Jeudi, 1 juin 2023
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    Des images de nous-mêmes au grand écran

    Ce mois-ci, à la demande d’une lectrice qui désirait « quelques suggestions de films lesbiens réalisés par des femmes », je vous en propose quelques-uns à ne pas manquer ! Mes critères de sélection dans cette liste très subjective ? Vous proposer de la diversité de choix et de genres cinématographiques, d’époques et de lieux et, bien sûr, vous faire rire et pleurer pendant les vacances de Noël. Action !

    Je pourrais vous parler de classiques, à commencer par Mädchen in Uniform (1931), premier film à « saveur » lesbienne réalisé par Leontine Sagan et inspiré de la pièce de la dramaturge lesbienne Christa Winsloe ou encore The Children’s Hour (1961, William Wyler), car bien que réalisé par un homme, il fut également adapté de la pièce de théâtre écrite par Lillian Hellman.

    Cela dit, puisque le temps des fêtes est à nos portes et que Netflix regorge de films hétéros qui nous présentent les bonnes vieilles traditions (conservatrices) de Noël, pourquoi ne pas débuter avec un « film lesbien » de Noël ?

    Réalisé par la cinéaste lesbienne Clea DuVall, Happiest Season (2020) s’intéresse à un couple de femmes qui partagent leur vie depuis longtemps et s’apprêtent à se fiancer. Si Abby a l’intention de profiter des fêtes de Noël dans la famille aisée et conservatrice d’Harper pour demander sa compagne en mariage, elle se rendra vite compte que cette dernière n’a pas fait son coming out !

    Il faut savoir que Clea DuVall a récemment réalisé la série High School, basée sur le livre autobiographique éponyme de Tegan et Sara, soit les deux musiciennes jumelles canadiennes et lesbiennes.

    Également actrice, Clea DuVall s’illustre dans le très drôle But I’m a Cheerleader (1999, Jamie Babbit), où une adolescente naïve, soupçonnée par ses parents et amis d’être lesbienne, est envoyée dans un camp de « thérapie », faisant ainsi allusion aux centres de conversion qui existent dans certains États des États-Unis. Si Megan est alors entourée d’homosexuel.le.s  refoulé.e.s ou repenti.e.s, ceci la mènera ironiquement à la découverte de son homosexualité. Si nous sommes ici dans la veine de la comédie, The Miseducation of Cameron Post (2018, Desiree Akhavan) est quant à lui un drame basé sur le livre d’Emily M. Danforth, où en 1993 une adolescente est emmenée de force dans un centre de thérapie de conversion pour homosexuel.le.s par ses tuteurs conservateurs.

    Pour un autre film lesbien basé sur un livre de renom, je vous suggère le film Carol (2015, bien que réalisé par Todd Haynes, un homme gai), adapté d’un livre de la romancière lesbienne Patricia Highsmith. D’ailleurs, pour découvrir l’univers de cette dernière, vous pouvez aller voir le documentaire biographique Loving Highsmith (2022) de Eva Vitija, qui était d’ailleurs de la sélection de la 35e édition d’Image+Nation.

    D’ailleurs, des festivals de cinéma LGBTQ+ comme celui-ci nous permettent de découvrir des films internationaux. À commencer par Circumstance (2011, Maryam Keshavarz), où une riche famille iranienne lutte pour contenir la rébellion sexuelle croissante d’une adolescente et la dangereuse obsession de son frère qui travaille pour la police des mœurs.

    Du côté de nos cousins français, on ne peut passer sous silence Catherine Corsini, qui nous a offert La belle saison (2015), ou encore plus récemment le très intéressant La fracture (2021).

    Bien sûr, pour les amatrices de films d’époque, Portrait de la jeune fille en feu (2019) s’impose tel un incontournable, sans oublier le premier long métrage de Céline Sciamma : Naissance des pieuvres (2007).

    Du côté du cinéma indépendant américain, mentionnons Go Fish (1994, par Rose Troche, une des créatrices de The L Word), Watermelon Woman (1996, Cheryl Dunye) et Gia (1998, de Michael Cristofer).

    Ce dernier, bien que réalisé par un homme, met en vedette Angelina Jolie dans le rôle de la top-modèle bisexuelle Gia Carangi.

    Autre suggestion : le film américain Pariah (2011, de Dee Rees), un coming of age qui met en scène une jeune afro-américaine de 17 ans vivant avec ses parents à Brooklyn, qui acceptent mal son homosexualité.

    Qu’en est-il du Québec ? Je vous propose ici non pas un film, mais bien l’œuvre entière d’une réalisatrice qui possède une filmographie impressionnante : Léa Pool. Vous la connaissiez probablement grâce à La passion d’Augustine, qui revient sur une époque marquante de la Révolution tranquille, et qui en fera la première femme cinéaste à remporter le prix du meilleur film et de la meilleure réalisation au Gala Québec Cinéma.

    Je sais, nous étions en 2016!… Certes, Léa Pool n’a pas attendu les prix de Québec Cinéma pour réaliser de grandes œuvres qui en feront une pionnière quant à la représentation lesbienne dans le cinéma québécois. On pense notamment à La femme de l’hôtel, qui fait dans les silences et les non-dits, et à Anne Trister, un classique du cinéma lesbien québécois, puisqu’il sera parmi les premiers à imprimer sur pellicule des images de l’amour entre femmes. L’univers lesbien deviendra de plus en plus éloquent dans les films subséquents de Pool, que ce soit dans le superbe Emporte-moi, en 1999, avec une jeune Karine Vanasse qui crève l’écran dans le rôle d’Hanna, 13 ans, en plein coming of age en 1963, alors qu’elle s’éveille au monde et qu’elle traverse une période de découverte identitaire et sexuelle. Quelques années plus tard, en 2001, ces thèmes se transposent dans le contexte contemporain d’un pensionnant pour jeunes filles avec Lost and Delirious, qui met en vedette une distribution du tonnerre, avec l’actrice canadienne Jessica Paré et les actrices américaines Misha Barton et Piper Perabo.

    Selon moi, parmi celles qui pourraient se retrouver dans les émules de Pool, mentionnons Chloé Robichaud avec son très beau film Sarah préfère la course, réalisé en 2013.

    Je ne pouvais proposer cette (trop courte) liste sans terminer sur une série télévisée que j’ai beaucoup appréciée : A league of Their Own. Adaptation du film éponyme de 1992, cette série s’intéresse à des joueuses professionnelles de la Ligue américaine de baseball féminin, dans une Amérique en pleine mutation. Si les droits civiques afro-américains et le féminisme sont dans l’air du temps et que ces femmes tentent de s’affirmer malgré le conservatisme des années 40, c’est particulièrement la relation lesbienne qui retire l’attention de la trame narrative. Tout en subtilité et en histoire, cette série, comme autant de films lesbiens, souligne l’importance d’avoir des images de nous-mêmes pour savoir d’où l’on vient et, ultimement, savoir où l’on va…

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