Dans la littérature contemporaine, les auteures lesbiennes qui abordent le lesbianisme et qui sont publiées par les maisons d’éditions demeurent rarissimes. Voilà que Libre Expression publie «La Fille dans le placard», premier livre de Chantal Brunette.
Qui plus est, l’auteure séduit de par sa plume humoristique, rendant son héroïne, Maxime, tout à fait charmante. Un roman «Chick lit», qui n’hésite pas à aborder avec humour les questionnements liés à la découverte de l’orientation sexuelle. Sans conteste, La Fille dans le placard s’annonce comme un vent de fraicheur dans le milieu littéraire québécois.
Entrevue avec celle qui a trouvé sa princesse et qui vit désormais un conte de fée, avec son premier roman.
Dès le début de notre conversation, Chantal sort du placard à propos de la suite de son livre: « notre entrevue lui fera prendre une pause de sa révision… », m’avoue-t-elle. Le fait est que le tome 2 de La Fille dans le placard est déjà écrit, avant même la sortie du premier! N’est-ce pas un conte de fée? Mais « rien n’arrive pour rien », pour reprendre les propos de l’auteure. Son premier ouvrage semble destinée au succès, même si l’auteure de 32 ans ne semblait pas prédestinée à l’écriture, explique la gestionnaire en ressources humaines. « Je n’ai pas le parcours typique de la fille qui a étudié en communication ou en littérature, ce fut plutôt un concours de circonstances… Je suis une très grande fan de littérature Chick lit et des auteurs québécois qui utilisent l’humour. Mais dans les livres que je lis, bien que l’amour soit au coeur du sujet, ça reste l’amour hétéro, une fille qui cherche son prince… Moi je voulais voir ce type de littérature divertissante et empreinte d’humour, mais avec une héroïne qui se questionne sur son orientation, ou qu’elle soit gaie tout simplement! Je n’en trouvais pas, alors je l’ai écrit, sous les conseils d’une amie ».
Ainsi, La Fille dans le placard suit les aventures (en voyage, en amours) de Maxime, une fille dans la jeune vingtaine, qui semble prédestinée à trouver sa princesse… Ce qui est intéressant, c’est que l’ouvrage offre une lecture vraisemblable du lesbianisme, où Maxime se questionne sur son orientation sexuelle à travers toutes ses «nuances de gris»: «C’était important pour moi d’exprimer ces nuances dans la caractérisation du personnage, car je crois que même certaines filles hétéros peuvent passer par ce questionnement. Je me suis rendu compte en parlant avec d’autres filles hétéros et mariées qu’elles avaient eu aussi ce questionnement à 18 ans et qu’elles trouvaient intéressant de pouvoir lire ce genre de livre qui traite de ce sujet. Donc l’idée de montrer les nuances, va aller chercher plus de gens. » Bien sûr, le tout est fait du point de vue lesbien, ce qui rend l’approche originale (puisque rarement publiée), enchaîne Chantal: «Je trouve que depuis quelques années on fait plus de place aux thématiques lesbiennes, mais je trouve que ça vient plus des web séries et de la télévision. Et souvent, les personnages lesbiens demeurent encore des personnages secondaires qui gravitent autour des personnages hétéros. Dans mon roman, le personnage est gai et entouré d’hétéros. Un peu comme dans ma vie. Je voulais que le personnage lesbien soit l’intrigue principale.»
De nombreux passages de La Fille dans le placard sont autobiographiques, avoue Chantal, même s’il y a aussi de l’autofiction: «Ceux qui me connaissent bien sont capables de voir certains traits de caractère que je peux avoir en commun avec le personnage de Maxime, mais c’est certain que ça reste un personnage exagéré… Mais dire que je suis l’opposée de Maxime, serait mentir! » Lorsqu’on demande à l’auteure si inclure des parcelles autobiographiques dans son roman l’effraie ou la rend vulnérable, elle avoue d’emblée que «lorsque je l’ai écrit, je n’avais jamais pensé le faire publier…Quand je l’ai terminé et que mes amies m’ont dit qu’il fallait plonger, ça ne m’effrayait pas…Mais là, à quelques semaines du lancement, ça devient vraiment concret» avoue l’auteure sur un ton humoristique (ne cachant pas une «petite» anxiété). Le fait est que Chantal, n’est pas dans le placard. Nécessairement, son processus d’acceptation personnelle rend vraisemblable les questionnements de Maxime, avec un humour bien dosé. Sans conteste, l’humour transparaît dans la plume de l’auteure et y occupe une place importante: « Un questionnement n’est jamais évident et pour moi utiliser l’humour était aussi une façon de dédramatiser. C’est sûr que maintenant, avec le recul, c’est plus facile de rire de certaines situations, mais l’amener avec humour permet de rendre le tout moins lourd. », explique celle qui avoue aussi être plutôt « drôle » dans la vie.
Tous les chapitres du roman débutent par une citation d’une chanson, de Beau Dommage à Ariane Moffatt, en passant par Taylor Swift et « I Kissed a Girl » de Katy Perry, ce qui n’est pas un hasard, explique Chantal: « Ce sont toutes des chansons que j’écoute quand j’écris, car ça me prend absolument de la musique lors de l’écriture! Ce sont aussi des chansons qui me rappelle des choses que j’ai vécues quand je les écoutais…Pour moi, toutes ces chansons veulent dire quelque chose; mes amies me trouvent fatigante, car j’analyse toujours les paroles des chansons! »
Et puisque l’écriture s’est étalée sur plusieurs années, plusieurs discographies ont dû passer dans les oreilles de Chantal. « Quand j’ai commencé mon écriture, j’ai ouvert Word et je n’avais aucun plan en tête. J’ai ressorti mes vieux journaux de bord (de voyage) de ma début vingtaine et j’ai commencé à écrire…» Si elle avoue avoir écrit ces journaux de bord par obligation (de sa professeure, lors de son voyage d’études), les souvenirs qu’ils évoquent n’ont pas de prix: De petits bijoux qui nourrissent les détails et l’authenticité de La Fille dans le placard, puisque l’auteure y parle de ses voyages. «Je remercie ma professeure de m’avoir obligé à les écrire!» Aujourd’hui, Chantal n’a plus besoin de sa professeure pour la «forcer» à écrire, puisqu’elle procède désormais à la révision du Tome 2 de La Fille dans le placard…
Alors, si vous êtes séduit par la plume de Chantal et le personnage de Maxime, vous aurez l’occasion de les retrouver pour un second ouvrage à paraitre à l’automne 2016. Et lançons l’idée: une adaptation cinématographique, pourquoi pas?
La Fille dans le placard (Tome 1) de Chantal Brunette, publié aux Éditions Libre Expression. www.edlibreexpression.com