Mercredi, 27 mars 2024
• • •
    Publicité

    Christian Dior, couturier et créateur de rêves

    Peu de gens ont autant influencé l’esthétique moderne que Christian Dior. L’exposition que lui consacre le Musée McCord donne l’occasion rarissime d’examiner de près le processus créatif au sein de la haute couture parisienne dans les années 1950 et de découvrir directement les influences qui se font encore sentir aujourd’hui, 70 ans plus tard.

    Mise à jour 5 février 2021.
    Le Musée McCord accueillir à nouveau les visiteurs à partir du
    jeudi 11 février pour une visite sécuritaire et sous le signe de la mode haute couture.


    L’exposition, conçue par le Musée royal de l’Ontario (ROM) réunie des tenues de trois collections incontournables: celle du fonds Dior du ROM, de la collection Costume, mode et textiles du Musée McCord, ainsi que des prêts de Dior Héritage. Elle montre comment et pourquoi les collections saisonnières de Dior, la remarquable coupe de ses vêtements de même que l’utilisation de broderies et tissus somptueux ont mené au succès planétaire de la Maison qui, à la fin des années 1950 représentait plus de la moitié des exportations françaises de luxe. Le nom de Dior, plus de 70 ans après l’ouverture de sa maison de haute couture occupe encore aujourd’hui une place fondamentale dans la mode contemporaine.


    L’exposition présentée au McCord est divisée en sections thématiques : le jour (manteaux, tailleurs et robes de jour), la fin d’après-midi et le début de la soirée (robes de cocktail et de dîner) et les grandes occasions (robes de bal et de soirée). La cinquantaine de robes (divers objets et accessoires d’époque), dont un grand nombre ont été portées par les mondaines et les vedettes de l’époque, sont présentées avec des accessoires et des parfums Dior, et accompagnées de films d’époque, de croquis, de photos de mode et de publicités. Nous nous sommes entretenus avec Cynthia Cooper, conservatrice de la collection Costume, mode et textiles du Musée McCord alors que l’équipe du Musée était à l’œuvre afin de réaliser le montage de l’exposition.


    On dit que le New Look de Christian Dior a révolutionné la mode et modifié l’image de la femme en 1947. De quelles manières cela s’est-il fait ?
    Le mot « révolution » a été employé très tôt pour décrire ce qui se passait, même si Christian Dior, lui-même, se défendait d’avoir voulu faire une révolution. L’intention de Christian Dior était de faire disparaître le style de la guerre et de proposer quelque chose de nouveau. Au niveau de la mode, la silhouette de la femme durant la guerre était très masculine, avec des épaules exagérées et rectangulaires et il a pris l’exact opposé. Il voulait effacer les mauvais souvenirs et ramener le triomphe de la féminité, celui des courbes, des lignes souples. Il a donc mis l’accent sur ce qui caractérise la féminité : des épaules douces, la poitrine en évidence, le creux de la taille, les hanches. Son concept de féminité est basé sur l’idée que la femme est belle comme une fleur et cela s’exprime par un buste menu et une jupe qui s’élargit comme la corolle d’une fleur. En cette période de crise (ndlr. : de la COVID-19) que l’on vit en ce moment, on peut imaginer l’effet créé par la proposition, à la fin d’une période de crise, d’une silhouette radicalement différente.


    « Rendre les femmes belles pour les rendre heureuses », tel était son désir ?
    Oui, c’est une phrase qu’on lui attribue. Donner aux femmes le sentiment d’une beauté liée à une forme de séduction. Dans ce monde de l’après-guerre, on voulait reconstruire tout, y compris le corps de la femme à travers le vêtement. Et en faisant cela, il fait ce que d’autres ont réalisé dans des domaines comme l’architecture, le mobilier ou l’auto, car l’esprit de l’après-guerre était de reconstruire le monde, de l’améliorer de le rendre plus beau. D’ailleurs, Christian Dior avait appelé son bureau de création « le bureau des rêves ». Dans l’histoire de la mode, il y a eu très peu de choc aussi radical et surtout aussi radicalement adopté en quelques mois.


    Et pourtant, cette silhouette si généreuse en tissu fait «scandale» en même temps qu’elle connaît un succès fulgurant. il y a eu des critiques du New Look ?
    Oui, car certaines personnes voyaient le New Look comme l’apologie du luxe dans une période d’après-guerre où les populations étaient très pauvres et où il y avait encore du rationnement. Faire tout d’un coup l’apologie de kilomètres de tissus ça paraissait agressif ou insensible mais Dior voulait croire dans le retour de la prospérité. Il a imaginé une mode abondante. Avec le New Look, le désir de la beauté et de la mode était plus fort que la réalité. Les robes étaient inatteignables pour la majorité des femmes, mais en réalité, ce style fut copié et a inspiré bien des femmes qui ont trouvé les moyens de réaliser à leur manière ce New Look de en taillant dans des toiles, des rideaux ou des nappes de grandes jupes en corolle qu’elles voulaient porter! Et il faut dire que le scandale a profité à la notoriété du couturier. Rappelons aussi que le modèle d’affaires permettait à des chaines de magasins à l’étranger d’acheter les droits de reproduire les patrons ou de s’en inspirer.

    La vision du luxe proposé par Dior était d’une certaine manière l’incarnation de l’art de vivre à la française ?
    Oui, clairement une volonté de ramener sur le devant de la scène ce qui constituait l’art de vivre à la française au XVIIIe et XIXe siècles. La France avait souffert pendant la guerre et il y avait le besoin de revenir à une forme de fierté et de rayonnement dans le monde de la culture française. C’est une des sources principales d’inspiration de Christian Dior. C’était une façon de dire au reste du monde que la France est constituée de choses brillantes, même si elle a vécu dans l’horreur et la honte de l’Occupation. Et qu’elle pouvait se relever.

    En seulement une dizaine d’années Dior a bâti un empire de la mode, un concept qui n’existait pas encore vraiment à cette époque ?
    Oui. C’est le premier couturier dont la maison s’est étendue dans le monde entier. C’était un génie créatif, mais aussi doté d’un bon sens des affaires en créant des accords de licence partout, aux États-Unis, en Amérique du Sud, en Europe et même au Japon alors que personne n’allait au Japon à l’époque ! Grâce à la notoriété du New Look il a pu développer un véritable empire qui était présent sur tous les continents.


    Il est aussi pionnier dans cette idée que la haute couture peut s’accompagner d’un véritable art de vivre depuis les souliers, jusqu’aux chapeaux en passant par les dessous, les parfums et autres accessoires. Ce qu’il a accompli dans les années 50, c’est un modèle que bien des marques présentes dans le monde entier veulent reproduire, mais à l’époque, c’était un schéma nouveau. Quand on voit l’accomplissement de ces 10 années, de 1947 à 1957, c’est délirant. Le prestige de la maison Dior était tellement gigantesque que lorsque Dior est mort, la question d’arrêter la maison ne s’est pas posée. À ce moment précis, la maison Dior était la maison de couture dominante, et représentait à elle toute seule plus de la moitié des exportations de produits de luxe français.


    INFOS | Le Musée respecte des mesures sanitaires rigoureuses pour assurer aux visiteurs une expérience sans compromis pour leur santé.

    Il est ESSENTIEL de réserver sa visite au musée en faisant l’achat de ses billets en ligne. musee-mccord.qc.ca

    VISITER LE MUSÉE DE MANIÈRE VIRTUELLE, C’EST TOUJOURS POSSIBLE! Les expositions principales sont toujours disponibles pour des visites guidées virtuelles et participatives avec un médiateur du Musée. Ces visites de 45 minutes par Zoom permettent de découvrir l’ensemble de l’exposition tout en engageant une conversation avec l’équipe du Musée sur différents sujets. Les expositions Christian Dior, Chapleau – Profession : caricaturiste et Porter son identité – La collection Premiers Peuples sont disponibles pour des visites les dimanches, puis également les jeudis pour Christian Dior. Cette initiative vise à remplacer les visites participatives habituellement offertes en personne au Musée.

    Abonnez-vous à notre INFOLETTRE!

    Du même auteur

    SUR LE MÊME SUJET

    LEAVE A REPLY

    Please enter your comment!
    Please enter your name here

    Publicité

    Actualités

    Les plus consultés cette semaine

    Publicité