Vendredi, 28 mars 2025
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    Nous n’apprenons rien

    Nous n’avons rien appris. Des siècles d’histoire qui sont un palmarès épouvantable de guerres, et nous osons sans aucune réserve parler d’un monde civilisé. Et un simple regard dans le rétroviseur temporel nous renvoie l’image d’hommes, à l’exception de quelques femmes, qui pour une cause ou une autre, un bout de territoire, un Dieu, parfois pour le même, en appellent à en découdre au nom de la simple et puérile satisfaction du pouvoir.

    Je pourrais produire un livre recensant des citations d’auteurs, d’autrices, d’artistes qui, bien mieux que moi, ont démontré l’absurdité de toute guerre et que toute guerre, avant même qu’elle ne soit déclarée, peut être qualifiée d’échec. L’histoire nous l’enseigne, encore faut-il être à son écoute.
    On peut, comme en cette fin d’année, s’intéresser à un possible cessez-le-feu dans la bande de Gaza,
    comptabiliser les morts d’un côté comme de l’autre, ou encore écouter les commentateurs nous faire part des nombreuses rencontres au plus haut niveau pour tenter d’infléchir la position des belligérants. Du déjà vu, du déjà su. Et puis, comme un mauvais feuilleton quotidien, on s’habitue peu à peu, il suffit de prendre l’exemple de l’Ukraine, passé au second rang dans les nouvelles. En février prochain, on fêtera le second anniversaire de cette guerre.
     
    Sans compter qu’avec le nouveau conflit entre Israël et le Hamas, on nous somme de prendre position, en rappelant chaque fois qui a été le premier à commencer, il y a combien d’années. Pire, en restant neutre, selon la personne à qui nous parlons, la neutralité apparaissant comme un soutien implicite à l’ennemi.
     
    En tant que gai ou queer, en tant que personne qui ne s’est jamais reconnu dans les autres hommes, qui dès l’adolescence n’a jamais voulu leur ressembler tellement ils me semblaient étrangers, j’aurais tendance à croire que la masculinité toxique dont on parle tant aujourd’hui a toujours fait partie de la culture du mâle, de la culture des dirigeants, avec ou sans couronnes, avec ou sans dieux. On peut dénoncer la soif de pouvoir chez un homme qui bat son ou sa conjoint.e, maltraite ses employé.e.s, on n’étend pas l’analyse jusqu’à l’appliquer à toutes les sphères de la société où ces chers hommes évoluent. Quand un ancien homme politique, aujourd’hui chroniqueur politique, explique que l’Assemblée à Québec est une arène dans laquelle il faut se battre et dans laquelle il y a peu de place pour lamollesse, on a une illustration emblématique de ce qui peut se passer dans les bureaux et l’entourage de la majorité des dirigeants de la planète.

    Je me fous de passer pour un doux rêveur naïf. Mieux, je me fais un devoir de cultiver cette posture et de croire que les utopies peuvent être les réalités de demain. Et j’en citerai pour preuve les mouvements 2SLGBTQ+. Comme je l’ai déjà écrit, nous nous sommes battu.e.s avec des talons hauts et des paillettes. Notre reconnaissance, nos droits, n’ont pas été conquis à coup de roquettes, d’actes terroristes ou autres. Oui, du sang, il y en a eu de versé, il y en a encore, mais il est toujours le fait de ceux qui s’opposent à nous, et en très grande majorité par des hommes. Aucune surprise.
     
    On pourrait associer les mouvements féministes qui, tout au long de leurs longues marches, n’ont pas gagné en reconnaissance à coup de kalachnikov. Ni en s’en prenant à des innocent.e.s pour se faire entendre. Elles n’ont pas versé le sang des autres. Au contraire, c’est souvent le leur qui a été versé. Bien sûr, on n’élève pas l’analyse jusqu’à remettre en cause le patriarcat, la phallocratie. C’est bien trop woke. C’est d’autant plus facile que pour le contester on ne cesse de se heurter à tous les niveaux à des Hommes prêts à tout pour conserver les privilèges que leur accorderait le pouvoir. Ils sont même prêts à tuer femmes et enfants s’il le faut.

    Si je suis parfois critique à l’égard du mouvement 2SLGBTQ+, il n’en reste pas moins que je reste très
    sensible à toutes ces personnes de bonne volonté, comme il en existe dans d’autres sphères de la société et pour d’autres causes, qui n’ont pas renoncé. Sensible à celles et ceux qui, sans recherche de pouvoir ou de reconnaissance exagérée, continuent de s’agiter, qui mettent en pratique et partagent les valeurs profondes d’humanité, qui les animent. Sensible aux nombreuses personnes, dans le communautaire 2SLGBTQ+, qui continuent à œuvrer pour un monde pas seulement plus tolérant, mais plus accueillant des autres, de l’Autre.

    Difficile alors de se mettre dans l’ambiance des Fêtes de fin d’année. On peut faire semblant d’y croire, ou encore tenter d’échapper, le temps de réunions amicales et familiales, à la laideur du monde. On peut aussi profiter de ce moment pour recharger les batteries et essayer de retrouver, dans la chaleur partagée avec les sien.ne.s, proches ou lointain.e.s, l’espoir qui parfois nous abandonne le reste de l’année, de retrouver ensemble cette petite flamme d’humanité pour tenter d’en faire un grand feu de joie collectif.  

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