Assurément moins connu que Madame Simone (Eugène Fortin), décédé une semaine plus tôt, Alain Ménard n’en demeure pas moins une figure marquante de plusieurs établissements du Village. Décédé des suites d’une bactérie staphylocoque au CHUM, tôt le matin du 20 septembre dernier, Alain Ménard a été tour à tour représentant publicitaire dans les premières années du Fugues, gérant de bars et organisateur de soirées, pour ne nommer que quelques-uns de ses nombreux rôles. Il avait, comme on dit, plusieurs cordes à son arc. Bon vivant, il ne détestait certainement pas partager un verre entre amis sur une terrasse du Village. Alain Ménard était âgé de 73 ans.
Une santé fragile et une fin inattendue
Staphylocoque, pneumonie, complications rénales : ce fut le lot d’Alain Ménard, hospitalisé au CHUM durant près d’un mois. « On ne pensait jamais que ces problèmes allaient entraîner son décès, mais c’est ce qui est arrivé », confie Marco, un ami proche qui est resté à ses côtés jusqu’à la fin. Son état s’est rapidement détérioré. Les complications successives ont finalement atteint ses reins, ce qui a été fatal à son organisme affaibli. Vers la fin, Alain devait même être assisté pour s’alimenter, incapable de le faire seul. « Il est parti bien vite, poursuit Marco. Il était tombé chez lui et n’arrivait pas à se relever. Je suis allé l’aider et j’ai appelé l’ambulance. Au CHUM, on a découvert qu’il souffrait d’une infection à staphylocoque qu’il fallait soigner d’urgence. » Marco, qui agissait comme proche aidant depuis trois ans, était très présent, tout comme Vital, un voisin et ami d’Alain, qui l’a également soutenu au quotidien.
Une belle carrière chez Fugues
Alain Ménard a été représentant publicitaire au Fugues pendant plusieurs années, dans les années 1980 et 1990. « C’était quelqu’un de très professionnel, toujours de bonne humeur. Il écrivait aussi une chronique dans le magazine. Il a toujours eu beaucoup de plaisir dans la vie. J’ai été vraiment attristé d’apprendre son décès », confie Martin Hamel, fondateur de Fugues. « Il avait réussi à se bâtir un excellent réseau de clients dans le Village », poursuit Martin Hamel. « C’était un vrai papillon social, avec une personnalité hors norme. Il voulait tellement être affable et amical avec tout le monde », renchérit Jean-Denis Lapointe, collaborateur de longue date au magazine. « C’est toujours triste d’apprendre ce genre de nouvelle », ajoute Réal Lefebvre, directeur des ventes actuel, qui a côtoyé Alain dès 1987. « Je garde de très bons souvenirs de lui. »
« Je l’ai toujours vu souriant et joyeux, raconte Claudine Metcalfe, qui fut chroniqueuse au Fugues avant de fonder la revue Gazelle (1993-1999), la “petite sœur” du Fugues. En réunion, il était sérieux, mais bienveillant. Quand j’ai commencé, j’étais nerveuse : c’était mes débuts, et celui qui m’a accueillie et encouragée, c’était Alain. C’est vraiment triste qu’il soit parti. » C’est d’ailleurs Alain Ménard qui aurait inspiré le nom Gazelle. « Il me disait que j’étais comme une petite gazelle dans la faune du monde gai », se souvient Claudine en riant. « C’était affectueux, et ça m’a beaucoup aidée à prendre ma place. » Ce surnom est d’ailleurs devenu le titre de la chronique Gaz-elles, que Claudine a signée pendant plus de quinze ans dans Fugues. « C’est bien Alain qui avait lancé cette idée », confirme Yves Lafontaine, éditeur et directeur actuel du magazine.
Des années de gérance et d’événements dans le Village
« Il travaillait encore chez Fugues lorsqu’on lui a offert un poste au Campus, se souvient Martin Hamel. Je lui ai dit qu’il ne pouvait pas garder les deux emplois, ça risquait de créer des frictions avec d’autres établissements. Il a donc quitté Fugues pour se consacrer au Campus, où il est resté plusieurs années. » « Je me souviens qu’il était tellement maternel avec les danseurs du Campus, poursuit Jean-Denis Lapointe. Il les chouchoutait, les protégeait. Il voulait se faire aimer de tout le monde. »
« Si je ne me trompe pas, il avait travaillé pour le magazine Sortie avant Fugues, et après son départ, il a œuvré dans plusieurs clubs du quartier », ajoute Yves Lafontaine. En effet, Alain Ménard a été organisateur d’événements, responsable de la publicité et de la promotion pour divers établissements du Village. « Après le Campus, il est devenu gérant du club Le Caché, situé dans la Station C. C’est lui qui l’avait ouvert et il y est resté plusieurs années », précise Marco.
Un lien entre les communautés
« Alain Ménard était à 100 % gai, il aimait les danseurs, mais il était aussi très ouvert envers les lesbiennes, explique Claudine Metcalfe. Sans le savoir, il servait de pont entre les bars gais et leurs tenanciers et la communauté lesbienne. Il ne se voyait pas comme un intellectuel ni comme un militant, mais il a contribué à sa manière à rapprocher nos milieux. »
Un homme du monde, jusqu’au bout
Alain Ménard avait pris sa retraite il y a plusieurs années. « L’été, on le voyait souvent les après-midis sur la terrasse du défunt bar La Relaxe, en compagnie d’amis. C’était vraiment un bon vivant », se souvient Jean-Denis Lapointe. « Il prévoyait faire une croisière cet automne. Il en parlait souvent, il avait vraiment hâte. Mais ça ne se fera plus. Il fait maintenant un autre genre de croisière… », glisse, ému, Marco.
Hommages et souvenirs
Alain Ménard laisse dans le deuil ses deux sœurs, Suzanne et Suzelle, ainsi que leurs familles, de même que ses amis Marco et Vital, qui lui ont été d’un soutien indéfectible. Toute la grande famille de Fugues — ses équipes actuelles et passées — tient à offrir ses plus sincères condoléances à ses proches et à ses amis.
