Il est des dramaturges dont l’exigence ne se dément pas au fil de leur création. C’est le cas d’Evelyne de la Chenelière dont la pièce À cause du soleil sera créée en septembre au Théâtre Denise-Pelletier dans une mise en scène de Florent Siaud.
On pourrait résumer la trame narrative entre deux faits divers qui ont eu lieu à plus de quatre-vingts ans d’écart et sur deux continents différents. L’un fait explicitement référence au personnage de Camus dans L’Étranger, plus précisément à la scène où il tue un Arabe sur une plage d’Algérie, alors que l’autre renvoie à un homme qui n’a pas entendu, en rentrant chez lui, les appels de détresse d’une femme en pleine tempête de neige Des faits divers totalement différents, au sujet desquels Evelyne de la Chenelière nous invite à retrouver des traces laissées aussi bien sur le sable que sur la neige et qui pourraient nous guider comme nous perdre.
Pour celles et ceux qui connaissent l’œuvre d’Evelyne de la Chenelière, ils et elles y retrouveront les préoccupations de la dramaturge faisant écho à celles de l’écrivain Albert Camus à propos de l’absurdité de notre monde dans lequel, pour paraphraser l’écrivain, il s’agit de vivre. « J’ai toujours été mue par cette inquiétude fondamentale autour de toutes les questions de notre vie », avance Evelyne de la Chenelière en entrevue. « Mais plutôt que de les aborder de front, je préfère les approcher par les sensations, les tremblements qu’elles font naitre, les lieux […], les paysages [et] le climat dans lesquels on les ressent et qui deviennent des personnages en soi, d’où le titre À cause du soleil. »
Aucune gêne alors pour l’autrice de s’approprier le personnage de Camus, cet Étranger, puisque nous sommes toustes construit.e.s par nos lectures qui se retrouvent, consciemment ou ouvertement suggérées ou non dès que l’on écrit soi-même. « C’est comme si je conversais avec des œuvres qui m’ont marquée et […] apporter des contrepoints, et souligner en même temps cette grande histoire de la littérature et des textes théâtraux à laquelle on participe bien humblement. »
Alors s’engage un dialogue sous forme de jeu de miroir entre deux époques : les années quarante en pleine Seconde Guerre mondiale en Algérie et l’hiver québécois d’aujourd’hui. Le soleil de l’Afrique du Nord répondant à nos longues nuits d’hiver, et dans ce va-et-vient des sensations et des émotions et parfois de leur absence, toute la tragédie humaine s’y déroule et nous demande si nous savons écouter et ressentir, nous demande de nous situer.
L’écriture d’Evelyne, sans en avoir l’air, n’a rien de démonstratif, didactique, revendicatif, que sais-je encore, elle joue sur la simplicité. Mais elle produit à la longue une sonate qui ne cesse de nous hanter, car elle nous ramène chaque fois à l’essentiel, elle nous rappelle de constamment nous interroger.
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COUPS D’ŒIL SUR L’AUTOMNE DU THÉÂTRE DENISE-PELLETIER
Relectures audacieuses d’œuvres de répertoire, spectacles hybrides et retour attendu!
On a marché sur la Lune En pleine jeunesse, lorsque les doutes existentiels s’additionnent, le regard se pose sur ce qui nous échappe et dont on voudrait bien conquérir le sens. Docu et fiction, le spectacle SI JAMAIS VOUS NOUS ÉCOUTEZ de Laurence Dauphinais et Maxime Carbonneau nous propulse dans un autre temps sur la sonde Voyager, qui lançait dans l’espace en 1977 le Golden Record dans l’espoir d’entrer en dialogue avec d’autres formes de vies intelligentes. La très vigilante compagnie La Messe Basse tente de voir si l’humanité se reconnaît encore dans ce disque rempli d’infos qui flotte dans l’infini depuis 45 ans. Extraterrestre et énigmatique.
À la Salle Fred-Barry cet automne, l’onirisme et le fantastique teintent les écritures et les formes scéniques. Le Théâtre du Double signe de Sherbrooke ouvre la saison avec une création aussi éclatée qu’audacieuse, UNE FILLE EN OR, spectacle baroque de Sébastien David où quatre femmes incarnées par l’incroyable souffle d’Amélie Dallaire vivent d’étonnantes métamorphoses.
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Retour attendu qu’est celui de FOREMAN en novembre, pour huit représentations seulement, le spectacle corrosif de Charles Fournier, revient ouvrir son cœur d’homme. La compagnie Mon Père Est Mort déboulonne avec bienveillance, mais sans rien censurer, les jeux de construction du masculin.
Et le Théâtre du Portage ranime le jeu masqué au cœur d’une tragi-comédie futuriste dans un monde sans pétrole avec PLASTIQUE.
INFOS | À cause du soleil. Du 21 septembre au 15 octobre 2022. Texte d’Evelyne de la Chenelière, mise en scène de Florent Siaud, avec Mustapha Aramis, Sabri Attalah, Maxim Gaudette, Daniel Parent, Evelyne Rompré Et Mounia Zahzam. | www.denise-pelletier.qc.ca