Jeudi, 28 mars 2024
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    Une œuvre chorale qui épouse les méandres du Saint-Laurent

    Rébecca Déraspe s’allie à l’autrice Annick Lefebvre et à la metteuse en scène Alexia Bürger pour Les Filles du Saint-Laurent, une œuvre portée par une impressionnante distribution presque toute féminine. Créée en coproduction avec La Colline – théâtre national et présentée à Paris en novembre 2021, Les filles du Saint-Laurent arrive enfin au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui en avril prochain.

    Un soir, de Côteau-du-Lac à Blanc-Sablon, de Rimouski à Grandes-Bergeronnes, les vagues du fleuve Saint-Laurent se déchainent, aux prises avec des rafales qui ne laissent personne indemne. Sept cadavres sont recrachés sur ses berges. Sept corps non identifiés, non réclamés que croisent au détour d’une marche, d’un rendez-vous sexuel clandestin, d’une pause cigarette, Élodie (Tatiana Zinga Botao), Rose (Louise Laprade), Dora (Catherine Trudeau), Charlotte (Gabrielle Lessard), Martin (Ariel Ifergan), Lili (Marie-Ève Milot), Mathilde (Annie Darisse), Manon (Émilie Monnet) et Anne (Marie-Thérèse Fortin). De cette confrontation brutale avec la mort, les personnages se révélent à eux-mêmes. De ces vies somme toute banales, coincées dans un quotidien qu’elles et lui subissent, elles et lui vont se libérer, faire jaillir une force de vie qu’elles et lui ne soupçonnaient pas.

    Femmes se révélant fortes, puissantes même, étonnées de ce qui s’ouvrent à elles. Homme se révélant fragile, désarmé, étonné de ce qui lui échappe. Et le fleuve en dialogue comme un miroir de ces émotions qui les traversent… 

    Les filles du Saint-Laurent ce sont des portraits de femmes, de différentes générations, vies minuscules dans les rets d’un quotidien qui les broie lentement et dont le destin bascule un jour. Parcours singuliers qui dessinent un portrait général de la condition féminine où l’intime devient l’universel. Et puis il y le portrait du Saint-Laurent, figure centrale de cette création qui définit le territoire de chacune, intime, géographique, historique. Impulse une dynamique, un courant qui les emporte aux confins d’elle-même au risque de se perdre.

    CRÉDIT PHOTO : Tuong Vi Nguyen

    Annick Lefebvre et Rebecca Déraspe signent une œuvre bouleversante, résolument engagée, féministe. Il n’y a pour elles aucun sujet tabou. Violences conjugales, alcoolisme, drogue, sexualité, jouissance, frigidité… l’écriture est crue, directe, violente même, qui vous ravage et vous fracasse. C’est d’une sensibilité écorchée qui vous cisaille net. Et cette œuvre chorale, cette parole libérée est magistralement mise en scène par Alexia Bürger. La parole se succède comme un flot irrépressible et continu, tout en fluidité.

    Alexia Bürger tisse entre les personnages des fils ténus et solides, trame serrée d’une toile qui les enserre dans une communauté de destin pour ne faire bientôt qu’une entité. Et pour soutenir, défendre une œuvre si dense et volontaire il fallait bien ces actrices-là et cet acteur-là. Dirigés de main-de-maître, engagés avec force dans l’appréhension de cette écriture fleuve, ils offrent à leurs personnages fouaillés au plus profond, jusqu’à l’écorchure, une incroyable et belle humanité, bouleversants de vérité données sans retenue, sans pudeur. D’une justesse âpre, rugueuse et qui prend aux tripes.

    INFOS | LES FILLES DU SAINT-LAURENT
    Du 4 au 29 avril 2023, Salle Michelle-Rossignol du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui
    Texte Rébecca Déraspe en collaboration avec Annick Lefebvre, mise en scène Alexia Bürger, avec Annie Darisse, Marie-Thérèse Fortin, Ariel Ifergan, Louise Laprade, Gabrielle Lessard, Marie-Ève Milot, Émilie Monnet, Elkahna Talbi, Catherine Trudeau et Tatiana Zinga Botao
    theatredaujourdhui.qc.ca

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