Militant, archiviste, auteur, animateur, écrivain et professeur, Bernard René Courte est né en 1949 à Weir dans les Laurentides, au nord-est d’Ottawa. Comme le village est majoritairement anglophone, il y subit de la discrimination, se faisant traiter de « Speak White ». Marqué par ce rejet et, plus tard, par l’expérience traumatisante qu’il a vécue lors de la brutale descente de police au bar Truxx en 1977, il deviendra un ardent défenseur des droits des Francophones et des droits de la communauté homosexuelle et des gens atteints du SIDA.
Installé à Montréal à l’âge de 17 ans, il y poursuit des études à l’Université du Québec à Montréal et à l’Université McGill. À partir de 1976, Bernard Courte enseigne l’anglais pendant dix ans au Cégep de Saint-Jean-sur-Richelieu. En parallèle, il descend dans la rue et marche dans de nombreux défilés, rejoint les rangs de l’Association pour les Droits des Gais du Québec et s’implique dans le journal Le Berdache, entre autres à titre d’éditeur. Il y rédige des textes et publie des traductions d’articles parus dans The Body Politic, revue mensuelle engagée parue entre 1971 et 1987. Dans l’édition d’octobre 1981, par exemple, il reprend un article indiquant « la formation d’un groupe de citoyens pour surveiller les activités de la police de Toronto 1. »
Au fil des ans, il dénoncera dans ses écrits l’attitude discriminatoire d’un journaliste de La Tribune de Sherbrooke, la brutalité policière lors de rafles dans des saunas d’Edmonton et de Toronto, ou encore les méfaits insidieux de certaines recherches pseudo scientifiques concernant les gais. Lorsque Le Berdache cesse de paraître en 1982, il devient membre fondateur du mensuel Sortie où il sera rédacteur en chef en 1985-1986. Parmi ses nombreux papiers, celui intitulé Homosexualité et catholicisme : Peut-on être gai et catholique ? 2 Conscient très tôt des ravages du SIDA, il écrit abondamment sur le sujet. « Il est d’ailleurs le premier, dès 1983, à en parler ouvertement à la radio et à la télévision 3. » Impliqué dans le Comité Sida Aide Montréal, il présente des communications lors des congrès.
En 1986, il déménage à Toronto avec son partenaire de longue date, Keith Russell. Expert reconnu en langue et en éducation, il travaille au Centre de recherche en éducation franco-ontarienne (CRÉFO) de l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario (IEPO). Tout en poursuivant son œuvre de militant et de
journaliste, il a sa propre chronique mensuelle dans Sortie (La Chronique Courte) et dans la revue Xtra (XtraCourte), hebdomadaire gratuit édité dans la Ville-Reine 4.
Voyant sa santé péricliter, Bernard Courte redouble d’ardeur. En 1988 il crée une section francophone au sein du nouveau groupe de revendication, AIDS Action Now!, et commence à traduire leur bulletin sur le traitement du sida. Il entreprend également de réaliser un index en français des données
médicales sur le traitement du sida, lequel constitue une ressource unique en Amérique du Nord. En outre, il participe à la fondation d’un groupe d’appui francophone pour les personnes atteintes du sida à Toronto. En plus de mettre sur pied des ateliers sur le sécurisexe, il n’aura de cesse d’être actif dans neuf conférences sur le sida en six ans, avant d’être emporté lui-même par la maladie le 19 octobre 1991.
Un fonds à son nom est déposé aux Archives Gaies du Québec et s’avère « un inestimable témoignage sur les mouvements et journaux gais et lesbiens de l’époque 5. »
NOTES :
1 Bernard Courte, « Formation d’une commission de surveillance de la police », Le Berdache, no 24, octobre 1981, p. 17.
2 Bernard Courte, « Homosexualité et catholicisme : Peut-on être gai et catholique ? », Sortie, no 37, avril 1986.
3 Harold Averill, in Robert Aldrich & Garry Wotherspoon, Who’s Who in Contemporary Gay and Lesbian 4 History, Routledge, 2001, p. 95. Traduction de l’auteur. Bruce Jones, « Bernard Courte (1949-1991) », The ArQuives Digital Exhibitions : https://digitalexhibitions.arquives.ca/ exhibits/show/npc/item/74. Consulté le 23 août 2022.
5 agq.qc.ca/fonds-archives. Consulté le 2 septembre 2022.