Jeudi, 12 décembre 2024
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    Julie Antoine : Rencontre avec la nouvelle DG du RLQ

    Depuis Avril dernier, Julie Antoine occupe le poste de directrice générale au sein du RLQ – Réseau des Lesbiennes du Québec, organisme de défense de droits actif depuis 1996, s’adressant aux femmes de la diversité sexuelle québécoise. Si Julie ne possède aucune implication postérieure à l’emploi auprès de la communauté, c’est sa détermination naturelle et son désir de transmettre des valeurs fondamentales à sa fille, qui la mènent à insuffler une vision nouvelle à l’organisme. Diplômée en art-thérapie, la jeune femme de trente ans, née de parents français, compte bien changer le monde par l’art, ou du moins, utiliser une approche artistique afin de démystifier les réalités des femmes de la diversité sexuelle. RENCONTRE.

    Qu’est-ce qui t’a menée à faire le saut dans le milieu communautaire?

    Mon métier, c’était l’art-thérapie et rien d’autre, mais la vie nous réserve souvent bien des surprises. À la fin de ma maîtrise, j’ai eu plusieurs questionnements en lien avec mon avenir. L’art-thérapie est méconnue et il y a peu d’emplois sur le marché du travail qui valorisent ce titre. J’ai donc erré sur le marché du travail en attendant un poste. Puis, je suis tombée sur l’annonce du RLQ et ma famille m’a poussée à postuler. Je n’aurais jamais pensé être retenue, mais comme je l’ai dit, la vie nous réserve des surprises.

    À ceux qui disent qu’il n’y a aucun problème d’acceptation du lesbianisme en 2017, que réponds-tu?

    Que ce n’est pas vrai, sinon le RLQ n’existerait pas! Il y a encore du travail à faire. Le jour où on va atteindre une égalité de faits et de droits, notre mission sera accomplie. Pour l’instant, ce n’est pas le cas. Il y a beaucoup de discrimination au sein même de la communauté LGBT envers les femmes de la diversité sexuelle, et bien sûr, dans la population en général. Par exemple, j’ai des amis qui ont réagi négativement à mon homosexualité. Par la suite, ils ont accepté, mais ils ont de nouveau mal réagi lorsque j’ai eu un enfant avec ma conjointe.

    Par réaction négative, est-ce que tu veux dire la phobie de la « lesboparentalité »?

    Exactement. Des commentaires du genre «vous êtes deux femmes, il va manquer un père à l’enfant». Mais lorsque je parlais avec eux, je leur ai exposé ma vision: celle des valeurs. On a tous des modèles familiaux hétéroclites et je pense que les valeurs primordiales pour élever un enfant ne sont pas en lien avec un sexe, mais bien avec l’amour qu’on est capable de donner.

    Quel est le rôle du RLQ au sein de la faune des organismes LGBTQ+ et à qui s’adresse-t-il?

    Il s’adresse à toutes les femmes de la diversité sexuelle. Par rebond, aux hommes également, car nous faisons de l’éducation populaire. Démystifier autant chez l’homme que chez la femme. Le fait de mieux comprendre l’autre peut diminuer les préjugés et l’intimidation. Le RLQ fait aussi de la défense de droits, car les femmes de la diversité sexuelle manquent de visibilité et on a beaucoup de difficulté à se faire voir au niveau des politiques et même au niveau du gouvernement, où il y a une minorité de femmes.

    Quels sont les principaux défis pour diriger un OSBL de plus de 20 ans d’histoire?

    Il y a plusieurs défis, car justement, il y a de l’histoire. On vit aujourd’hui avec une réalité d’hier et une réalité future. Il faut donc être concordant avec ce qui a jadis été et ce qui doit advenir dans le futur, puis toujours se réadapter aux différentes problématiques qui surgissent; être vifs sur nos actions, tout en étant concertés. L’important est de promouvoir les initiatives des femmes de la diversité sexuelle et non pas se promouvoir en tant que personne. C’est important de voir plus loin. Je pense souvent aux Premières Nations, qui disaient que lorsqu’on pose un acte, on doit penser à la génération future, afin de prendre en compte les répercussions qui vont advenir.

    Justement, comment regrouper les réalités/préoccupations des femmes de la diversité sexuelle de tous les âges?

    L’écoute. Être attentive à ce que les gens disent et être capable de cibler et d’englober. Comme le propose la figure gestaltiste qui englobe le fond et la forme. En fait, lorsqu’on fixe un point, on voit la forme, mais on oublie le fond et lorsqu’on voit juste le fond, on oublie la forme. C’est prendre l’idée globale, voir la personne dans un tout, mais ne pas oublier la personne du tout.

    Le RLQ a organisé avec le CSL la Journée de visibilité lesbienne ce printemps. Qu’en est-il de cette visibilité en 2017?

    Nous ne sommes pas assez visibles et avons tendance à nous isoler. J’observe, depuis mon entrée en poste, que les femmes ont peur de se monter du fait de nos anciens schémas. On a souvent appris à souffrir seule, à cacher nos faiblesses. J’ai l’impression qu’on tait nos malheurs. De ce fait, on demeure plus isolées et cachées. Par exemple, le nombre de femmes qui se font battre et violer et qui ne sont pas entendues me désole beaucoup. Certes, plusieurs ne le disent pas, mais ce n’est pas parce que c’est caché que ça n’existe pas.

    Sur quels projets travaillez-vous actuellement au RLQ?

    On travaille sur plusieurs projets avec une équipe active et pluridisciplinaire. Cette année, nous allons publier notre deuxième recueil de nouvelles lesbiennes, créer une bande dessinée (un échantillon fut distribué lors de la L Marche que nous avons organisée en août dernier). On a fait la course capotée avec RÉZO et le 9 septembre, nous ferons le bateau dragon au profit de l’Astérisk. C’est important de s’entraider entre organismes, car ensemble on est plus forts! Au niveau politique, on a envoyé une lettre au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, afin qu’ils changent leur nom (francophone) pour être plus représentatifs et inclusifs de la population. C’est important de valoriser les droits des femmes de la diversité sexuelle, mais il faut d’abord faire valoir les droits des femmes, car si elles perdent leurs droits, la diversité sexuelle perdra les siens aussi. Nous faisons aussi des capsules vidéos afin de promouvoir les femmes de la diversité sexuelle et leurs actions, pour donner des modèles aux femmes.

    La question du modèle lesbien revient souvent. Pourquoi y a-t-il si peu de femmes de la diversité sexuelle qui s’affichent dans les médias grand public?

    J’ai l’impression qu’être lesbienne, ce n’est pas in. Déjà, être une femme, ce n’est pas in… Je pense qu’il y a beaucoup de préjugés et qu’on doit se réactualiser au niveau de l’image de la lesbienne, transformer cette image. Je crois que c’est pour ça que les femmes s’affichent peu publiquement. Ariane Moffatt a fait son coming out, un peu en lien avec ses enfants aussi… J’ai l’impression que la femme fait beaucoup pour l’autre.

    Une directrice générale doit avoir une vision pour l’organisme qu’elle chapeaute. Où vois-tu le RLQ dans 5 ans?

    J’aimerais qu’on ait une présence plus importante au niveau politique, tout en étant aussi reconnu et respecté que d’autres acteurs importants de la communauté LGBT. J’aimerais qu’on ait une tribune plus importante au niveau des médias et que le RLQ ait une portée nationale. Ensuite, j’aimerais que l’organisme ait un volet international, de style aide humanitaire.

    Et l’art-thérapie dans tout ça?

    On devient ce qu’on a appris. C’est certain que ma formation en art-thérapie et en psycho fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Ça m’aide à être à l’écoute, à mieux comprendre et à mettre en perspective. L’art fera toujours partie de ma vie et je pense que c’est par l’art aussi que les femmes peuvent prendre leur place. Nous aimerions que le RLQ aille vers des actions plus artistiques, parce que si on ne veut pas parler de nous ou même nous voir, l’art peut devenir un moyen d’expression. Les gens ne peuvent faire fi de l’art. L’art est partout et si on décide de prendre la rue par l’art, nos actions artistiques ne pourront plus être ignorées, car il y aura toujours une communauté qui verra les actions politiques prodiguées par l’art.

    Samedi 9 septembre, le RLQ vous invite à pagayer dans son bateau dragon au profit de l’Astérix. facebook.com/events/1381699921916371

    Pour devenir membre du RLQ, visitez le site web afin de remplir l’adhésion en ligne: www.rlq-qln.ca Les bureaux du RLQ sont ouverts aux membres le mercredi de 13h à 16h.

    Vous pourrez ainsi participer aux tirages mensuels de l’organisme effectués sur leur page Facebook: facebook.com/RLQQLN

    Vous désirez participer aux capsules vidéos du RLQ afin de témoigner de vos engagements et faire entendre votre voix? Écrivez à [email protected]

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