Aux États-Unis, l’administration Trump a été forcée de rétablir plus d’une centaine de pages et de bases de données de santé publique concernant les personnes LGBTQ+, après plusieurs mois de bataille judiciaire. Une victoire jugée cruciale par les organisations médicales et associatives, alors que la Maison Blanche poursuit son offensive idéologique contre la notion même d’« identité de genre ».
En janvier, quelques heures après sa prise de fonctions, Donald Trump avait signé une série de décrets ordonnant aux agences fédérales de retirer toute référence au « genre » et à la « diversité » de leurs politiques et documents. Dans la foulée, le département de la Santé (HHS) avait effacé de nombreux outils et rapports accessibles en ligne, allant des données sur les risques liés à la grossesse ou à l’addiction aux opioïdes, jusqu’à des ressources de prévention sur le VIH.
Pour les médecins, chercheurs et associations, ce brusque effacement a eu un effet immédiat : des informations de santé publique fiables, souvent vitales, se sont volatilisées sans préavis. « Ces suppressions ont compromis notre capacité à soigner nos patients et ont ébranlé notre confiance dans nos institutions sanitaires », a dénoncé la Washington State Medical Association (WSMA), qui a pris la tête d’un recours collectif.
Saisie par les plaignants, la justice fédérale a finalement abouti à un règlement : l’État s’engage à restaurer plus de cent sites et ressources dans leur version antérieure. La remise en ligne doit intervenir dans les prochaines semaines. Un précédent dossier porté par l’organisation Doctors for America avait déjà conduit, cet été, un juge à ordonner la réactivation de 167 autres pages.
La décision est saluée comme un revers infligé à la stratégie de l’administration Trump, accusée par les associations de vouloir « effacer » les personnes LGBTQ+ de l’espace public. « C’est la preuve d’une volonté politique de rendre nos communautés invisibles, en les privant même d’un accès aux données de santé », a rappelé Sarah Kate Ellis, présidente de GLAAD.
Mais la bataille est loin d’être terminée : le HHS a indiqué rester « engagé à retirer l’idéologie radicale de genre et la DEI des programmes fédéraux », sous réserve de la loi. Une formule qui laisse présager de nouvelles tensions autour de la place des minorités sexuelles et de genre dans les politiques publiques américaines.
Slovaquie : les droits LGBTQ+ et la culture sous pression
Depuis son retour au pouvoir, le Premier ministre Robert Fico a engagé la Slovaquie dans une trajectoire inquiétante, multipliant les offensives pour restreindre les droits des personnes LGBTQ+ et imposer une ligne conservatrice à la vie culturelle, au nom de la « protection des traditions » et d’une souveraineté nationale opposée aux normes européennes.
Une réforme constitutionnelle controversée
Au printemps, le gouvernement populiste a présenté au Parlement un projet d’amendement à la Constitution. Il prévoit de limiter la reconnaissance légale à deux sexes, homme et femme, de réserver l’adoption aux seuls couples hétérosexuels mariés et d’introduire une clause de primauté du droit slovaque sur le droit européen dans tout ce qui touche à la famille, l’identité et la morale publique.
Le texte inclut également une disposition dite de « clause de conscience » permettant à un professionnel de refuser un acte légal, comme un soin ou un service. Une mesure qui pourrait restreindre encore davantage l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) notamment, déjà difficile dans plusieurs hôpitaux du pays.
Prévu pour l’été, le vote a été reporté à septembre faute de majorité qualifiée. Robert Fico a toutefois réaffirmé son intention de faire adopter la réforme, présentée comme un rempart contre le « progressisme occidental ». Amnesty International et le Conseil de l’Europe dénoncent une régression majeure qui « écraserait » les droits des minorités.
La culture dans le viseur du gouvernement
La ministre de la Culture, Martina Šimkovičová, a parallèlement écarté plusieurs figures majeures du secteur, dont le directeur du Théâtre national et la directrice de la Galerie nationale, accusés de promouvoir une « idéologie progressiste ». Les subventions aux projets liés aux droits LGBTQ+ ont été supprimées.
Ces décisions ont déclenché une vague de contestation. Des manifestations ont ainsi rassemblé plusieurs milliers de personnes à Bratislava, et une pétition a recueilli près de 180 000 signatures. Les milieux artistiques dénoncent une volonté d’imposer une ligne unique et de réduire au silence les expressions jugées dissidentes.
Un test pour l’Europe
Pour l’Union, l’enjeu est crucial. Cette trajectoire rapproche la Slovaquie de la Hongrie et de la Pologne. Sur le plan juridique, l’affirmation de la primauté du droit national remettrait en cause l’architecture communautaire. Sur le plan politique, ces reculs fragilisent la crédibilité de l’Europe lorsqu’elle se pose en garante des libertés.
Le débat revêt donc une dimension symbolique. Si le Parlement adopte la réforme, la Slovaquie deviendrait le premier État membre à inscrire constitutionnellement la discrimination, risquant d’inspirer d’autres gouvernements. À l’heure où l’Union européenne discute d’élargissement et de démocratie, le mois de septembre s’annonce décisif.
Des appels circulent déjà pour interpeller les eurodéputés, mobiliser la Commission européenne et organiser des rassemblements symboliques devant les ambassades slovaques, afin de rappeler que la protection des minorités est une valeur centrale de l’Union.

