Mercredi, 15 janvier 2025
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    Les résultats de l’étude Engage : Il faut que les hommes aient un meilleur accès à la PrEP

    Le 8 février dernier, plus d’une cinquantaine de participants (chercheurs, médecins, étudiants et représentants d’organismes communautaires) se sont rencontrés pour un «Café scientifique» soit la présentation des données de l’Étude Engage concernant les hommes gais et bisexuels et les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (ou «gbHARSAH»). Cette étude a débuté en 2017 et s’est terminée en 2023 et inclus donc la période de la pandémie de Covid-19 et ses confinements. L’Étude Engage comprenait les villes de Montréal, Toronto et Vancouver avec le plus de participants à… Montréal ! Le tout s’est déroulé à la Maison du développement durable, au centre-ville de la métropole.

    Engage avait été subventionnée par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Les Drs Gilles Lambert, de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), et Joseph Cox, de l’Université McGill, étaient les grands responsables et chercheurs de cette vaste équipe d’Engage.

    Pendant que les gens patinaient allègrement de l’autre côté de la rue à «L’espace tranquille», les chiffres défilaient sur les écrans alors que les chercheurs et chercheuses se relayaient pour divulguer les résultats des données de l’enquête.

    «RÉZO est le partenaire communautaire montréalais d’Engage depuis ses tous débuts, depuis plusieurs années et est fier d’avoir collaboré avec l’équipe de recherche, et d’avoir aidé à guider plusieurs de ses actions, et, surtout, d’avoir contribué à mobiliser des centaines de personnes à participer à l’étude», souligne Alexandre Dumont-Blais, le directeur général de l’organisme RÉZO.

    En tout, 2 449 gbHARSAH ont participé à cette étude à Montréal, Toronto et Vancouver, avec au-delà de 1 1000 personnes à Montréal, soit presque la moitié de la cohorte. Parmi les 2 008 individus qui étaient séronégatifs ou qui ne connaissaient pas leur statut sérologique, 1 159 étaient candidats aux recommandations du traitement de la PrEP (prophylaxie pré-exposition sexuelle) «et la moitié estimait en avoir eu besoin à un moment ou à l’autre au cours des six mois précédents, toutefois seulement vingt pour cent (20%) y avaient effectivement eu recours», peut-on lire sur le site de Canadian HIV Trials Network/Réseau canadien des essais VIH.

    «Les données présentées au Café scientifique du 8 février dernier, renforcent certaines de nos observations sur le terrain par nos équipes d’intervention : l’octroi d’un service adapté, c’est-à-dire dans le respect des réalités, de la vie et des pratiques des hommes GBQ [gais, bisexuels ou queer] et personnes trans qui ont des relations avec des hommes est primordial, sinon ces personnes ont moins recours aux services de soins, souligne Alexandre Dumont-Blais. L’accès rapide au dépistage, et particulièrement l’accès à la PrEP, un moyen de prévenir le VIH reconnu scientifiquement dans le monde, demeure un enjeu crucial : est-ce que toutes les personnes qui devraient et/ou souhaitent prendre la PrEP le peuvent vraiment ? Ont le budget ? (entre 55$ et 65$ par mois si prise à tous les jours).»

    «Il est clair que nous pouvons faire mieux avec la promotion et l’accès à la PrEP, même dans la communauté d’hommes gais/bisexuels. Nous sommes rendus à environ la moitié qui pourraient en bénéficier qui l’utilisent. Parfois c’est une question de coûts et il y a une solution qui se trouve dans la gratuité de la PrEP comme mesure de santé publique», ajoute Ken Monteith, le directeur général de la COCQ-Sida (Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida), qui agissait à titre de modérateur de ce mini congrès scientifique.

    Parmi ces hommes, 32,6% étaient âgés entre 18-29 ans, 28,8% entre 30-39 ans, 14,1% entre 40-49 ans, 15,4% entre 50-59 ans et 9,2% étaient âgés de 60 ans et plus.

    «Organiser des activités de retour à la communauté avec les résultats de recherche est très important et nous pouvons être fier.e.s de notre record à cet égard, dit Ken Monteith. Ces activités assurent la confiance des gens de participer aux études à venir, et nous l’avons vu avec la vitesse du recrutement pour Engage à Montréal vs les autres villes participantes. […] Une étude longitudinale comme Engage nous permet de voir l’évolution des pratiques dans notre communauté et adapter nos interventions et mieux répondre aux besoins courants.»

    Selon les toutes dernières statistiques, il y avait au Canada 62 790 personnes qui vivaient avec le VIH-sida au pays (pour l’année 2020). De ce nombre, 33 335 sont gbHARSAH, soit 53,1% de l’ensemble. «Selon les estimations canadiennes relatives au VIH, 709 nouvelles infections par le VIH au Canada concernaient des hommes gbHARSAH en 2020 (46,6 % de toutes les nouvelles infections). Cette estimation prenait en compte 666 nouvelles infections par le VIH chez des hommes ayant eu des relations sexuelles avec d’autres hommes, et 43 nouvelles infections chez des hommes qui s’étaient injecté des drogues et qui ont eu des relations sexuelles avec d’autres hommes», indique le site de CATIE.

    On apprend dans Engage que plus du trois quart (3/4) des participants utilisaient des sites et applications de rencontres pour des relations sexuelles avec un ou plusieurs partenaires.

    Pour ceux qui pratiquent le «chemsex» (relations sexuelles avec usage de drogues) appellé aussi P’N’P (party’n’play), les drogues les plus fréquemment utilisées étaient la cocaïne (poudre) ou le crack, le crystalmeth, le GHB et ecstasy/MDMA ou encore de la kétamine. Au début de l’étude, 5,1% des participants s’injectaient principalement du crystalmeth. «Les gbHARSAH qui s’injectent ont un risque plus élevé de d’acquisition du virus du VIH et de l’hépatice C que d’autres [qui ne s’injectent pas], souligne le Dr Joseph Cox. […] Pour ceux qui sont réceptifs, le crystalmeth a un certain impact sur le sexe anal sans condom en termes d’infections aux ITSS (infections transmissibles par le sexe et par le sang) […]» Par contre, ce qu’on a observé aussi, c’est qu’une bonne proportion des participants ont eu recours à de l’aide pour réduire leur consommation. Ce qui est une bonne nouvelle en soi.

    «La COVID-19 a eu un impact important sur la consommation : réductions temporaires pour certaines substances à cause de la fermeture de bars et frontières, maintien d’autres, comme le cannabis, estime Ken Monteith. […] L’accès aux soins et services en santé mentale demeure problématique, surtout pour les gens qui n’ont pas un contact régulier avec le système de la santé.»

    «Aussi, les conclusions de l’étude, indiquent qu’une des clés pour réduire la transmission des ITSS/VIH, notamment, est d’offrir des points de service différents, autrement accessibles que dans les lieux habituels, comme par exemple ce qu’a inauguré RÉZO à l’été 2023, la Zone Rose : un espace de dépistage / intervention en plein cœur du Village, rue Sainte-Catherine, dans un conteneur climatisé, avec un cône rose géant sur le toit : attirer l’attention pour sensibiliser au dépistage et à la santé de nos communautés, de commenter Alexandre Dumont Blais. Les initiatives de proximité fonctionnent et elles doivent être soutenues, et le travail collaboratif avec les instances de santé publique, cliniques et communautaires, doit se poursuivre pour contrer les transmissions d’ITSS.»

    «Les hommes gais et bisexuels vivent des problèmes multiples reliés à leurs identités — homophobie dans leurs communautés d’origine et racisme dans la communauté gaie. Ceux-ci s’ajoutent aux défis auxquels tous les membres de la communauté font face, et compliquent les réponses. Définitivement important pour la communauté de développer de meilleures réponses», de conclure Ken Monteith.

    INFOS : www.engage-men.ca

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