Si Tommy Joubert a multiplié les rôles à la télévision dans Like-moi, Les Simone, Contre-offre, Les pêcheurs et Géolocaliser l’amour, avant de déployer son talent au grand écran dans Solo, les adeptes de comédies musicales savent qu’il a brillé sur scène dans Footloose, Rock of Ages et La famille Adams. Après des années à jouer brillamment les seconds violons, le premier rôle qu’il défendra dans Les Producteurs, dès le 28 mars, est une forme de consécration.
The Producers est la comédie musicale la plus primée de l’histoire de Broadway avec 12 Tony Awards. Quelles sont les qualités de l’œuvre qui en ont fait un si grand succès ?
Tommy Joubert : C’est un show irrévérencieux. C’est tellement wrong sur plein de niveaux ! La façon dont c’est écrit pour faire passer des affaires qui n’ont pas de maudit bon sens, c’est du génie. L’histoire est vraiment bonne et le chemin dramatique de chacun des personnages est excellent. À Broadway, la présence de Nathan Lane et de Matthew Broderick a beaucoup contribué au succès du spectacle. Il y a beaucoup de blagues qui sont faites sur Nathan lui-même que nous devons adapter, car nous n’avons pas les mêmes référents. Ça va être l’fun à Montréal d’avoir un Serge Postigo qui va rire de lui-même.
Serge reprend le rôle de Max Bialystock, qu’il a joué 380 fois devant plus de 300 000 spectateurs en France. À quel point sa connaissance du projet est-elle sécurisante pour toi quand il te dirige et te donne la réplique ?
Tommy Joubert : J’ai vraiment confiance en lui. Une de ses grandes qualités, c’est que tout est très clair dans sa mise en place. Je sais quel est mon chemin intérieur, je sais ce que je fais et je sais ce qui soutient chaque réplique. Comme il est lui-même acteur, il sait comment parler aux interprètes et comment soutirer le meilleur de tout le monde.
Il arrive avec un immense bagage après avoir joué le spectacle des centaines de fois, mais il propose à Montréal une adaptation du texte français et anglais. Je ne veux pas mettre des mots dans sa bouche, mais c’est comme s’il venait présenter le show qu’il aurait aimé monter en France.
Je suis amoureux des comédies musicales, mais quand j’ai vu le remake du film The Producers, j’ai trouvé ça d’un ennui total. À quel point votre show se démarque-t-il de ce long métrage ?
Tommy Joubert : C’est drôle, parce que quand j’ai vu le remake, je me suis dit : « Voyons, crisse, comment ça a pu gagner autant de prix? » Je pense que c’est un projet fait pour être joué sur scène devant du monde pour rire en gang. Le fait qu’on ne soit pas en communauté en train de regarder ça, ça fait en sorte que c’est un peu drabe. Bref, le remake n’est pas du tout représentatif du spectacle. La danse est débile. La scénographie va rendre ça plus grandiose. Les tounes n’ont pas de bon sens. C’est la chose la plus difficile à chanter que j’ai faite de ma vie.
Qui est ton personnage, Leopold Bloom ?
Tommy Joubert : Leo, c’est un comptable un peu triste de sa vie. Il est très beige. Il finit par s’occuper des livres comptables de son idole, Max, un producteur de Broadway déchu qui enchaîne les flops.
En faisant quelques calculs, Léo découvre la petite crosse que Max pourrait faire pour gagner plus d’argent. C’est la première fois qu’on me confie un aussi gros rôle. Et c’est rare qu’on me permette de jouer un être beige et vulnérable. Ça fait 10 ans que je travaille et que ça roule, mais c’est un accomplissement en soi d’avoir une si grande partition dans un show aussi complexe. Je n’aurais jamais cru jouer des comédies musicales et je me retrouve dans un show culte.
Comment le jeu, le chant, la danse sont-ils entrés dans ta vie ?
Tommy Joubert : Je voulais faire de la musique quand j’étais jeune. Je jouais de la base tout seul dans mon sous-sol. Un jour, j’ai vu ma sœur faire du théâtre et j’ai eu envie d’en faire moi aussi. La musique a pris le bord et le jeu n’a jamais arrêté depuis. À l’École nationale de théâtre, ma prof de chant m’a fait réaliser que j’avais du coffre, une bonne voix et que j’étais sur la note. Pourtant, je n’avais jamais appris à chanter. Elle m’a proposé de travailler ça et elle m’a coaché pour mon audition de Footloose, que je ne voulais pas faire.
Tu te sentais comme un imposteur ?
Tommy Joubert : Tellement ! Surtout aux côtés d’Éléonore Lagacé qui a un pitch perfect et de Philippe Touzel qui en a fait énormément, en plus d’être beau que l’crisse. Moi, j’arrive, le petit gros de la gang, je suis censé faire des jokes et chanter tight avec eux, deux mois après qu’on m’a appris que je savais chanter. Heureusement, plus ça va, plus j’assume que je sais chanter.
Plus jeune, de quelle façon c’était perçu d’être amoureux des arts, roux, rond et queer ?
Tommy Joubert : À Trois-Rivières, je n’assumais pas ma queerness. J’avais un chum en troisième secondaire, mais personne n’était au courant, sauf quelques amis proches. Ensuite, j’ai aussi eu des blondes. Le fait d’être rond m’a permis d’être drôle, de développer ce mécanisme de défense.
Ça a longtemps été un enjeu pour moi d’arriver à me trouver beau et d’avoir l’impression que je méritais ma place. C’est peut-être pour ça que je prenais de la place vocalement, que je voulais être drôle et que je voulais tout animer pour essayer d’oublier que je n’étais pas bien avec moi-même. Peu à peu, mon cast est devenu une force. J’ai développé une assurance sincère en acceptant qui je suis.
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