Mardi, 11 février 2025
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    Et si c’était nous qui étions en train de laisser tomber Fierté Montréal ?

    Il n’est plus vrai qu’un défilé soit la seule façon pour nos communautés d’exprimer nos revendications… Je ne sais pas pour vous, mais moi, j’ai eu beaucoup de plaisir au festival Fierté Montréal cette année. J’ai pu projeter deux films grâce à son programme de subvention. J’ai vu des représentants de Fierté Montréal venir se présenter à chaque événement organisé par nos communautés.


    J’ai assisté, avec 30 000 personnes, à des spectacles gratuits du global phenomenon que sont les vedettes de RuPaul’s Drag Race. J’ai vu le Festival rendre hommage à des icônes montréalaises qui ont façonné notre night life et décerner des prix à des militants du présent. J’ai vu nos histoires racontées en exposition, en danse, dans des conférences. J’ai rencontré des centaines d’organismes et de bénévoles lors des journées communautaires. J’ai participé à la marche trans. J’ai vu comment Fierté Montréal porte les revendications actuelles de nos mouvements, montrant bien, comme tous ces gens qui nous rappellent l’importance du défilé pour notre ville, que les luttes LGBTQ2S sont encore nécessaires et multiples.

    On nous fait souvent croire que le défilé est le cœur de la Fierté, parce qu’il commémore les émeutes de Stonewall. On oublie peut-être l’autre origine de la Fierté montréalaise sous sa forme actuelle, quand, en 1990, les gens ont marché vers le parc La Fontaine pour y tenir des concerts contre la brutalité policière dont nos communautés avaient été victimes après les arrestations du Sex Garage.

    C’est en commémoration de cela qu’était né Divers/Cité en 1993. J’étais là, en 2007, quand Divers/Cité a voulu séparer les concerts et le défilé, parce que ses études touristiques montraient que les gens qui assistent aux spectacles ne sont pas les mêmes qui viennent au défilé. Après plusieurs essais (marche de nuit, changement de parcours), l’organisme pensait déjà qu’il était temps, à l’époque, de célébrer sous différentes formes.

    Si on regarde le programme de Fierté Montréal aujourd’hui, on voit bien qu’il était impossible pour une seule personne de tout faire, d’être partout, tant la programmation était riche et diversifiée, à l’image de nos communautés. C’est vrai que j’ai vécu, comme tout le monde, l’annulation du défilé avec beaucoup d’émotions, moi qui y marche depuis près de 20 ans avec divers contingents. Je suis un ardent défenseur de son importance pour les jeunes, les minorités kinks, les familles, les organisations communautaires. En toute honnêteté, je fais peut-être partie des rares queers qui préfèrent danser dans les rues dans un défilé plutôt que de marcher en scandant des slogans lors d’une manifestation.

    Tout ça pour dire que, quelles que soient son envergure et son aura, il n’est plus vrai qu’un défilé, ou une marche, soit la seule façon pour nos communautés d’exprimer nos revendications et d’être politiques.

    Ce n’est pas ce seul événement qui attire les foules (et les touristes) à Montréal et qui nous permet de nous regrouper, de nous faire entendre. Toute la semaine, j’ai vu des artistes et des militants prôner l’amour de soi, parler de leurs parcours difficiles et offrir catharsis et messages d’espoir sur différentes plateformes. Le moment le plus émouvant pour moi fut d’entendre Sandy Duperval le dimanche soir lors de la clôture.

    Au public qui avait marché en colère toute la journée et qui s’était quand même rendu à l’Esplanade du Parc olympique, elle a présenté ses excuses pour Fierté Montréal et a mentionné qu’une leçon avait été apprise ce jour-là : la Fierté, ce n’est pas tous ces événements, la Fierté, c’est nous, c’est 365 jours par année. Puis, on a tenu la traditionnelle minute de silence, toustes ensemble, avant de crier notre joie.

    Alors que plusieurs reprochent à Fierté Montréal de nous avoir laissé.e.s tomber et soutiennent que de nombreux discours conservateurs utilisent cette histoire pour s’attaquer à la crédibilité de nos revendications et de nos organisations, moi, je me demande ceci : et si c’était nous qui étions en train de laisser tomber Fierté Montréal et son message politique ? Je vous invite donc toustes à partager vos plus beaux moments de cette semaine de la Fierté, pour que nous nous rappelions aussi sa beauté !

    #MerciFierteMontréal

    par Bruno Laprade, militant queer et ex-membre du conseil d’administration de Fierté Montréal, de 2007 à 2009.

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