Le 28 janvier dernier, le juge Gregory Moore de la Cour supérieure du Québec a invalidé certains articles du Code civil considérés comme discriminatoires envers les personnes trans et non binaires. Sa décision, que je salue à titre de porte-parole de l’opposition officielle pour la communauté LGBTQ2, permettra entre autres aux parents de s’identifier comme « parent » sans avoir à choisir entre « père » ou « mère ». Elle forcera également le Directeur de l’état civil à offrir d’autres options de genre que « femme » ou « homme », une pratique déjà courante en Alberta, en Colombie-Britannique et en Ontario. De plus, les personnes immigrantes nouvellement arrivées pourront légalement changer de prénom ou de genre sans avoir à attendre d’obtenir leur citoyenneté canadienne, ce qui n’était pas permis auparavant.
De manière tout aussi importante, la décision du juge Moore pourrait donner la possibilité aux jeunes de 14 à 17 ans de changer de prénom ou de genre dans les documents officiels sans avoir besoin d’une attestation médicale, comme c’est déjà le cas pour les adultes. Or, le gouvernement caquiste de François Legault s’y oppose. Simon Jolin-Barrette, le ministre de la Justice et Procureur général du Québec, a annoncé son intention de porter en appel la conclusion pourtant sans équivoque de la Cour supérieure du Québec, laquelle stipule que ce traitement différencié est discriminatoire.
Cette décision me déçoit, car elle témoigne d’un manque d’écoute à l’égard des Québécois·es trans et non binaires. Comme l’ont à maintes reprises répété les membres de la communauté LGBTQ2, changer de prénom ou de genre dans les documents officiels du gouvernement est long et complexe : ce n’est pas une démarche que l’on entreprend sur un coup de tête. Au cours de mes rencontres avec des personnes trans et non binaires, j’ai compris que l’attestation médicale actuellement requise n’était qu’un obstacle supplémentaire pour les adolescent·es qui ne s’identifient pas au genre auquel ils ont été assignés à la naissance. Elle engrange des coûts importants et laisse les jeunes personnes trans et non binaires dans un état de vulnérabilité insoutenable.
J’invite donc le ministre de la Justice à faire preuve d’équité et à revoir sa position. Il doit déposer un projet de loi qui corrigera cette injustice, et ce, dans les plus brefs délais. Comme le note le juge Moore dans sa décision, la situation actuelle « viole la dignité et le droit à l’égalité des personnes trans ou non binaires ». Nous sommes tenu·es, en tant que parlementaires, d’y mettre un terme le plus rapidement possible.
JENNIFER MACCARONE
Députée de Westmount–Saint-Louis