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    S’aimer dans la grande ville

    La métropole ici évoquée est Séoul, en Corée du Sud, et les amours sont ceux de Young, un jeune étudiant et écrivain. Entre colocataire déjantée, amant honteux, mère autoritaire et maladie occultée, l’auteur partage le récit d’un homme qui tente de s’extirper du marasme d’une société à la fois moderne et corsetée. Salué par la critique, le roman fut nommé dans la sélection 2024 du Booker Prize et du prix Médicis étranger.

    Présenté en quatre segments, S’aimer dans la grande ville explore l’amour à travers différents prismes — platonique, familial, passionnel et amour de soi — et des enjeux moraux surannés qui y sont toujours accrochés. À titre d’exemple, Jaehee, sa coloc, doit faire croire que Young est une femme afin d’éviter le scandale d’un appartement partagé avec un homme. On se croirait presque dans le scénario d’une comédie de situation des années 70 à la Three’s Company.

    Nulle surprise donc que d’être confronté à une société marquée par des valeurs bien-pensantes où le déni de la réalité et une homophobie sournoise vont souvent de pair. Young se remémore ainsi l’institutionnalisation imposée par sa mère après l’avoir surpris à embrasser un garçon. Son conjoint, pourtant très instruit et plus âgé, ressent alors un sentiment de honte au regard de sa « condition homosexuelle ». La débridée Jaehee décide quant à elle de se ranger en épousant un homme qu’elle apprécie tout au plus, puisque c’est la chose à faire. Le diagnostic de séropositivité de Young est entouré du plus grand secret puisqu’on ne parle pas de ces choses-là et sa mère refuse d’accepter un diagnostic de cancer.

    Comme l’auteur le souligne dans la postface, « Young, le narrateur des quatre textes […] est à la fois le même et quatre êtres différents. Il est à la fois moi qui écris ce texte ici et maintenant, quelqu’un de très éloigné de moi, quelqu’un que vous connaissez bien, ou même une part de vous-même trop pesante que vous cherchez à ignorer. »

    Suivant le principe de l’autofiction, certains événements sont à peine évoqués dans l’un des récits pour ensuite être développés dans un autre, des années plus tard, alors que le narrateur est enfin prêt à s’y confronter. Le roman présente un portrait immersif de la société sud-coréenne et une réflexion troublante sur l’amour, tout en offrant au lectorat une fenêtre inédite sur la culture gaie.

    INFOS | S’aimer dans la grande ville / Sang Young Park. Paris : La Croisée, 2024, 237 p.

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