Dans le monde, les lois criminalisant la transmission voire la simple non-divulgation au VIH restent légion. Pourtant, depuis plus de cinq ans, la communauté scientifique réaffirme la primauté des faits et des preuves scientifiques dans le but de combattre l’ignorance et la stigmatisation sur lesquelles ces législations sont fondées.
Deux personnes couchent ensemble. Les deux sont consentantes. Elles se revoient, se fréquentent et couchent ensemble : une apprend que l’autre est séropositive au VIH et la poursuit en justice. Cette personne est condamnée.
Une condamnation qui a plusieurs conséquences. D’abord des conséquences légales : la mention « délinquant sexuel » affichée en gros sur le permis, une notification envoyée à son entourage, des restrictions d’accès à certains lieux (parcs, écoles, etc.).
Ensuite des conséquences sociales : un outing forcé, un rejet de l’entourage, des difficultés à avoir accès à des ressources financières provenant du travail ou de l’État, à un logement. Et forcément, des conséquences sur le moral : la peur des procès, la culpabilisation et l’isolement. La sérophobie agit fatalement sur la santé globale des personnes.
Ces procès, fondés sur des peurs d’un autre temps et au mépris de la réalité scientifique, font aujourd’hui encore peser sur les personnes séropositives une culpabilité injuste et conduisent de fait à leur stigmatisation, à leur exclusion et à leur précarisation.
Ces procès peuvent entraîner une détérioration de l’estime de soi, des manques d’observance thérapeutique dangereux pour la santé de ces personnes et, ironiquement, pour celle de leurs partenaires. Nous n’en sommes plus là; ces procès et les représentations qu’ils perpétuent doivent cesser.
Car malgré le succès indéniable des thérapies antirétrovirales et les preuves scientifiques que l’indétectabilité (une charge virale en bas de 200 copies par millimètre) rend le virus intransmissible, le panorama est inquiétant : 73 pays (dont le Canada) criminalisent encore non seulement la transmission, mais l’exposition ou la non-divulgation d’un statut sérologique positif à un partenaire, même si celui-ci est indétectable.
Trente-huit autres utilisent des lois non spécifiques au VIH pour poursuivre les personnes séropositives. Ces lois alimentent également l’épidémie en stigmatisant, en éloignant des soins et en maintenant dans la peur et le rejet les personnes séropositives.
Ces législations n’ont surtout jamais pris en compte les évolutions thérapeutiques et préventives. On peut comprendre l’attachement à la lutte contre les agressions, le meurtre, la violence que défendent les cours de justice, mais elles doivent reconnaitre que la science a évolué et évoluer elles-mêmes en conséquence.