Sélectionné pour représenter la Croatie dans la course à l’Oscar du meilleur film international 2025, Beautiful Evening, Beautiful Day d’Ivona Juka plonge dans la Yougoslavie de l’après-guerre, à la croisée de la passion, de la censure et de la solidarité entre artistes queer. Inspirée par le destin d’un parent cinéaste victime de la répression sous Tito, Ivona Juka signe une fresque historique aussi intime que politique, où la tendresse des amitiés et des amours queer se heurte à la violence du pouvoir.
En 1957, le réalisateur Lovro Horvat (interprété par Dado Ćosić) et son compagnon, le scénariste Nenad Miličić (Đorđe Galić), voient leur dernier film frappé d’interdiction : une scène jugée antipatriotique par les autorités déplaît à la censure. Le couple et leurs complices de toujours — Stevan (Slaven Došlo) et Ivan (Elmir Krivalić) — se voient alors imposer la supervision d’Emir Šervar (Emir Hadžihafizbegović), un bureaucrate du ministère de la propagande. Officiellement, il doit encadrer leurs prochains projets « de réhabilitation » ; en réalité, il a pour mission de détruire leurs carrières, sous prétexte qu’ils sont homosexuels.


Mais l’homme de l’État, rigide et loyal au parti, se découvre peu à peu bouleversé par le courage, la loyauté et le talent de ces artistes qu’il devait condamner. Entre admiration, amitié et désir refoulé, son allégeance vacille — jusqu’à remettre en question sa propre place dans un système où la surveillance et la peur dictent la création.
Tourné en noir et blanc austère, le film se distingue par une mise en scène à la fois rigoureuse et lyrique, ponctuée de paysages bucoliques et de scènes d’amour d’une grande sensualité, qui contrastent avec la dureté des séquences tournées dans le camp de travail de Barren Island — reconstitué avec une précision glaçante. Dado Ćosić livre une interprétation habitée du fougueux Lovro, chef de file d’une distribution homogène où chaque acteur incarne la complexité d’une époque où aimer, créer et résister relevaient du même acte de courage.
Sous ses allures de film d’époque, Beautiful Evening, Beautiful Day résonne avec une force particulière dans le contexte politique actuel. À travers le destin de ces cinéastes partisans devenus propagandistes malgré eux, Ivona Juka évoque la fragilité des libertés artistiques et la persistance des régimes qui contrôlent la parole publique.
Entre récit d’amour interdit, thriller politique et méditation sur la création, le film célèbre l’art comme un espace ultime de liberté — celui où, malgré la peur et la censure, il reste toujours possible de dire : vivre et aimer sans se taire.


INFOS : du 20 au 30 novembre
Pour vous procurer des billets https://image-nation.org/festival-2025

