le plus ancien que j’ai vu, c’est Titanic et je ne suis pas certain de savoir qui est Cher ».
Au-delà de son lot de magouilles souvent tirées par les cheveux, la série évite certains lieux communs en présentant des relations amoureuses relativement complexes dont la conclusion n’est pas télégraphiée dès le premier épisode. Elle ne se contente également pas de présenter un personnage non binaire au parcours exaltant, mais l’inscrit au contraire dans un réel où il fait face à l’inconfort de certains hommes vis-à-vis une expression de genre non traditionnellement masculine.
Le rythme est bien marqué et même si votre intérêt pour l’industrie du maquillage avoisine le zéro absolu, on se surprend à suivre la série avec passion. Les références culturelles abondent parfois un peu trop, mais plusieurs frappent dans le mille, notamment au cœur d’une course haletante aux suspects, qui se veut un pastiche du film Clue. Également au menu, une incursion à Provincetown, où on nous présente un lip-sync intégral du « Cell Bloc Tango » de la comédie musicale Chicago, avec un Chad coincé dans une robe plus que légère.
Une saison 2 est d’ores et déjà annoncée et on ne peut qu’être intrigué.e.s puisque la conclusion du dernier épisode amène un lot de révélations pour le moins surprenantes.
INFOS | La série est disponible en anglais et en français, dans un doublage fort bien fait si ce n’est de la prononciation de certains termes anglais qui écorcheront les oreilles québécoises. Les 10 épisodes de Glamorous sont présentés sur Netflix.