La Commission européenne a présenté la semaine dernière sa nouvelle Stratégie pour l’égalité LGBTIQ+ 2026-2030, destinée à renforcer la protection, la participation et la reconnaissance des personnes lesbiennes, gais, bisexuelles, trans, intersexes et queer dans l’ensemble de l’Union. Ce texte prolonge les engagements pris depuis 2020, mais plusieurs organisations de défense des droits, y voient des ambitions trop prudentes face aux reculs observés dans plusieurs États membres.
Trois axes principaux
La Stratégie pour l’égalité LGBTIQ+ 2026-2030 s’articule autour de trois axes principaux. Elle vise d’abord à protéger les personnes LGBTIQ+ contre les violences et le harcèlement, y compris en ligne, et à améliorer l’application des lois antidiscrimination dans tous les aspects de la vie quotidienne, de l’éducation à l’emploi. Elle prévoit également d’examiner les pratiques dites de « conversion », afin d’identifier des outils légaux permettant leur encadrement ou leur interdiction. Elle cherche ensuite à autonomiser les personnes concernées, en soutenant les organismes nationaux chargés de faire appliquer les droits et en promouvant la reconnaissance des familles « arc-en-ciel », afin que la filiation d’un enfant soit protégée d’un État membre à l’autre. Enfin, la stratégie ambitionne de mobiliser la société civile et les États membres, en encourageant l’adoption de plans nationaux d’égalité LGBTIQ+, la collecte de données sur les discriminations et la création d’un forum européen réunissant Commission, gouvernements et associations pour suivre la mise en œuvre et partager les bonnes pratiques.
Un contexte social contrasté
Cette initiative intervient dans un contexte contrasté. Si l’acceptation des personnes LGBTIQ+ progresse dans plusieurs pays, les violences et discriminations restent fréquentes et près de la moitié des personnes interrogées rapportent avoir été victimes de propos ou comportements hostiles. Dans certains États, comme la Hongrie ou la Pologne, les droits LGBTIQ+ sont restreints, les parades des fiertés entravées et les législations nationales insuffisantes pour assurer une protection effective.
Réactions des associations
Les réactions des associations spécialisées sont partagées. Elles saluent la continuité de l’engagement européen, mais jugent la stratégie trop prudente face à l’urgence. Selon ILGA-Europe, de nombreuses mesures restent au stade de l’« analyse »ou de la « considération » et ne sont pas juridiquement contraignantes. Concrètement, l’interdiction des thérapies de conversion ou la reconnaissance automatique des familles arc-en-ciel entre États membres restent facultatives, ce qui risque de créer des inégalités selon les pays. Pour Forbidden Colours, la réponse européenne est trop faible et trop tardive face à une « attaque coordonnée contre les droits LGBTIQ+ ». Du côté des personnes intersexes, OII Europe regrette leur marginalisation, malgré la recommandation historique du Conseil de l’Europe, adoptée le 7 octobre 2025, qui appelle à interdire les interventions médicales non consenties sur les enfants intersexes et à renforcer la formation des professionnel·les.
Le rôle des associations
Pour STOP homophobie, cette stratégie constitue un cadre politique utile, mais «elle ne peut être efficace que si elle est traduite en actions concrètes et contraignantes». L’association souligne le rôle central des organisations de la société civile, qui accompagnent les victimes, sensibilisent le public, forment les professionnel·les et documentent les violences, fournissant des données essentielles pour orienter les politiques publiques. STOP homophobie insiste également « qu’il est nécessaire de renforcer le financement des associations, de mettre en place un suivi strict et de prévoir des mécanismes de sanction clairs pour les États qui ne respecteraient pas leurs obligations.»
La stratégie 2026-2030 affirme la volonté européenne de protéger et promouvoir les droits LGBTIQ+, mais sa réussite dépendra de sa mise en œuvre concrète sur le terrain, de la vigilance citoyenne et de l’engagement des États membres. Selon STOP homophobie, «seule une action déterminée, avec des mesures contraignantes et un soutien solide aux associations, pourra transformer ces principes en droits réels pour toutes et tous.»