C’est lors du festival Fantasia cet été que fut projetée la première canadienne du film L’Intrus (Lurker), premier long métrage d’Alex Russell, principalement connu pour son travail d’écriture pour la série The Bear. Distribué par MUBI, le film, présenté aux prestigieux festivals de Sundance et de Berlin, met en vedette Archie Madekwe (qui joue Matthew, un chanteur ultra célèbre) et Théodore Pellerin (qui joue Oliver, idole du chanteur qui cherchera à se lier d’amitié avec lui). Malgré un horaire chargé, ce dernier a pris le temps de nous parler.
Comment t’es-tu retrouvé à participer à ce projet ?
Théodore Pellerin : C’est en 2021 que j’ai auditionné pour la première fois et ça a pris trois ans avant que le film se monte et se fasse. Il y a eu plusieurs moments où on a cru que ça allait se faire et finalement non — comme c’est souvent le cas aux États-Unis avec des films indépendants. Je sais que mon audition a été la première audition qu’Alex a vue !
Qu’est-ce qui t’a attiré dans ce projet ?
Théodore Pellerin : Un scénario très bien écrit, drôle, anxiogène, stressant. J’avais vraiment l’impression qu’on me donnait accès à ce monde-là, démesuré et toxique, de la musique, de la célébrité et de sa déification, du succès, des États-Unis…

Sens-tu que la culture de la célébrité au Québec a des ressemblances avec celle des États-Unis ?
Théodore Pellerin : Non, pas du tout. Ça n’a rien à voir. C’est pas du tout la même culture. On n’y prête pas la même importance. Ici, c’est très familial, les « célébrités » c’est comme nos cousins. On peut leur dire bonjour dans la rue. Aux États-Unis, c’est beaucoup moins à échelle humaine. Je trouve ça mieux. Aux États-Unis, c’est maladif cette obsession…
As-tu pu ressentir cette culture américaine, toi qui montes en popularité ?
Théodore Pellerin : Je le vois à travers des gens que je connais, mais non, je ne pense pas que c’est mon profil d’acteur. Ce n’est pas ça mon affaire.
T’es-tu identifié à l’un des personnages principaux, soit la célébrité ou l’idole ?
Théodore Pellerin : Je ne me suis identifié ni à l’un ni à l’autre. Je les trouvais bien écrits, les deux, mais non, je ne me suis pas du tout identifié. Je pense que ce que je pouvais comprendre, c’était des fois d’être dans des relations où un jour tu es l’ami, l’autre jour tu ne l’es plus. Je me sentais un peu au primaire. C’est ça que je peux comprendre. Je peux comprendre aussi de mettre quelqu’un sur un piédestal et d’aspirer à se rapprocher de cette personne-là parce que tu l’admires.
Qu’est-ce qui t’a incité donc à jouer Matthew ?
Théodore Pellerin : Il est complètement fou. Il est vraiment dans l’extrême. Il est tellement désespéré. C’est toute sa vie qui est mise en jeu dans cette relation-là, et on lui donne accès à quelque chose qui est complètement inespéré, qui est d’avoir accès à ce qu’il doit considérer un peu comme un Dieu. Et il ne peut pas perdre cette occasion-là de faire quelque chose de sa vie, de vivre une vie qui vaut la peine d’être vécue. Je pense que c’est ça aussi la culture de la célébrité aux États-Unis : tout ce qui n’est pas ça est fade et n’a pas d’intérêt. Ce qui est équivalent de réussite et de succès, c’est finalement d’avoir une audience pour ta vie, ce qui est évidemment complètement fou comme idée. Donc, je peux comprendre cette peur-là de perdre quelque chose et ce désir-là de vivre une vie qui vaut la peine d’être vécue.

Tu joues parfois des personnages taquins, voire impétueux. C’est quelque chose qui t’attire ?
Théodore Pellerin : J’adore pouvoir être les pires versions de moi-même un petit peu. J’adore cette idée-là d’aller jouer quelque chose de vraiment, vraiment sombre ou même un peu dégoûtant, collant, violent, sadique… Je trouve ça l’fun à jouer. Après, ça ne crée pas le meilleur espace mental quand tu le vis, quand tu le joues, mais il y a quelque chose de quand même plaisant là-dedans, d’aller jouer dans ces eaux-là et d’exorciser certaines choses.
Tu parles d’« espace mental ». Y a-t-il des scènes de ce film qui ont été dures à tourner ?
Théodore Pellerin : Je n’ai pas de souvenirs de scène, mais je suis rentré chez moi et je n’étais pas très bien. Après le tournage, pendant un mois, je n’étais pas très bien. C’est juste tellement de rapports sociaux difficiles que c’était un peu étouffant d’être toujours là-dedans.
Comment t’es-tu préparé pour ton rôle ?
Théodore Pellerin : J’ai beaucoup regardé, j’ai été à LA, j’ai été à des partys de musique pour essayer de comprendre un peu ce monde-là. Alex m’envoyait beaucoup de vidéos de jeunes rappeurs ou de musiciens et de leurs amis et de backstage B-Roll. Je voyais c’était quoi qui était en jeu et j’ai vu un peu ces gens-là, que tous leurs amis c’est aussi les gens qui travaillent pour eux. Ils sont vraiment au sommet de leur propre petite pyramide. J’ai pu comprendre les dynamiques qui entourent ces machines-là.
J’imagine donc que tu as rencontré des personnes qui baignent dans ce milieu, qui vivent ces réalités ?
Théodore Pellerin : Oui, quand même. J’en ai rencontré quelques-uns et j’ai passé du temps avec eux. Et dans le film, y a quelques personnes qui sont dans ce monde-là, comme Zach Fox, qui fait de la musique. Ça aidait. Le plateau, au final, n’était pas très loin du film.
INFOS | Le film LURKER, avec Théodore Pellerin, sort en salles le 29 aout 2025.
Le film est distribué par MUBI.
Quel acteur inspirant et toujours touchant dans les rôles qu’il incarne.