(Mado est au boutte / Tiré de nos archives)
À peine deux petites semaines et nous pourrons hurler à pleins poumons notre fierté. Maintenant que la plupart des « gay prides » de la planète sont choses du passé, c’est à notre tour, chers amis gais et non-gais, de se laisser parler d’amour. C’est notre Semaine Sainte, notre Ramadan, notre Yom Kippur et notre festival de la crevette à nous.
Mais attention, il faut préciser pour le bien être des puritains, la fierté gaie ce n’est pas juste une affaire de party de jeunes hommes torses nus, de lesbiennes les boules à l’air et de parade de drags queens dévergondées comme vous en entendrez, ENCORE, parler dans un média près de chez vous. Ça va faire bientôt 30 ans que je marche pour dénoncer les injustices faites aux gais d’ici et d’ailleurs, parce que, oui monsieur Martineau, même si on nous répète ad nauseam que la fierté gaie ne sert plus à grand-chose dans une société ouverte comme la nôtre, tant qu’il y aura des Turcs, des Russes, des Syriens et des millions de jeunes homosexuels encore persécutés dans leur pays d’origine, je marcherai toujours pour eux et pour tous ceux qui n’ont pas la force, le courage ou le pouvoir de vivre au-delà des préjugés. Pour eux, notre fierté gaie aura ENCORE, toute sa raison d’être.
Il n’y a pas si longtemps au Québec, on se battait encore pour nos droits d’êtres humains et on assistait à encore beaucoup trop d’actes de violence et d’homophobie. Et même si je me tue à répéter qu’il est impératif de remplacer le mot « tolérance » par le mot « acceptation » dans notre vocabulaire, chaque année, c’est immanquable, j’explique encore, aux mêmes médias, qu’être gai c’est pas un choix de carrière, un mode de vie excentrique, un trip de jeunesse ou une résignation due à l’impopularité auprès du sexe opposé. Non mais là, la madame a commence à être ben tannée de se répéter, de se justifier, de s’excuser et de chercher mille et une raisons valables à la tenue d’une fierté gaie. Alors si ça ne vous dérange pas, mesdames et messieurs de la chronique sensationnaliste, gardez donc vos jugements personnels pour les magouilles de nos politiciens et laissez-nous donc célébrer en paix notre fierté dans la gaieté, la joie, l’allégresse et la vodka canneberges. Non mais veux-tu ben me dire quand est-ce qu’ils vont comprendre qu’une toute petite semaine par année de célébrations et de commémorations c’est pas la fin du monde, bout d’viarge!
Bâtard, je pense qu’on fait un moins grand battage médiatique lors du grand rassemblement annuel des témoins de Jehovah. Et Dieu sait qu’on pourrait leur reprocher bien des choses. Ceci étant dit, cette année nous aurons une raison de plus de célébrer car nos voisins américains ont enfin obtenu le droit légal de se marier entre couples de même sexe. « Y’était temps », ont dit ceux qui attendaient avec impatience cette décision historique pour unir leur destinée devant la loi et « au secours, déménageons vite au Canada » ont dit ceux qui ne reconnaissent que l’union entre un homme et une femme. Ben oui, v’nez-vous en au Canada gang d’ignorants, ça fait déjà 10 ans qu’ils sont légaux chez nous les mariages gais. Et avec le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et une partie du Mexique où il est permis aux gais de se marier, il ne reste plus grand place en Amérique pour nos pauvres persécutés par l’invasion de mariages homosexuels qui n’auront plus d’autres choix que de déménager en Azerbaïdjan ou aux Iles Galápagos ( quoique il parait que certaines espèces de tortues seraient homosexuelles ).
Alors maintenant que de plus en plus de pays reconnaissent les mariages gais, j’peux tu vous dire que je l’attends la question des journalistes cette année : « Maintenant que bla, bla, bla, pensez-vous que la fierté gaie a encore sa raison d’être? ». Des fois j’aurais envie de leur dire : « Mangez donc toute de la gouache! » Mais comme je suis bien élevée et que je suis plus intelligente que les questions qu’on me pose, je vais prendre 3 grands respirs et avec un air convaincu, le sourire fendu jusqu’aux oreilles et mon poing levé vers le ciel je vais clamer tout haut : « So, so, so, solidaires et gais! ».
En général, c’est à ce moment là de l’histoire que les gais qui haïssent les drags queens, comme un vampire répugne le beurre à l’ail, bondissent de leur chaise et se garôchent sur Twitter et Facebook pour me sommer de me fermer la gueule car ce ne sont pas tous les gais qui s’identifient à la communauté et que ce ne sont pas tous les gais qui s’habillent comme des dévergondées et qui s’adonnent à des actes de grossières indécences en public devant un parterre de familles et d’enfants et que ce sont des drags queens comme moi qui nuisent à l’image des gais partout sur la planète et que patati et que patata. Oh la la bébé, c’est dur, dur d’être une drag queen!
Vous vous doutez que je ne perds pas mon temps à répondre à ces calomnies car je sais très bien que ce ne sont pas tous les gais qui s’identifient à la communauté gaie pas plus que je ne suis la représentante de quelque communauté que ce soit et que beaucoup de gais en ont rien à cirer de la semaine de fierté. Et vous savez quoi, c’est très bien comme ça. Ils n’ont pas à se justifier de ne pas être concernés comme ils n’ont pas à juger de la pertinence d’un tel évènement. Tu respectes ce que je suis et je respecte ce que tu es. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Pas plus compliqué que moi je respecte les gars hétéros qui en ont rien à foutre de baiser avec une drag queen quand ils sont complètement souls. Bon, ils ne savent pas ce qu’ils manquent, mais je respecte leur choix. D’ailleurs la vie est faite de choix et le choix de faire ceci ou de faire cela nous appartient et ne devrait pas être affaire de débat public.
Par contre, si votre choix c’est de vivre le plus loin possible de tout ce qui concerne la communauté gaie, ça ne vous donne pas le droit de condamner tout ce qui ne ressemble pas à l’idée que vous vous faites de la vie «normale». N’allez pas faire des Stephen Harper de vous-mêmes! Les drags queens dépravées et les gars de cuir débauchés vous énervent? Les fesses et les seins nus vous irritent? Ben voyons donc mes chéris, on n’est pas en Russie icitte. À ce que je sache, on ne tue pas à coups de plumes, de paillettes, de cuirette ou de foufounes à l’air! Les puristes qui cherchent à rétablir l’ordre selon les principes de nos ancêtres, c’est bon pour les membres du parti conservateur, pas pour vous autres mes amours.
Vous êtes homos et l’expression fierté gaie vous aliène? Ah ben là va falloir que vous en parliez avec Jeff Filion mes poussins. Vous êtes hétéros et le mariage gai vous pue au nez? Ben achetez-vous un chien, on sait jamais, un jour on pourra peut-être se marier avec nos animaux! Moquez-vous, bitchez ou ridiculisez-moi, j’ai pas de problèmes avec ça, la vie est trop courte pour que j’me préoccupe de ce qu’on pense de moi.
De grâce mes amours, si vous en avez rien à foutre de la fierté gaie, restez donc chez vous et cesser de nous resservir le même discours année après année. On commence à le savoir qu’on est toute une gang de dégénérés, d’obsédés, de pervers, et puis quoi encore? Moi je suis straight, je suis gaie, je suis bi, je suis à mes chats, et pis après?
Si je suis en harmonie avec ce que j’ai choisi d’être, je n’ai pas besoin de l’approbation de la planète entière. Qui m’aime me suive pis les autres, ben mangez des grilled cheese!
ONE MADO SHOW : Vous n’avez pas encore vu mon premier vrai spectacle de stand up comic? Il n’est jamais trop tard pour bien faire, je suis de retour pour un soir pendant la semaine de fierté gaie ( au se-cours, un show de drag queen pendant la semaine de fierté gaie, quel cliché! ) le vendredi 14 août à 20 h au Petit Olympia. Chu drôle, chu bitch, je chante bien, je danse mal pis j’vous promets que je raconte pas juste des histoires de gais qui se tiennent juste avec des gais pis qui parlent juste d’affaires de gais! J’vas aussi raconter des histoires de lesbiennes qui se tiennent juste avec des lesbiennes pis qui parlent juste d’affaires de lesbiennes! Gais et lesbiennes qui font pas juste des affaires de gais et de lesbiennes s’abstenir.