Un curieux vide juridique a permis à plus de 200 couples de même sexe de braver l’interdiction de se marier en Chine pour s’unir par visioconférence dans le très conservateur État américain de l’Utah.
Par un discret bouche à oreille sur les réseaux sociaux chinois, la ville américaine de Provo, dans le conservateur État de l’Utah, est devenue populaire auprès des couples gais et lesbiennes de Chine. Au moins 200 couples de même sexe y auraient célébré leur mariage, raconte The Guardian, malgré l’opposition aux droits LGBTIQ+ de la part du régime de Pékin. Et tout ça… sans même devoir voyager.
Michael Foley, un officiant assermenté, témoigne qu’il a désormais l’habitude de se lever à 3h du matin pour célébrer des unions de l’autre côté du Pacifique (et se recoucher aussitôt). Il le fait devant son écran d’ordinateur, via une session Zoom. C’est tout ce qu’il y a de plus officiel: la procédure a été lancée pendant la pandémie de Covid et maintenue depuis lors dans ce comté où une lacune législative permet d’enregistrer des unions à l’étranger.
Émotion sans effusions
Le journal britannique raconte le cas de Shin, habitante de Xi’an qui s’est mariée en juin avec sa compagne lors d’une petite cérémonie strictement privée. «On l’a fait à la maison, parce qu’en public, c’est illégal. On a invité nos familles et ami·e·x·s au meeting Zoom et décoré la pièce. C’était super mignon.» Leur contrat n’a évidemment aucune valeur en Chine même, mais il peut être reconnu à Hongkong et ailleurs – même si les voyages sont encore difficiles en raison de l’implacable politique «zéro Covid».
Le symbole est fort pour ces couples. «Il n’y a généralement pas de grandes effusions, remarque Foley, mais ce qui transparaît c’est l’impression de ‘Enfin, on y est arrivé·e·s!’». La démarche est rapide et relativement accessible: 100 dollars américains pour la paperasse et la vérification de l’identité des époux·se·s.
Un régime hostile, mais une société qui change
Longtemps tolérées, les revendications LGBTIQ+ sont largement réduites au silence en Chine, où même les références à l’homosexualité sont bannies des réseaux sociaux, obligeant les internautes à utiliser des codes comme «meilleur ami·e·s» pour désigner leur partenaire. Mais la société, elle, évolue. «De nombreuses personnes de ma génération sont favorables, et des personnes plus âgées disent de plus en plus que c’est ok d’avoir des enfants et des ami·e·s gai·e·x·s», assure Shin, qui se dit confiante que l’État finira par protéger les droits des personnes LGBTIQ+.