Vendredi, 4 octobre 2024
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    Some Like It Hot, la petite histoire de la grande comédie

    En 1959, le grand écran est pris d’assaut par Some Like It Hot (Certains l’aiment chaud), une comédie qui se révélera un tel succès qu’elle se classera éventuellement en première position de la liste des 100 meilleures comédies de la American Film Institute. La petite histoire du film est cependant bien plus complexe et déjantée qu’on ne pourrait le croire.

    Afin de faire toute la lumière sur la production chaotique du film, Matt Baume propose une vidéo de près de 60 minutes sur sa chaîne spécialisée dans l’histoire queer des productions télévisuelles et cinématographiques (il faut également voir l’excellente vidéo sur le film The Rope [La corde] d’Alfred Hitchcock). C’est l’occasion de révéler les secrets d’alcôves d’un film pour le moins improbable à une époque où la censure imposée par le Motion Picture Production Code (le Code Hayes) bat toujours son plein, alors même que la prémisse du film met en scène deux hommes qui se travestissent en femmes.

    Le réalisateur et scénariste Billy Wilder se base sur le scénario de Fanfare d’amour, un film français de 1935, dans lequel deux musiciens se travestissent pour intégrer un orchestre féminin. Le film connut un tel succès en Europe qu’il fut adapté en plusieurs langues, dont une version allemande de laquelle Billy Wilder s’inspira librement. Il y avait longtemps que l’idée d’un film abordant l’univers drag lui trottait dans la tête, mais Wilder avait été échaudé lors de la production du film The Lost Weekend (Le poison ou Le week-end perdu) lorsqu’on lui avait imposé d’hétérosexualiser le personnage principal. Le projet d’un film comportant de forts éléments drags était donc pour le moins risqué dans l’Amérique puritaine des années 50 et le scénario a donc dû être peaufiné afin de bien établir que les deux hommes n’avaient « absolument » aucun autre choix que de se travestir. D’où l’idée qu’ils aient été témoins d’un crime crapuleux, nécessitant de camoufler leur identité pour ainsi sauver leur vie. La recherche d’acteurs fut également complexe puisque plusieurs (dont Frank Sinatra) craignaient de voir leur carrière s’écrouler s’ils étaient associés au moindre soupçon d’homosexualité : c’est finalement Tony Curtis et Jack Lemmon qui acceptent de chausser des talons hauts. Ils font face à une sémillante Marilyn Monroe qui voit en ce film la possibilité d’échapper au cliché de la blonde écervelée que les studios s’évertuent à lui coller à la peau.

    Afin d’initier les acteurs à l’art de la personnification féminine, le réalisateur fait appel à Barbette (Vander Clyde Broadway), une artiste drag de music-hall originaire du Texas, mais qui fait carrière à Paris (et qui pourrait avoir inspirée le personnage emblématique du film Victor Victoria). La production ne fut pas de tout repos avec un scénario qui s’écrivait au fil du tournage, une Marylin Monroe mentalement instable et enceinte de Tony Curtis, un budget de plus en plus étriqué et la National League of Decency qui manifeste déjà contre le film. Matt Baume s’étend également sur la croustillante anecdote voulant que Tony Curtis ait déclaré qu’« embrasser Marilyn Monroe, c’était comme embrasser Hitler ».

    À noter que la célèbre réplique finale — « Well, nobody’s perfect (Eh bien… personne n’est parfait !) » — prononcée par Osgood, le prétendant de Daphnée (Jack Lemmon), lorsque celle-ci lui révèle être un homme, n’était au départ pas destinée à conclure le film. Son caractère à la fois désopilant et irrévérencieux l’a cependant propulsée dans cette position et a depuis lors acquis un statut de réplique culte. À la cérémonie des Academy Awards de 1960, le film est mis en nomination dans six catégories et remporte l’Oscar des meilleurs costumes. Il faudra attendre 1994 pour que le même prix soit attribué à un film portant à nouveau sur l’univers drag avec The Adventures of Priscilla, Queen of the Desert (Les Aventures de Priscilla, folle du désert). Produit sans l’autorisation du Motion Picture Production Code, le succès du film annonce l’inéluctable fin de son emprise sur le milieu du cinéma : son application cesse complètement en 1968.

    INFOS | SOME LIKE IT HOT: Secrets, Scandals, and Marilyn’s Mystique / chaîne YouTube de Matt Baume.

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