Dans une ville à la dérive, un jeune homme gai endosse tour à tour les identités de ses anciens amants : acteur, professeur, livreur, architecte… À chaque nouvelle rencontre, il se présente sous un autre visage, rejouant les récits qu’on lui a confiés comme s’ils étaient les siens. C’est seulement en se faisant passer pour quelqu’un d’autre qu’il a l’impression d’être vraiment lui-même. De rendez-vous en rendez-vous, entre tendresse, malaise et violence, il s’enfonce peu à peu dans un brouillard où se confondent vérité, désir et illusion.
Tel est le point de départ de Queerpanorama (眾生相), troisième long métrage du réalisateur hongkongais Jun Li. Après Tracey (2018) et Drifting (2021), ilsigne ici une œuvre autofinancée et viscéralement personnelle, inspirée de ses dix années de rencontres sur des applications.
Entre fiction et confession
Tourné en noir et blanc, avec des plans fixes et une nudité frontale, Queerpanorama brouille les frontières entre documentaire intime et fable existentielle. Le film, majoritairement en anglais, explore le vide d’une génération connectée mais isolée, où la recherche d’authenticité passe par la performance. Le protagoniste, interprété par Jayden Cheung avec une intensité brute, erre d’un appartement à l’autre, observant les espaces, les corps et les failles des hommes qu’il croise.
Jun Li, né en 1991, a étudié le journalisme à l’Université chinoise de Hong Kong avant d’obtenir une maîtrise en études de genre à Cambridge. Fidèle à sa démarche, il continue de donner voix aux marginalités — qu’elles soient sexuelles, sociales ou psychologiques. Dans Queerpanorama, il pousse plus loin encore son exploration de la solitude queer, livrant un film sensuel, dérangeant et d’une grande lucidité sur la difficulté d’être soi dans une culture obsédée par l’apparence.
Sous son esthétique épurée, Queerpanorama est une méditation troublante sur le mensonge et la révélation, sur les identités qu’on endosse pour survivre. Dans cette Hong Kong filmée comme un labyrinthe de désirs et de miroirs, Jun Li interroge la mise en scène de soi — à l’écran comme dans la vie. Car au fond, demande le film, qui sommes-nous quand plus personne ne nous regarde ?
INFOS : Ce film sera présenté dans la cadre du festival image+nation, qui se tiendra du 20 au 30 novembre 2025. Pour vous procurer des billets https://image-nation.org

