Des milliers de personnes ont défilé samedi 4 octobre dans les rues de Pécs, grande ville universitaire du sud de la Hongrie, pour défendre les droits des personnes LGBTQIA+ et dénoncer les restrictions croissantes des libertés fondamentales, en dépit de l’interdiction officielle de la marche par les autorités.
Selon un comptage de l’AFP, entre 7 000 et 8 000 manifestants ont pris part au cortège, parti vers 14 heures du centre-ville sous un ciel dégagé. Musique, banderoles colorées et drapeaux arc-en-ciel accompagnaient la marche, ponctuée de slogans dénonçant la dérive autoritaire du gouvernement de Viktor Orban. Certains pancartes proclamaient : « La Hongrie est une dictature » ou encore « Le gouvernement punit la Pride mais pardonne aux pédophiles ».
Une interdiction contestée
La « Pécs Pride », seule marche des fiertés organisée en dehors de Budapest, avait été interdite le 6 septembre par la police, une décision confirmée le 15 septembre par la Cour suprême hongroise. La mairie avait averti les participants qu’ils s’exposeraient à des amendes, voire à des poursuites pour infraction administrative.
Pour contourner cette interdiction, les organisateurs avaient déclaré l’événement comme un rassemblement pour la protection de la faune sauvage, reprenant néanmoins le parcours initialement prévu pour la Pride. « Nous venons pour défendre nos libertés fondamentales », expliquait sur place Edit Sinko, enseignante et psychologue de 58 ans. « Je ne fais pas partie de la communauté LGBTQIA+, mais mes élèves et mes amis en font partie, et je ne comprends pas pourquoi on devrait les interdire. »
Le défilé s’est déroulé dans le calme, sous la surveillance discrète des forces de l’ordre. Plusieurs élus européens et militants des droits humains ont exprimé leur soutien aux organisateurs.
Un climat politique de plus en plus répressif
Depuis plusieurs années, le gouvernement du Premier ministre Viktor Orban multiplie les initiatives législatives restreignant les droits des minorités sexuelles et de genre. En mars 2025, une réforme du droit de réunion a permis aux autorités d’interdire tout rassemblement « promouvant ou affichant l’homosexualité », au nom de la « protection de l’enfance ».
Cette politique s’inscrit dans la continuité de la loi de 2021 interdisant la « promotion de l’homosexualité » auprès des mineurs, déjà dénoncée par la Commission européenne et par de nombreuses ONG comme contraire au droit européen. Le Parlement européen a par ailleurs ouvert une procédure d’infraction contre la Hongrie, sans effet concret jusqu’à présent.
Pour Amnesty International, cette nouvelle interdiction illustre « l’érosion systématique de l’État de droit » dans le pays. L’ONG appelle l’Union européenne à agir face à ce qu’elle décrit comme « une répression ciblée des libertés publiques ».
La société civile en résistance
Malgré le risque d’amendes pouvant atteindre 200 000 forints (environ 500 euros), la mobilisation à Pécs témoigne d’un refus croissant de la censure gouvernementale. « Cette manifestation ne concerne9plus seulement les personnes LGBTQIA+, mais l’ensemble de nos droits humains », résume Bence Tóth, étudiant de 18 ans originaire de la ville.
L’événement fait écho à la Pride de Budapest, qui avait déjà rassemblé plus de 200 000 personnes en juin dernier, malgré des menaces d’interdiction. Pour de nombreux militants, la marche de Pécs marque un tournant symbolique : celui d’une société civile qui continue de se mobiliser, même face à un pouvoir qui tente de museler la diversité.