Dimanche, 3 novembre 2024
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    Juin en 40 ans de Fugues, gais des villes et gais des champs !

    Les pages du mois de juin de Fugues ont toujours été synonymes de planification de vacances estivales. Au fil du temps, le regard sur les destinations a cependant changé et est un bon indicateur de l’évolution de nos centres d’intérêt, mais également de l’ouverture progressive de certains pays au tourisme gai.

    Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les chroniques touristiques ne sont pas un phénomène récent puisqu’on en retrouve dès le premier numéro de la toute première publication québécoise s’adressant aux communautés LGBTQ. En 1971, soit deux ans à peine après la décriminalisation de l’homosexualité au Canada, la revue Le Tiers propose ainsi un reportage vantant les mérites de Fire Island (« Quelque part ailleurs : L’île de feu ») qui était alors reconnue comme LA destination gaie par excellence.

    Dans les années 80, les revues Berdache, Sortie et Fugues portent leurs regards vers les grands classiques du tourisme, que l’on soit hétéro ou queer : Mexico, Londres, La Nouvelle-Orléans (« Carnaval, mardi-gras, carnaval », Le Berdache, mars 1982), Boston, la Thaïlande, San Francisco, New York, Philadelphia, Las Vegas, Acapulco ou Cuba.

    Très tôt s’impose cependant un joueur qui deviendra récurrent parmi les destinations les plus prisées : Provincetown (« Provincetown 1993 vous attend… », mai 1993 ; « Provincetown : le pèlerinage annuel », 2002). Dès 1984, le titre d’un article du Berdache établit d’ailleurs très clairement sa réputation de Mecque gaie : « Tappettetown, Mass » (août 1984).

    Rapidement, les suggestions de voyages à l’extérieur du pays se voient entrecoupées de destinations favorisant les autres provinces canadiennes, avec en tête de file les villes de Vancouver, Ottawa et Toronto. Au Québec, l’accent est mis sur les campings gais, et ce, dès le début des années 80. Ainsi, dès juillet 1986, Fugues publie un lot d’articles vantant les mérites du Domaine Gai Luron et du Domaine Plein Vent. Cette mise en valeur se poursuivra invariablement au fil des ans, preuve incontestée de son grand succès : « Les campings gais au Québec : quand les gais des villes se transforment en gais des champs » (2000) ; « Pour le plein air et la convivialité : tout ce qu’il faut savoir sur les campings gais » (2003).

    Progressivement, Montréal et les différentes autres régions du Québec sont également mises à l’honneur : « Venez faire un tour chez nous ! » (1995) ; « Votre été à Montréal » (juillet 1996) ; « Hébergements, bars, cafés et restos : les gais espaces en région » (2000) ; « Le tourisme gai dans la région de Québec » (décembre 2000) ; « Les Îles-de-la-Madeleine : dépaysement total garanti » (août 2001).

    Un phénomène urbain s’impose également à partir du début des années 2000, celui des terrasses : « Les terrasses dans le Village :  “sortir” à l’extérieur » (2003). On assiste aussi à l’apparition progressive de sorties organisées dans certains lieux montréalais : « La Ronde présentera cet été son premier “gay day” officiel » (2003). À noter l’utilisation du mot « officiel » dans le titre de l’article, qui est bien indicatrice que de tels événements existaient déjà jusqu’au moment où le parc d’attractions réalise le potentiel marketing d’en faire un événement formel.

    L’année 2000 voit également le début d’une tradition maintenant bien implantée, celle du Festival des arts : « Le premier Festival des arts du Village : un Village plus artistique ! » (2000). Éventuellement, des destinations plus exotiques font leur apparition dans les pages de Fugues, comme Mykonos (1999) ou l’Islande (septembre 2001), de même que le phénomène des croisières : « Les croisières gaies et lesbiennes : et vogue le navire » (janvier 1999) ; « Splash! La croisière s’amuse ! » (juillet 2001). On remarque également l’apparition de certains pays autrefois considérés comme peu accueillants ou sécuritaires au rythme d’une plus grande libération sociale, économique et culturelle de ces derniers : « L’ex-Yougoslavie se modernise : la Croatie et la Slovénie à l’heure de la Fierté » (septembre 2002).

    Évidemment, on ne peut évoquer les attraits touristiques de la saison estivale sans mentionner l’immense pouvoir d’attraction que constitue la célébration de la Fierté gaie, que ce soit au Québec ou ailleurs dans le monde : « Un village qui s’ouvre : le tourisme gai en pleine expansion » (octobre 1996) ; « Tourisme gai : Montréal, ville ouverte ! » (juillet 1999) ; « Tourisme gai : des retombées économiques de 40 millions de dollars pour les fêtes de Divers/Cité » (janvier 2001), mais ce sujet sera plutôt abordé dans la prochaine édition de Fugues, soit celle du mois de juillet.

    Ailleurs dans l’actualité
    Toute incursion du passé serait incomplète si on ne bifurquait pas vers des passages moins glorieux. Ainsi, l’Evening Star de 1869 présente deux événements notables : le 8 juin, on y relate des « crimes dignes de Sodome et Gomorrhe » se déroulant dans la boutique d’un certain Moïse Tellier (« An Abominable Assault ») alors que le 11 juin, on se penche sur une arrestation policière dans un bar homosexuel clandestin (« Another Wretch »).

    Le 30 juin 1886, La Presse décrit les activités de drague se déroulant de nuit au Champ-de-Mars, à Montréal, où « on voyait glisser […] des êtres longs, efflanqués, aux jambes effilées, se dandinant avec des airs efféminés, toussant, s’appelant sur des tons doucereux »
    (« L’association nocturne », p. 4).

    Le 2 juin 1962, l’intarissable Ici Montréal annonce que « La guerre est ouverte aux fifis dans le Nord : guerre aux tapettes à St-Jérome, » alors que le 16 juin de la même année il se réjouit à l’effet que « L’autre matin (3 h a.m.), deux efféminés ont été arrêtés parce qu’ils s’embrassaient, au coin de la Main et de Ste-Catherine » (pour info, les deux hommes ont été condamnés à des peines de prison).

    Une semaine plus tard, le 23 juin, il révèle que : « Il y a longtemps que le Colonial Turkish Bath est un refuge d’“homos”. » Nul doute que la fréquentation de ce sauna montréalais a dû connaître une hausse spectaculaire de fréquentation après cette publication. Finalement, la revue Pop jeunesse rock du 28 juin 1975 consacre un article sans aucun doute édifiant sur LE sujet de l’heure : « La rage du rock bisexuel ».

    Le journal La Presse est disponible sur BAnQ numérique (https://numerique.banq.qc.ca/).
    Le Berdache est disponible sur le site des Archives gaies du Québec (https://agq.qc.ca/le-berdache/).

    Note : Lorsqu’une référence ne précise pas le titre du périodique associé à un article, c’est qu’il s’agit de Fugues et lorsque le mois n’est pas mentionné, c’est qu’il s’agit de juin.

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