La Cour suprême des États-Unis refuse de rouvrir le débat sur le mariage homosexuel

La Cour suprême des États-Unis a refusé, lundi, d’entendre un appel qui aurait pu remettre en question la légalité du mariage entre personnes de même sexe, confirmant ainsi la validité du précédent historique Obergefell v. Hodges de 2015. Cette décision, rendue sans explication, met un terme à la tentative de Kim Davis, une ancienne greffière du Kentucky devenue symbole de la résistance religieuse à l’égalité matrimoniale.

Kim Davis, élue républicaine, avait refusé en 2015 de délivrer des licences de mariage à des couples de même sexe, invoquant ses convictions religieuses. Son geste de défi avait fait d’elle une héroïne de la droite chrétienne américaine — mais aussi l’objet de plusieurs poursuites judiciaires. Condamnée à payer 360 000 $ US en dommages et frais juridiques à un couple lésé, elle a porté l’affaire jusqu’à la plus haute instance du pays, réclamant à la fois une protection au nom de la liberté religieuse et l’annulation pure et simple de Obergefell v. Hodges.

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En refusant d’entendre sa cause, la Cour suprême évite de rouvrir un dossier explosif dans un climat politique déjà marqué par les reculs sur les droits reproductifs. En 2022, la même institution — désormais dominée par une majorité conservatrice 6 contre 3 — avait aboli le droit constitutionnel à l’avortement établi par Roe v. Wade en 1973. Depuis, de nombreuses organisations LGBTQ+ craignaient que le mariage homosexuel soit la prochaine cible.

Une victoire prudente, mais symboliquement forte

Les juges n’ont fourni aucun commentaire pour justifier leur refus. Mais leur décision a été accueillie avec soulagement par les défenseurs des droits LGBTQ+.
« Aujourd’hui, l’amour a encore gagné », a réagi Kelley Robinson, présidente de la Human Rights Campaign. « La Cour suprême rappelle qu’aucun élu ne peut utiliser son pouvoir pour refuser les droits constitutionnels d’autrui. »
Mary Bonauto, l’avocate qui avait plaidé Obergefell en 2015, a également salué « un grand souffle de soulagement » pour des millions de familles queer.

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Pour Allen Morris, du National LGBTQ Task Force,  « le mariage égalitaire est la loi du pays, point. Nos adversaires ont perdu encore une fois : la haine s’épuise, l’amour persiste. »

Depuis la reconnaissance du mariage égalitaire, plus de 800 000 couples de même sexe se sont mariés aux États-Unis et élèvent près de 300 000 enfants. Ce chiffre incarne les « intérêts de reliance » que certains juges conservateurs eux-mêmes ont récemment évoqués : des droits sur lesquels des citoyens ont bâti leur vie et leur famille, et qu’il serait dévastateur de retirer rétroactivement.

Un paysage juridique toujours fragile

Malgré cette victoire symbolique, les militants demeurent prudents. Kevin Jennings, directeur de l’organisation Lambda Legal, rappelle que « les adversaires de l’égalité sont puissants et bien financés » : « Ce n’est pas le moment de baisser la garde. »
De fait, plusieurs États conservateurs ont récemment adopté ou envisagé des mesures visant à limiter ou contester le mariage homosexuel. Le Texas, par exemple, autorise désormais les juges à refuser de célébrer des unions entre personnes de même sexe pour des raisons religieuses.

En 2022, le Congrès américain avait pourtant adopté la Respect for Marriage Act, promulguée par Joe Biden, qui oblige tous les États et le gouvernement fédéral à reconnaître les mariages entre personnes du même sexe et les mariages interraciaux. Cette loi demeure une protection importante : même si Obergefell était un jour renversé, les unions déjà contractées seraient toujours valides. Cependant, des États hostiles pourraient cesser de célébrer de nouveaux mariages, créant une inégalité territoriale dans l’accès aux droits.

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Une cour plus conservatrice, mais moins téméraire ?

En refermant le dossier Davis, la Cour suprême envoie le message que le mariage entre personnes de même sexe fait désormais partie du paysage constitutionnel américain. Pour la communauté LGBTQ+, c’est un répit bienvenu — mais pas une fin de combat.

La composition de la Cour suprême a profondément changé depuis 2015 : trois juges nommés par Donald Trump ont déplacé son équilibre vers la droite. Les trois magistrats qui s’étaient opposés à Obergefell — Clarence Thomas, Samuel Alito et John Roberts — siègent toujours. Et c’est Thomas qui, en 2022, a publiquement suggéré de réexaminer la décision sur le mariage homosexuel.

Toutefois, d’autres voix au sein du bloc conservateur paraissent moins enclines à une telle croisade. Dans ses écrits récents, la juge Amy Coney Barrett a distingué les droits « fondamentaux » liés à la vie familiale — se marier, avoir des enfants, user de contraception — des questions morales controversées comme l’avortement ou l’euthanasie. Cette nuance laisse croire qu’une majorité de juges pourrait ne pas vouloir s’aventurer sur le terrain du mariage égalitaire, devenu largement accepté par la société : plus de 70 % des Américains y sont désormais favorables, selon les sondages.

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