Œuvre phare de la littérature et du cinéma québécois, Le Matou s’empare maintenant de la scène pour la première fois sous la forme d’une comédie musicale aussi divertissante qu’émouvante. Après avoir charmé le public de Gatineau et Sherbrooke, la comédie musicale sera présentée à Montréal dès la fin octobre, avant de se rendre à Québec fin novembre, puis d’entamer une tournée du Québec en janvier.
Treize comédiens et comédiennes donnent vie aux célèbres personnages créés par Yves Beauchemin, en plus de faire découvrir au public les chansons originales signées Jessy Brouillard. Ce spectacle rempli de rythme, d’émotion et de gaieté est mis en scène par Joël Legendre.
Le Matou a révolutionné son époque et s’est gravé dans le cœur des Québécois de nombreuses générations. L’histoire nous ramène en 1974, alors qu’un couple de jeunes Montréalais, Élise et Florent, rêve d’acquérir un restaurant. Un certain Egon Ratablavasky surgit dans leur vie pour leur offrir sur un plateau d’argent l’objet de leur désir: La Binerie! Mais avant que leur aventure ne tourne au cauchemar et qu’ils ne perdent tout, des mains même de leur bienfaiteur, Élise et Florent se prennent d’affection pour un enfant de 6 ans, Monsieur Émile, laissé à lui-même par sa mère. C’est grâce à Monsieur Émile et aux amis rencontrés tout au long de l’aventure que le couple réussira à reprendre le contrôle de leur destinée.
Entre les représentations à Gatineau et les répétitions pour la première montréalaise, nous nous sommes entretenus avec Matthieu Lévesque — dont le charisme scénique est indéniable et la voix unique —, ainsi que Jessy Brouillard, qui adapté l’œuvre d’Yves Beauchemin, en signant le livret, les paroles et la musique de cette comédie musicale écrite dans la tradition de Broadway.
Matthieu, comment l’expérience du Matou est-elle différente de celle du Saturday Night Fever, Rock of Ages et Le Bodyguard dans lesquelles tu as joué et où on t’a découvert?
Matthieu Lévesque : La grande différence, entre Le Matou et les autres productions dans lesquelles j’ai joué c’est que c’étaient toutes des productions préexistantes qui avaient déjà tourné ailleurs. Par exemple, Saturday Night Fever était une création française et une partie de la distribution était d’ici et l’autre de la France. Le défi dans ce cas-là était de mettre un peu de moi dans un personnage préexistant.
Avec Le Matou, on a affaire à une création, ce qui nous donne plus de liberté. Il faut évidemment faire des choix, mais le potentiel créatif est énorme pour un artiste. On fait partie de la création des personnages. Il y a de nous dans le spectacle et un peu de tout le monde qui a participé au processus créatif. Ça crée un sentiment d’appartenance vraiment différent d’autant plus que c’est un spectacle ancré dans le Québec et Montréal.
Jessy, est-ce que tu connaissais Matthieu avant Le Matou, et qu’est-ce que tu peux nous dire sur le Florent qu’il interprète?
Jessy Brouillard : J’avais rencontré Matthieu en tant que chanteur parce que je l’avais engagé pour faire la démo de la chanson Lucifer. Quand Joël (Legendre) l’a demandé en audition, j’ai été surpris car je ne connaissais pas Matthieu en tant que comédien. Mais quelle magnifique surprise! Non seulement Matthieu chante comme un demi-dieu, mais c’est également un excellent danseur et un très bon comédien. Matthieu est drôle et attachant, si bien que comme spectateur tu le veux comme meilleur ami, mais il est aussi immensément sincère et touchant. Alors, quand il souffre, tu souffres avec lui. Et quand il réussit, tu réussis avec lui. Est-ce que ça paraît que je suis vraiment devenu un fan! (rires)
Matthieu Lévesque : Ah merci, c’est flatteur ça.
Le Matou est un roman de plus de 500 pages, quelle a été ta démarche de création pour l’adapter en comédie musicale et comment cela diffère de « Deployed » que tu as présenté à New York au « New York Musical Theatre Festival »?
Jessy Brouillard : « Deployed » était une œuvre originale, une véritable page blanche. Avec Le Matou, c’était une expérience complètement différente. J’ai eu le plaisir de plonger dans l’univers riche et coloré des personnages d’Yves Beauchemin. Le défi était de me concentrer sur l’histoire des personnages principaux et leur quête, car un « musical » c’est avant tout une aventure. Quand j’ai écrit le synopsis, je me suis constamment demandé comment faire avancer l’histoire du point de vue de la quête de Florent et Élise, mais aussi sur le plan émotionnel. Tout cela en tentant de trouver le bon équilibre entre l’humour, les numéros de production et les moments dramatiques forts. J’ai avancé dans l’écriture une scène à la fois, en produisant une maquette pour chaque chanson.
Matthieu, ton personnage de Florent est présent presque tout le temps. Entre les chansons de groupe, tes solos et tes duos avec Audrey-Louise Beauséjour, est-ce que tu as maintenant une chanson préférée?
Matthieu Lévesque : Ma chanson préférée, je pense que c’est À temps plein, qui est la berceuse que Florent et Élise chantent à Monsieur Émile. C’est le premier moment où on sent vraiment l’attachement paternel et maternel envers l’enfant. C’est vraiment un moment fort, je trouve. Il y a tellement d’action qui se passent avant. Ça bouge, ça bouge et ça bouge. C’est le premier moment où ça se dépose. Je pense que ce changement de rythme résonne auprès du public et la chanson est magnifique.
Le spectacle est drôle et rapide, mais sans voler le punch, la chanson finale est très émouvante. Est-ce que c’est difficile à interpréter?
Matthieu Lévesque : En effet. C’est la chanson Petit homme. Dans le spectacle, les fois où je trouve que j’interprète le mieux, c’est quand je n’ai même pas besoin de penser au jeu et aux paroles. Tout est tellement bien écrit. La gradation de la chanson se fait tellement bien, c’est tellement beau que les émotions viennent automatiquement. Je pense que c’est aussi le cas pour beaucoup d’autres artistes de la distribution. Et on voit par les réactions que cette chanson touche le public droit au cœur à chaque soir.
Jessy, quel a été ton plus grand défi dans l’écriture des chansons?
Jessy Brouillard : Chaque chanson est un défi en soi. Il faut accepter de se tromper et de tout foutre à la poubelle. Le défi est de faire en sorte que chaque chanson, chaque couplet… soit toujours organiquement ancré dans l’histoire et la quête de nos héros, tout en surprenant les spectateurs. Pour moi, c’était aussi important de respecter l’univers et les personnages incroyables de Yves (Beauchemin). J’ai cherché des mots, des expressions clés comme source d’inspiration. Par exemple, ce n’est pas un hasard si le chef cuisinier Picquot, joué si merveilleusement par Martin Larocque, interprète une chanson qui s’appelle « Les chaudrons de Cléopâtre » et dans laquelle il chante « Frotter le cuivre il vous sourit ». C’est une phrase du roman. C’est tellement fort et sympathique comme image, et surtout musical, que je suis parti de cette phrase pour créer la chanson.
Dans les répétitions, Matthieu, qu’as-tu le plus aimé ?
Matthieu Lévesque : C’est de voir l’évolution du projet. Avant les répétitions, je lisais le texte, mais je ne savais pas encore qui allait jouer les différents personnages et comment ils allaient être joués. D’arriver aux premières répétitions, puis de voir la proposition de chaque artiste pour leur personnage, c’était inspirant. Oui, on connait les personnages du livre, mais il y a une partie de chaque artiste qui s’ajoute dans le processus de création des personnages pour la comédie musicale. C’était de voir ça prendre forme, puis vraiment se préciser. Même chose pour les chansons et leur interprétation.
On doit passer par toutes les gammes d’émotion à ce moment-là.
Matthieu Lévesque : À 100 pour cent. Oui, à toutes les étapes de la création du spectacle, nous sommes passés par des moments d’insécurité jusqu’à la grande satisfaction, puis l’extase.
Après les représentations de Sherbrooke et Gatineau, avez-vous un moment favori dans le spectacle?
Matthieu Lévesque : C’est dur de n’en choisir qu’un. C’est souvent comme ça dans les
spectacles auxquels j’ai participé, puis dans ce cas-ci, encore plus, car j’y ai mis encore du mien. Je dirais que les chansons de groupe qui sont chorégraphiées et où tout le monde est sur scène sont mes moments favoris. Il se passe tellement de choses… c’est super excitant!
Jessy Brouillard : C’est cruel comme question! J’ai vu le spectacle presqu’à tous les soirs et il y a maintenant beaucoup de moments – comme quand un regarde un film plusieurs fois – que j’anticipe avec plaisir. Ces moments ont tous à voir avec la performance des comédiens. Chaque apparition de Loretta (Marilou Morin) et Picquot (Martin Larocque) est hilarante. Les deux duos de Matthieu et Audrey-Louise, je ne suis même pas certain d’être encore immunisé contre leur interprétation qui arrache le cœur. Chaque fois que Monsieur Émile pique une colère… du haut de ses 9 ans, ça ne laisse personne indifférent. Ça rit beaucoup!
Parmi nos lecteurs, il y a souvent une fascination pour les comédies musicales et pas seulement celles avec un contenu ouvertement queer. Y a-t-il un message en particulier que vous aimeriez lancer aux lecteurs.trices de Fugues?
Jessy Brouillard : Depuis le début avec Joël, on a toujours travaillé avec la volonté de faire du Matou la comédie musicale francophone la plus « Broadway » possible. Si je me fie à la réaction du public de Sherbrooke et Gatineau, je suis convaincu que les spectateurs vont s’amuser et vivre une montagne russe d’émotions.
Matthieu Lévesque : Il y a bien des moments… flamboyants et grandioses. C’est super
divertissant. On vous attend!
INFOS | LE MATOU. Livret, paroles et musique : Jessy Brouillard. Adaptée de l’œuvre originale Le Matou de Yves Beauchemin, parue aux Éditions Québec Amérique. Mise en scène : Joël Legendre. Production : Entourage. Avec Matthieu Lévesque, Audrey-Louise Beauséjour, Marilou Morin, Eliot Dupras (alternant), Diego Flint Djebari (alternant), Martin Larocque, Alain Dumas, Normand Carrière, Luis Oliva, Amélie B. Simard, Alexandre Bacon, Nicolas Drolet, Renee Wilkin et Lisa Palmieri.
Billets en ventes via https://www.lematou.ca
À Montréal, du 29 octobre au 10 novembre à la salle Pierre-Mercure du Centre Pierre-Péladeau (300 de Maisonneuve Ouest (métro Berri-UQAM)
À Québec, du 29 novembre au 30 décembre à la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec. En tournée à travers le Québec à partir du 10 janvier