Mercredi, 15 octobre 2025
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    Blaise Durivage plonge au cœur de l’homoparentalité

    Blaise et Philippe sont papas de deux garçons, Félix et Elliot, qui est autiste. Devant les défis de l’homoparentalité, de la neurodiversité et de la crisse de mère parfaite qui flashe son bonheur sur Instagram, ils sont à bout. Et attachants. Et vrais. Le premier livre de Blaise Durivage, « Pis, un jour, il a fallu faire des lunchs », vient d’arriver en librairies.

    Qu’est-ce que ça te fait de savoir que tu es l’un des premiers à placer l’homoparentalité au centre d’une histoire au Québec?
    Blaise Durivage : Mon Dieu, je suis honoré! Quand on cherchait à adopter, ça m’a manqué de lire des histoires sur des couples comme le nôtre. Les seuls modèles qu’on avait au Québec, c’était Joël Legendre. J’avais l’impression qu’il était privilégié ou qu’il vivait une réalité à laquelle on avait pas accès. Je lisais beaucoup d’histoires sur des familles homoparentales qui se passaient aux États-Unis, mais ça ne nous rejoignait pas du tout. J’avais envie de montrer la normalité de nos familles, même si on est différents.

    Dans le livre, on comprend que vous êtes confrontés aux clichés genrés du père et de la mère. À quel point est-ce encore présent?
    Blaise Durivage : En adoptant, je ne pensais que ça nous frapperait aussi fort! On avait lu la documentation sur les familles homoparentales où, presque naturellement, il y a un donneur de soins principal qu’on associe à la mère. C’est très spécial de jouer ce rôle, sans être totalement accepté par les mères. On a souvent entendu des remarques sur qui fait la mère et le père : ce n’était pas du tout dénigrant, mais un constat. Ça ne m’insultait pas. C’est un beau rôle. Mais c’est particulier dans la bouche de personnes que je connais peu.

    Ton alter-ego est au bout du rouleau. Comment s’est-il rendu là?
    Blaise Durivage : J’ai toujours essayé d’être parfait. Puisque notre famille est différente, je ne voulais pas que mes enfants soient catalogués comme ayant grandi dans une famille fuckée parce qu’ils ont deux pères. En plus, avoir un enfant autiste, c’est très demandant. Sans oublier les réseaux sociaux dont j’essaie beaucoup de me distancier : quand j’ai eu mon premier garçon, je n’arrêtais pas de me comparer. Mon chum ajouterait que je suis très exigeant envers moi. J’aime ça que le monde soit bien autour de moi.

    On comprend très vite que tu envies le bonheur facile des autres et que tu essaies d’être aussi parfait qu’une « bonne mère de famille ». Pourquoi essaies-tu de correspondre à ce cliché irréaliste même pour les femmes?
    Blaise Durivage : C’est une grosse question. Est-ce que ce sont les médias qui nous renvoient cette image? Est-ce le manque de familles homoparentales dans la sphère publique? J’ai tendance à me comparer aux mères parfaites, aux annonces de Tide et aux personnages de mères qu’on voit dans les séries et dans les films, qui nous montrent surtout des familles hétéronormatives. Ou c’est peut-être juste mon caractère qui est envieux de facilité et de bonheur.

    Tu dis souhaiter que tes fils soient le petit gars que tu n’a pas été et tu leurs imposes une certaine idée de la normalité. D’où vient ce désir qu’ils correspondent aux standards?
    Blaise Durivage : Quand tu es parent, tu essaies de protéger tes enfants le plus possible. Tu ne veux pas qu’ils souffrent et qu’ils vivent des choses négatives, même si ça fait partie de la vie et qu’ils doivent les expérimenter. Je sais à quel point c’est difficile d’être hors norme.

    Tout au long de l’histoire, tu revisites ton passé pour explorer ton parcours avec l’homosexualité. Comment ça s’est passé?
    Blaise Durivage : À l’époque, il y avait beaucoup d’histoires de rejets des parents, alors que ma famille est super importante pour moi. Je ne pouvais pas imaginer qu’ils me rejettent. J’ai donc cheminé très lentement. Pourtant, j’ai vécu une expérience homosexuelle très jeune en tant qu’ado. Ça m’avait confirmé que j’étais gai, mais je préférais gérer ce que ça impliquait plus tard.

    Que veux-tu que les lecteurs retiennent du processus d’adoption dans la banque mixte ?
    Blaise Durivage : C’est une expérience exténuante et magique. C’est la chose la plus intense que j’ai vécue de toute ma vie. Ça vient avec des émotions que je ne revivrai jamais. Ça nous en apprend beaucoup sur nous et ça nous ramène à une certaine humilité.

    Que fais-tu dans la vie?
    Blaise Durivage : J’enseigne depuis bientôt vingt ans. Je travaille en classes d’accueil auprès des élèves immigrants au primaire depuis deux ans. J’ai toujours écrit pour moi-même. J’aspirais un jour à devenir un auteur. Quand j’ai eu des enfants, c’était la mode des blogues et il n’y en avait pas vraiment sur l’homoparentalité. J’ai commencé à écrire là-dessus pendant deux ans. Puis, j’ai été finaliste au Prix de la nouvelle Radio-Canada. Et la maison d’édition m’a approché.

    Pourquoi cette histoire est la première que tu publies?
    Blaise Durivage : J’avais plusieurs idées. Je suis très attiré par la vie ordinaire qui me semble extraordinaire. Les gens la maison d’édition ont proposé que j’écrive sur ma vie, puisqu’il y a peu de couples d’hommes qui ont adopté. En plus, j’ai un garçon autiste. C’est partie de là. Je craignais que personne ne s’intéresse à la vie d’un petit gros homosexuel de quarante ans, mais ils m’ont convaincu du contraire. J’aimais l’idée de faire de l’auto-fiction en me basant sur ma vie pour inventer certaines choses. Ça m’a allumé. C’était comme un rêve un peu fou.

    INFOS | Pis, un jour, il a fallu faire des lunchs, de Blaise Durivage, Libre Expression, 240 pages.
    https://www.facebook.com/papapisdada/

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