Mercredi, 10 septembre 2025
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    La Distance de Tiago Rodrigues

    Les distances ne sont pas que des éloignements physiques, elles peuvent se créer entre les générations. Tiago Rodrigues joue sur les deux tableaux, avec ce dialogue difficile entre un père et sa fille. Au-delà de ce dialogue émouvant, se dessine une métaphore du monde dans lequel nous vivons. Que laissons-nous aux générations futures? Celles-ci se reconnaissent-elles dans cet héritage ?

    NDLR : Cet été, notre journaliste Denis-Daniel Boullé était au Festival d’Avignon 2025. Voici l’un des textes sur l’une des œuvres inspirantes qui l’ont marqué… lors de son voyage.

    Les pièces de Tiago Rodrigues ont souvent été jouées au Québec dans le cadre du FTA entre autres, comme Antoine et Cléopatre (2017) ou plus récemment Catarina ou la beauté de tuer des fascistes (2024).

    Avec la Distance, l’auteur renoue avec l’intimité mais pour mieux saisir chaque spectateur et chaque spectatrice. Et surtout pour nous conduire délicatement à nous interroger. Autour d’un plateau giratoire sur lequel s’élève un arbre mort et un énorme bloc de pierre, un père (remarquable Adama Diop) tente grâce à la technologie d’entrer en communication avec sa fille (touchante Alison Deschamps) installée sur une planète en train d’être colonisée. 18 mois de voyage les séparent. Nous sommes en 2077. Le père découvre que sa fille n’est pas partie explorer de nouveaux territoires. Elle a quitté définitivement la Terre avec d’autres pour fonder une nouvelle civilisation. Le père doit alors faire son deuil de la relation et tenter de comprendre l’inexplicable pour lui.

    Mais à travers ce récit intime, Tiago Rodrigues expose les défis auxquels nous sommes confrontés et qui nous amènent à cette question. L’humanité est-elle sur le point de disparaître. Réchauffement climatique, guerres, l’intelligence artificielle. Comment survivre alors. Et c’est ce que reproche la fille à son père. Choisir de recommencer à zéro plutôt que de vivre dans les restes de ce monde dans lesquels elle ne se reconnaît plus.

    Apparaît aussi une réflexion philosophique en filigrane. La liberté individuelle tant revendiquée par nos contemporains ne participe-t-elle pas à cette disparition avancée. Son désir devant toujours prévaloir sur le bien commun. De sorte, que les dictatures ou encore les religions seraient peut-être un remède pour éviter la déliquescence du groupe. Comme l’évoque la fille dans son nouvel environnement, elle mettra bientôt au monde un enfant conçu non pas par désir ou avec l’amour d’un conjoint mais bien pour former une nouvelle race dans laquelle la famille n’existera plus.

    Comme toujours avec Tiago Rodrigues, beaucoup de questions bien plus existentielles sur notre avenir mais, et c’est la force du créateur et metteur en scène, portées à travers une simple petite histoire bouleversante mais qui va bien au-delà de la séparation et du deuil que doivent vivre ce père et cette fille.

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