Jeudi, 28 mars 2024
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    Festival Métropolis Bleu, Nicholas Dawson et son circuit déambulatoire littéraire

    Nous sommes habités par différentes identités. Elles sont mouvantes, elles nous construisent comme elles déterminent notre façon d’être, soi-même et aux autres. Et contrairement à celles et ceux qui nous figent dans l’une d’entre elles, ils et elles oublient que nos identités évoluent et surtout interagissent entre elles. Les maladies viennent aussi en rajouter et nous réduisent parfois au mal qui nous rongent. Et une particularité de nous-mêmes finit par nous définir totalement. Nicholas Dawson avec Désormais, ma demeure décrit les fluctuations et les contours mouvants, parfois nets, parfois invisibles de la dépression. Le festival Metropolis Bleu 2021 ne s’y est pas trompé et a reconnu le talent de Nicholas Dawson. On lui remettra le Prix de la diversité (à la BAnQ) pour cet ouvrage.

    Pour celles et ceux qui ne connaissent pas Metropolis Bleu est un festival international
    littéraire créé par trois femmes en 1997, avec comme seule mission, «rassembler des gens de différentes cultures pour partager le plaisir de lire et d’écrire». La première édition de Metropolis a lieu en 1999. Un événement couru par tous les amoureux et toutes les amoureuses de la lecture pour participer à des rencontres avec les autrices et les auteurs invité.es. Bien évidemment, pour cause de pandémie, l’édition de 2020 a été annulée, et les organisateurs-trices souhaitent pour cette année une édition ouverte au public tout en respectant les mesures sanitaires.

    MARIE-CLAUDE GARNEAU

    Non seulement, Nicholas Dawson recevra un prix, mais il a conçu dans le cadre du festival un circuit déambulatoire littéraire dans le Village gai (en podcast) sous le thème de «Tensions+Intersection». Parmi les écrivain.es qui liront des textes à différentes places du Village gai, on retrouve bien évidement Nicholas Dawson, Kama La Mackerel, Jean-Paul Daoust, Marie-Claude Garneau et Eli Tareq El-Bechelany-Lynch.

    «Je n’ai pas encore choisi l’endroit où je ferai le podcast, mais il y a plusieurs places dans le Village qui peuvent être des sources d’inspiration, explique Nicholas Dawson en entrevue, et le thème «Tensions+Intersection» m’est venu parce que nous entretenons souvent une relation amour/haine avec le Village. Il présente de nombreux visages qui contrastent, entre les nouveaux commerces, les vieux commerces, et les commerces fermés, tout comme la population qui le fréquente, les résidents du quartier, les touristes, les itinérants. Donc, il y a un mélange dans le type de boutiques et d’établissements, un mélange de population, on est dans l’intersection, ce qui provoque parfois des conflits et des tensions entre ces différents groupes». Nicholas Dawson a donc demandé à des écrivain.es d’horizons différents qui ont comme seul point commun d’appartenir à l’une des lettres du sigle LGBTQ2S+ et qui s’approprieront le temps d’une lecture un coin de la rue Ste-Catherine dans le Village.

    Pour l’artiste multidisciplinaire, l’intersectionnalité le touche particulièrement, entre autres, la question de l’homosexualité et du racisme quand on est une personne qui vient d’ailleurs. Né au Chili mais élevé dès son plus jeune âge au Québec, Nicholas Dawson a tôt fait de se rendre compte que ses origines chiliennes revenaient souvent dans les conversations que les autres avaient sur lui-même si une très grande partie de son éducation se faisait au Québec. «Très jeune, j’avais un peu honte de mes origines, que je connaissais pas très bien d’ailleurs, mais qui était le prisme à travers lequel j’étais toujours perçu, comme quelqu’un venant d’ailleurs, confie Nicholas, et il faudra que je parte au Chili pour une réappropriation de mon histoire, découvrir ce qu’avait vraiment vécu ma famille sous la dictature de Pinochet et qui avait motivé mon père, syndicaliste, à s’exiler au Canada».

    JEAN-PAUL DAOUST

    Nicholas Dawson se construit au croisement de deux cultures mais aussi avec son orientation sexuelle. Et puis, il y a quelques années, un événement dont il n’explique pas l’origine bouscule son univers. Il vit une dépression sévère. «Une véritable chute, je ne quittais plus ma chambre, je restais des heures à regarder le plafond, se rappelle-t-il. La seule chose que j’arrivais à faire, c’était de prendre des photos des parties de ma chambre, un coin du plafond, un morceau de fenêtre, en-dessous de mon lit». La photographie a toujours fait partie des formes d’expression
    privilégiées du jeune homme.


    Avec Désormais ma demeure, c’est un voyage au centre de ses réflexions nées de cette période très particulière où l’on vit difficilement quelque chose qui, comme il le dit, nous dépasse. «Je voulais trouver une forme qui rende compte de cet effet de dépassement, de ne plus vraiment contrôler. En un sens ce livre est inclassable, car les chapitres peuvent prendre une forme différente, essai, poésie, photo, et rendre compte ainsi de la pluralité des émotions et des sensations qui naissent en nous quand on vit une dépression, continue Nicholas Dawson, et donc encore de jouer sur l’intersection car il n’y a rien de cloisonné ou de statique dans nos vies, les identités bougent et se confrontent en nous».


    Dans ce voyage au cœur de lui-même et dans ce qu’il nous en livre, Nicholas Dawson nous raconte simplement le voyage au centre des parties les plus noires de lui-même, sans exhibitionnisme, sans apitoiement, sans émotion racoleuse. Un exercice certes déroutant et douloureux mais, qui sait, peut-être pour mieux appréhender l’avenir.


    INFOS | Metropolis Bleu Du 24 avril au 2 mai 2021
    metropolisbleu.org

    Désormais, ma demeure, Nicholas Dawson, Éditions Triptyque (Queer), 2020.

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