Vendredi, 29 mars 2024
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    David Cloutier publie (enfin) son premier roman

    Après des années à lire ses chroniques aussi hilarantes qu’acidulées dans Urbania, d’innombrables personnes espéraient retrouver la plume de David Cloutier dans une version plus longue. Leur vœu a été exaucé avec la publication de La vie fabuleuse des gens fabuleux, un roman dans lequel on plonge dans la tête de Léo, une jeune escorte tout feu tout flamme, Mylène, une comédienne quarantenaire blasée, ainsi que Jessica, une maquilleuse qui peine à trouver son chemin vers l’épanouissement.

    Quelle place occupe l’écriture dans ta vie ?
    David Cloutier : Il y a une douzaine d’années, je suis devenu le coloc de la comédienne Catherine Brunet et j’ai commencé à écrire des idées de webséries, de sketchs et de courts métrages. Un de mes projets de série télé a suscité de l’intérêt des Productions J, mais c’était vague à quel point l’équipe était intéressée. Avec le temps, j’ai constaté que le milieu de la télé était hyper compliqué et chiant. Puis, un jour, j’ai envoyé un texte à Urbania un peu par hasard. Ils ont aimé ça. Ils l’ont publié. J’ai continué. Mais je n’ai jamais vraiment voulu être auteur. Je travaille aujourd’hui comme fonctionnaire pour le gouvernement fédéral.

    Pourquoi publies-tu un premier roman à ce moment-ci de ta vie ?
    David Cloutier :Il y a dix ans, je n’avais rien à dire. Il y a trois ans, j’aurais eu des choses à dire, mais moins nuancées. Je me serais juste vidé le cœur en chialant sur tout et je me serais fait détester. Cette année, j’avais envie d’exprimer des choses et de raconter des histoires, sans passer par Urbania. Je n’aimais pas que les gens réagissent automatiquement quand je publiais une chronique. Trop souvent, sur Internet, les gens se sentent obligés d’avoir une opinion. En plus, j’avais compris ce que les gens attendaient de moi : une chronique drôle, crunchy, qui fait un peu réfléchir, un peu bitch, mais sans que personne se fâche. Je n’avais plus de plaisir. Dans un roman, j’imaginais dire ce que je veux pendant 300 pages.

    En plongeant dans la tête de Léo, de Mylène et de Jessica, tu relèves le défi d’avoir trois personnalités et trois voix distinctes dans ton écriture. Quelles sont leurs couleurs
    respectives ?

    David Cloutier :D’abord, je dois dire que c’est 100 % fictif. Étant donné que Léo se prostitue et que j’ai déjà été escorte dans une courte période de ma vie, et que j’ai travaillé dans le milieu artistique, certaines personnes me demandent si c’est moi. Mais non. Cependant, j’ai utilisé ces personnages-là pour exprimer des émotions que je ressens.

    Léo, je le voyais comme un petit ouragan, toujours en mouvement, comme s’il fuyait tout. Il dit des choses de manière très assumée, mais il est souvent en train de se remettre en question. Il s’est rendu à 25 ans, sans trop savoir comment il a fait. Mylène est une comédienne de 40 ans qui regarde derrière elle avec nostalgie, à l’époque où elle se sentait libre et indépendante. Aujourd’hui, elle est blasée par l’extraordinaire. Jessica ne sait pas ce qu’elle veut ni qui elle est.

    Sur les réseaux sociaux, je trouve que tout le monde est très campé : soit tu es très extraverti.e avec 14 gangs d’ami.e.s et toujours sur la rumba, ou encore très assumé.e dans ton côté casanier, introverti.e, en affirmant que tu ne sors pas dans les bars les vendredis, parce que tu préfères regarder la télé seul.e avec ton chat. Pourtant, il y a plein de gens qui sont entre les deux. Moi, je culpabilise quand je ne sors pas. Et quand je sors, je me demande ce que je fais là. J’ai toujours l’impression de ne pas être à la bonne place.

    J’ai l’impression que ton livre aurait pu s’appeler La vie malheureuse des gens malheureux. Je ne crois pas que mes personnages sont malheureux. Ils tentent de s’épanouir sans trop savoir ce que ça veut dire pour eux. Ils sont en questionnement, un peu blasés, sans être malheureux. N’empêche, c’est vrai qu’aucun d’entre eux n’est ultra épanoui.

    Dirais-tu que ta plume est comico-triste ?
    David Cloutier : Absolument. Quand je suis en contact avec un humour de surface, sans le drame qui vient avec, je trouve ça vide et ennuyant. Je ne vais jamais voir du stand-up d’humour, parce que c’est presque toujours ça. Si quelqu’un essaie juste de faire rire pour me faire rire, je m’en fous.

    À vrai dire, au départ, je voulais écrire un roman drôle à la Urbania, mais je n’étais pas capable. Ce n’est pas vrai que je vais écrire 300 pages d’anecdotes drôles de trois personnages. Ce sont des humains entiers. Donc, oui, c’est comico-dramatique. Il ne faut pas avoir peur d’aller dans la tristesse et dans le drame. En même temps, je trouve ça correct d’en rire.


    INFOS | LA VIE FABULEUSE DES GENS FABULEUX, David Cloutier, Les éditions de la maison en feu, 2022

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