Mercredi, 10 septembre 2025
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    Un Don Giovanni à l’heure de Mee Too ? Sauf que…

    On dit souvent que l’enfer est pavé de bonnes intentions. C’est le cas de cette réécriture de Don Giovanni qui, on le sait, n’échappera pas à l’enfer. Réécriture sans en changer la partition de Mozart, ni le livret de Da Ponte mais par la mise en scène de Robert Icke, qui signe son premier opéra. Et il n’est pas toujours aisé de réinterpréter une œuvre sans en trahir l’essence.

    NDLR : Cet été, notre journaliste Denis-Daniel Boullé était au Festival d’Aix-en-Provence 2025. Voici l’un des textes sur l’une des œuvres présentées… lors de son voyage.

    La figure de Don Giovanni fascine toujours autant. Qui est-il ? Que pense-t-il vraiment au-delà de son désir compulsif de séduire ? Anti-héros par excellence, il reste énigmatique au même titre que le Hamlet de Shakespeare. Mozart et Da Ponte s’étaient approprié son histoire – comme beaucoup d’autres, on pense à Molière – pour en tirer une tragi-comédie, style très en vogue à l’époque. On oscillait entre le drame et des moments plus joyeux. Le grand séducteur cultivant les conquêtes comme le rappelle Leporello dans le très connu air de Mille et tre laisse derrière lui des femmes compromises, trahies et oscillant entre la haine pour l’homme et le désir qu’il revienne.

    Si l’on se replace à l’époque de la création de l’opéra, 1787, rien de choquant dans les rapports de domination et de pouvoir entre les hommes et les femmes. Une lecture de l’œuvre avec un regard contemporain nous laisse percevoir derrière le séducteur, un prédateur. L’emphase se concentre sur les trois femmes délaissées et meurtries Donna Anna, Donna Elvira et Zerlina, de conditions différentes qui redonnent à l’œuvre toute sa force, sa puissance et les émotions. Les trois sopranos aux voix remarquables compensent pour les faiblesses et les incongruences d’une mise en scène, certes originale, mais qui échappe au public. Quant au ténor qui incarne Don Giovanni, le metteur en scène l’a transformé en un personnage falot, qui s’inscrit dans le désir des femmes qu’il croise pour arriver à ses fins, mais sans aucune autre intelligence que celle de suivre ses pulsions.

    Est-ce pour cette raison que la scène finale où Don Giovanni est confronté à au fantôme du Commandeur qui le conduira en enfer est escamoté. Trop rapide, alors qu’il s’agit du procès de Don Giovanni qui doit expier sa vie de débauche.

    Enfin, autre incongruité, il est précisé dans le programme que l’action se situe dans une station de métro. Impossible d’y croire devant le décor présenté sur scène qui peut évoquer peut-être des entrepôts, surmontées d’une scène qui se transforment au gré de l’action en salon, en chambres, etc.

    En revanche, les voix, et la direction musicale de Sir Simon Rattle ont sauvé du naufrage cet étrange Don Giovanni qui nous a laissé sur notre faim.

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