Dimanche, 15 septembre 2024
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    Fugues a 40 ans : une vie en soi

    Je n’ai pas écrit pour Fugues dès le premier numéro. De toute façon, je n’étais pas encore au Québec à cette époque-là, me contentant d’y jouer parfois le touriste. J’ai commencé à me commettre au milieu des années 90, Fugues atteignait sa maturité (ce que je n’ai pas encore atteint). Un choix mûrement réfléchi – je plaisante – puisque j’avais décidé de travailler avec et auprès des personnes LGBTQ. À l’époque, il aurait été difficile de faire carrière dans les organismes communautaires, ceux-ci étant très peu financés à mon arrivée.

    Ce qui me touche quand il est question de cet anniversaire, c’est de constater que Fugues est le seul média 2SLGBTQ+ francophone qui peut se vanter d’une telle longévité. Bien sûr, beaucoup de pays qui composent la francophonie n’ont jamais eu de médias gais locaux, et malheureusement encore aujourd’hui, ne sont pas près d’en avoir. Pour d’autres pays, comme la France, les journaux gais ont connu des rythmes chaotiques. Des publications apparaissaient quelques mois, voire quelques années, disparaissaient, réapparaissaient parfois avec le même titre, mais avec une formule renouvelée. Le plus connu étant Têtu.

    Cette longévité de Fugues mérite d’être soulignée et nous pouvons en tirer une certaine fierté. Il est le seul média 2SLGBTQ+ francophone au monde à avoir passé ce cap. Nous avons su aussi traverser les tempêtes et distribuer chaque mois un nouvel exemplaire du magazine. Celui d’avril 2024 est le 477e numéro. De quoi remplir plusieurs étagères d’une bibliothèque.

    Aujourd’hui, le magazine Fugues doit faire face aux différentes crises que vivent les médias et surtout ceux qui restent indépendants face aux géants du Web. Tout comme il doit composer avec les changements des «consommateurs» d’infos, qui ont, à leur disposition, d’innombrables plateformes sur lesquelles trouver ce qui les intéresse. Comme pour d’autres médias, des questions se posent régulièrement, comme de continuer à tirer une version papier ou de passer à 100% au virtuel, une tendance qui ne satisfait pas forcément un lectorat qui regrette ici la disparition de quotidiens papier, et ne s’avère pas rentable, même pour les grands groupes qui l’ont fait.

    Il serait illusoire et surtout prétentieux de penser que Fugues dans sa forme actuelle sera là dans 40 ans. En effet, la technologie, entre autres, et les habitudes de lecture, bougent très rapidement depuis quelques années. Tout est une question d’adaptation. Mais Fugues relèvera ses défis, au fur et à mesure, j’en suis convaincu. Durant 40 ans, le magazine a changé, évolué et tenté d’être en phase avec l’actualité de nos communautés. Nous avons aussi ouvert les pages aussi à celles et ceux qui se considèrent nos allié.e.s, tout comme nous avons interpellé les élu.e.s municipaux, provinciaux et fédéraux sur les enjeux 2SLGBTQ+. Les artistes n’ont pas été oublié.e.s et certain.e.s ont connu leur première couverture médiatique dans nos pages, tout comme nous avons rencontré des artistes confirmé.e.s. En somme, d’avoir couvert dans la mesure de nos moyens, tout ce qui pouvait intéresser de près et de loin les personnes 2SLGBTQ+.

    Bien sûr, nous avons aussi essuyé des critiques, on ne peut faire plaisir à tout le monde. La plupart de ces critiques étaient infondées, pour les autres nous avons apporté les correctifs qu’il fallait. Fugues a encore sa place et son rôle à jouer. L’égalité sociale n’a pas été encore atteinte, l’égalité juridique non plus, par pour toustes en fait, si l’on s’attarde à la situation des jeunes personnes trans. Et puis, nous
    devons faire face à une montée des discours homophobes et transphobes et pas seulement chez nos voisins du Sud, mais ici aussi. Cela demande de rester vigilant.e.s et surtout d’être proactifs et proactives et pas seulement dans nos réactions pour contrer les discours de gouvernements, de médias et de groupes populistes, conservateurs et religieux intégristes. En fait, il ne faut ne pas attendre que cela aille plus mal, pour (ré)agir.  

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