Dimanche, 16 novembre 2025
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    Une légende de la nuit montréalaise s’éteint : hommage à Madame Simone alias Eugène Fortin

    La communauté montréalaise vient de perdre l’une de ses figures les plus marquantes. Eugène Fortin, mieux connu sous le nom flamboyant de Madame Simone, s’est éteint, laissant derrière lui une empreinte indélébile dans la vie nocturne, l’art du drag et le cœur de toutes celles et ceux qui l’ont croisé.

    Une icône inoubliable du Village
    Depuis les années 1980, Madame Simone évoluait dans le nightlife montréalais queer avec ses costumes spectaculaires, ses chapeaux surréalistes et son humour mordant.

    « Door Diva » du cabaret Mado durant des décennies, elle accueillait le public avec un cri unique — ce fameux « chèèèère » ou « ouah ouah » — qui a résonné au Poole, au Lézard, au Sky, en passant par le Kox et le Mado.

    Toujours excentrique, jamais banale, elle pouvait apparaître déguisée en banane, en table de cuisine, ou même avec New York en casse-tête 3D sur la tête. Elle incarnait l’originalité et l’absurde, une « flyée » parmi les flyées, comme l’a si souvent décrit Mado elle-même.

    Mado est d’ailleurs une première a lui avoir rendu hommage, mardi soir sur les réseaux sociaux. : «La queen de la Main, Madame Simone, nous a quittés. Je suis sans voix. Le personnage le plus excentrique de nos nuits montréalaises , la reine de la créativité et de l’extravagance est allée divertir les anges et les p’tits démons à coups de clins d’œil et de sourires ravageurs. Que ce soit déguisée en banane ou avec une télé qui lui passe en travers du corps, ou encore avec une table de cuisine bien garnie autour de la taille ou avec la ville de New York en casse-tête 3D sur la tête, Madame Simone, c’était sans contester, l’originalité incarnée, la reine de l’absurde, la flyée d’entre toutes les flyées, le plus beau personnage de notre époque. Simone du haut de ton nuage j’entends ton cri, ce ”ouah ouah” qui a retenti du Lézard au Sky, du Kox au Cabaret Mado et je sais que le paradis est entre bonnes mains. Bon repos ma douce amie, fabuleuse créature de nos nuits. Bon voyage chèèère.»

    Une artiste aux multiples talents
    Derrière les plumes, les paillettes et l’extravagance, se cachait un véritable créateur touche-à-tout. Eugène pouvait, selon ses proches, transformer du carton ou du papier d’aluminium en robe de bal, restaurer des vitraux anciens, ou encore concocter des plats raffinés. Ses costumes faits main, ses chapeaux hallucinants et son imagination sans limites ont nourri la scène drag montréalaise et inspiré toute une génération. Il faisait aussi des décors à partir de rien. Il avait aidé l’équipe de Fugues a deux reprises dans la confection de notre char allégorique au début des années 2000 (pour le défilé de Divers/Cité).

    C’est aussi Madame Simone qui donna son nom à Rita Baga, marquant ainsi une filiation directe entre les pionnières du drag montréalais et la nouvelle garde.

    Une présence qui marquait les esprits
    « Une artiste absolument incroyable », « une âme incomparable », « une légende » : les témoignages affluent pour souligner son importance. Guillaume Dupuis se souvient de ses histoires captivantes, racontées avec une mémoire du détail phénoménale. Caroline Rousse évoque l’âme de la faune du Village et cette manière unique qu’avait Simone de traiter tout le monde avec respect et bonne humeur.

    Le militant et publiciste Puelo Deir, profondément touché par son départ, se rappelle comment sa ténacité d’Eugène, lui a un jour sauvé la vie : « Tu étais implacable quand tu voulais quelque chose. Merci pour tout l’amour, le désir, les fous rires, les joints, ton incroyable talent et ta sagesse infinie. »

    Une mentore et une pionnière
    Au-delà de l’excentricité, Madame Simone a marqué les cœurs par sa bienveillance. Jenni Lang souligne sur les réseaux sociaux combien elle a été une mentore et une pionnière qui savait reconnaître la lumière des autres et les pousser à croire en leur talent. Le DJ Stefane Lippé parle d’une « ICONE » partie trop tôt, mais dont l’amour et la joie de vivre continuent de rayonner.

    Un héritage vivant
    Aujourd’hui, la tristesse est immense. De Michel Dorion à Barbada, de Patrick Delisle-Crevier à Lady Bunny de New York (qui était devenue une amie à l’époque de Wigstock), les hommages convergent pour saluer celle qui a illuminé Montréal et bien au-delà. Sa voix, ses couleurs, son audace et son génie restent gravés dans les mémoires.

    Madame Simone était bien plus qu’une drag queen. Elle était une légende vivante, un oiseau rare des nuits de Montréal, une Reine mère qui a pavé la voie à tant d’autres. Son rideau se ferme aujourd’hui, mais son héritage — fait de couleurs, de folie et d’inspiration — continuera de briller dans la communauté LGBTQ+ pour toujours.

    Bon repos, chère Simone. Tu restes éternelle.

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