Samedi, 20 septembre 2025
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    Premier long métrage pour JP Bergeron «Old Guys in Bed» ou pas de honte à être vieux

    Si l’on connaît Jean-Pierre Bergeron pour ses rôles au cinéma et à la télévision depuis des décennies, ce n’est que depuis peu que l’on peut apprécier son travail de réalisateur. Plus de dix ans après avoir réalisé Alone with Mr.

    Carter, un court métrage mettant en vedette entre autres Robert Naylor, celui que l’on a connu (parfois comme un dur) dans des œuvres comme Les filles de Caleb,  Les doigts croches, L’eau chaude, l’eau frette, Faits divers ou Le purgatoire des intimes, signe son premier long métrage, Old Guys in Bed : un film qui explore les relations entre personnes homosexuelles âgées à l’ère numérique actuelle. L’œuvre, qui sera distribuée prochainement au Québec et au Canada, sera
    présentée début août au festival Fantasia. De quoi réjouir son réalisateur, à qui nous avons pu parler.

    Quelle est la genèse de ton premier long métrage, Old Guys in Bed ?
    Jean-Pierre Bergeron : Après le succès d’Alone with Mr. Carter, j’ai essayé d’avoir du budget pour faire un film d’un million de dollars. Je pensais que ça allait me prendre six mois, un an. Eh bien non : il y a beaucoup de monde qui veulent un million pour faire un film ! (rires) Tout ça pour dire que j’ai passé huit ans à développer deux longs métrages, qui seront les deux autres films de la trilogie. Je n’étais plus capable d’être la personne qui voulait faire son premier long métrage. Je n’en parlais même plus à mes amis, j’étais gêné !

    Là je me suis dit : je peux en écrire un autre, où, dès le départ, c’est écrit pour être low budget, avec peu de personnages, peu de lieux. Mais je me suis dit aussi : « Faut que ce soit quelque chose que tu aimes autant que les deux autres. » Ce qui est le fun avec les films low budget, c’est que les films se font.

    Le film donne une visibilité aux gais âgés, qu’on voit rarement à l’écran.
    Jean-Pierre Bergeron : Le film montre la vie très réelle de milliers et de milliers de gais âgés à travers le monde. Ça montre vraiment ce qui se passe dans ce milieu, notamment en ligne. Et en ligne, c’est difficile de faire confiance aux gens.

    Ton film fait référence à d’autres œuvres. Y a-t-il des films qui t’ont inspiré dans ce processus ?
    Jean-Pierre Bergeron : J’ai été très marqué par Sunday Bloody Sunday, de John Schlesinger. Il y avait un gai âgé — joué par Peter Finch, qui est un homme extraordinairement beau — et Murray Head, qui était son jeune amant. Dans le temps, on appelait ça « avoir des amants », c’est fou ! (rires) C’est la première fois que, dans un film non porno, deux hommes adultes se frenchent. Et moi, dans mon film, je me suis dit : « Il faut qu’il y ait deux hommes âgés qui se frenchent. »

    Dans le même esprit, il y a un plan qui montre longuement le corps nu d’un homme âgé.
    Jean-Pierre Bergeron : Ça, c’est comme ma revanche sur Roger Vadim. Je m’explique : Roger Vadim, il a fait Et Dieu… créa la femme avec Brigitte Bardot, dans les années 1950. Ça a été très très populaire, et ça a un peu fait scandale. Il y a un plan assez célèbre où la caméra se promène sur le corps de Bardot, de dos. Et moi je me dis : « Si Roger Vadim avait le droit de faire ça, comment ça se fait que ce n’est jamais arrivé pour le corps d’un homme âgé ? » Ce plan-là, il est très important pour moi, politiquement.

    Tu as publiquement fait ta sortie du placard plus tard dans ta carrière. As-tu senti un jugement?
    Jean-Pierre Bergeron : Je ne pense pas. Quelque chose dont je suis très fier, c’est que, quand je suis sorti du placard, je m’étais dit : « La première fois que tu vas avoir un film qui sort, tu vas sortir du placard publiquement dans les médias. » Moi, j’étais déjà sorti dans le métier, avec mes amis et ma famille. Mais là, je pouvais commencer à faire des entrevues où je dis : « Ben oui, j’ai beaucoup d’amis qui sont gais… » Non, ça n’a pas de bon sens ! J’ai pensé à ma carrière d’acteur, et je me suis dit : « Écoute, moi je suis content de ma carrière, mais si la conséquence, c’est que je suis casté juste dans des rôles de gais — et donc beaucoup moins —, ce sera ça. » Dans les faits, on a continué à m’approcher pour le même genre de rôles, c’est-à-dire souvent des hommes hétéros — ou qu’on présume hétéros —, des figures d’autorité, des policiers, des chefs d’entreprise, etc. Mais on m’a approché plus souvent pour des rôles gais. Avant ça, je ne sais pas, peut-être que le monde avait peur que je dise non ou que je sois insulté ! Depuis lors, j’ai joué une trans dans Complexe G, ensuite un vieux gai — un des rares ! — dans Faits divers. Donc, en fait, mon casting s’est élargi !

    Tu viens de jouer dans La dernière communion. Raconte-nous.
    Jean-Pierre Bergeron : Oui, avec Guy Jodoin et Fayolle Jean. On joue trois Frères qui défroquent du jour au lendemain. C’est intéressant de voir que moi, je joue le vieux grincheux hétéro à la recherche de la fille qui l’avait ghosté — avant même que le mot existe ! — à 18 ans. Guy Jodoin, que je connais comme hétérosexuel, joue un gai. C’est intéressant de voir ça !

    Tu es très ouvert par rapport à ta gérontophilie. T’a-t-on déjà critiqué à ce sujet ?
    Jean-Pierre Bergeron : Quand j’ai commencé ma vie de jeune gai, je me suis fait taquiner plusieurs fois. On me disait : « Prends-toi pas un appartement au troisième étage, ils vont faire une crise cardiaque. » Ça me faisait encore une autre différence !

    Il y a tout un discours à l’effet que les personnes gérontophiles ont eu des pères inadéquats et qu’on recherche notre père. Ça ne tient pas debout. C’était important pour moi, dans le film, de mentionner ça. Il y a un malentendu. On n’est pas des malades parce qu’on aime les hommes âgés. C’est simplement comme ça.

    INFOS | OLD GUYS IN BED sera présenté en première mondiale lors de la 29e édition de Fantasia, le dimanche 3 août à 19h, au Cinéma du Musée. Le film n’a pour l’instant aucune date de sortie commerciale.

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