Plusieurs films d’ici et internationaux étaient en compétition pour des prix tels que Meilleur Long Métrage, Meilleur Documentaire, Meilleur Court Métrage, Meilleur Court Métrage Canadien et le Prix Voix Émergente. Un jury composé de représentant.e.s de festivals et de producteur.rice.s a attribué les distinctions suivantes…
PRIX DU JURY
Le long métrage de Fawzia Mirza, THE QUEEN OF MY DREAMS a remporté le GRAND PRIX DU JURY. La réalisatrice a aussi remporté le prix de la meilleure réalisation.
Cet hommage à Bollywood et aux liens intergénérationnels est un plaisir des yeux et du coeur couleur bonbon qui remonte le temps, provoque d’énormes sourires et de grands rires tout en abordant les thèmes résonnants des rôles imposés par genre, du racisme passif et des changements sismiques qui accompagnent le fait de grandir. Azra (la superbe Amrit Kaur) vit un bonheur sexuel avec sa petite amie à Toronto dans les années 90 lorsqu’elle reçoit la nouvelle de la mort de son père. Un plan de coupe voltaïque plus tard et on la retrouve dans un avion direction le Pakistan, pour assister aux funérailles de son père avec son frère (Ali A. Kazmi), où sa mère (Nimra Bucha de Mme Marvel) pinaille et sa culture l’exclut du processus de deuil. Un autre plan et nous sommes à Karachi en 1969, emporté par la romance éclair de la mère de Azra qui enfreint les règles (également jouée par Amrit Kaur, soulignant les parallèles mère-fille) et son père fringant (Hamza Haq) avant leur difficile transition vers la Nouvelle-Écosse de 1989. Chaque saut temporel fait ressortir une autre couche de la façon dont la dynamique familiale d’Azra est née. The Queen of My Dreams est, en soi, le rêve d’un·e cinéphile, regorgeant de visuels époustouflants, d’une belle qualité de production et d’une mode fantastique. Illustrant comment le salut peut provenir de sources improbables, et de manière improbable.
Du côté des documentaire, le film BULLETPROOF: A LESBIAN’S GUIDE TO SURVIVING THE PLOT de Regan Latimer a conquis le jury.
Attention spoiler : si vous regardiez la télévision au printemps 2016, il y a de fortes chances que vous ayez été témoin du pic de popularité de la tendance Bury Your Gays. Les femmes LGBTQ+, de Tara de Buffy à Lexa de The 100, ont pris la hache et dans cet exposé brillant enquêtent sur cette tendance consternante et le changement radical qui en a résulté. Au gré d’allers-retours entre Toronto et autres pôles culturels comme L.A. et Londres, Bulletproof déroule son intrigue à la manière d’un grand mystère. Il y a les victimes : des personnages féminins queer. Les meurtriers : des scénaristes de télévision, des showrunners et producteurs tourmentés qui, pour une myriade de raisons expliquées dans le documentaire, ont choisi de tuer les personnages favoris des fans à l’écran. Et puis il y a les détectives : un « réseau arc-en-ciel » de journalistes, de psychologues des médias, de dirigeant·e·s de communautés de fans et bien d’autres qui analysent les catalyseurs et impacts des représentations changeantes queer. Ceci est sans parler de la documentariste elle-même, Regan Latimer, accro à la télévision, « gay comme l’enfer », qui est alors à la sixième année de ce qui était censé être un projet d’un an, et qui sème dans ce film des révélations personnelles, sociétales et scientifiques aux côtés de la sage, Lindy Zucker, son substitut à l’écran. Grâce à des références et à des animations percutantes, Bulletproof prouve que la représentation peut être un enjeu de vie ou de mort et que la fantaisie peut parfois être aussi essentielle que la réalité.
Côté courts, le film canadien, LE FLOU DES ARBRES de Fanny Perreault a particulièrement plus au jury, de même qu’ IF (যদি ) de Tathagata Gosh.
Deux jeunes femmes sont incarcérées dans une forêt sécurisée du Nord québécois et sont soumises à des travaux de reboisement forcé. Confrontées à l’instrumentalisation de leur corps et à un contrôle insidieux de ce dernier, elles profitent du peu d’espace de liberté qu’elles arrivent à créer avec l’aide d’une agente carcérale particulièrement empathique à leur égard.
Le jury a également tenu à souligner la qualité exceptionnelle de d’autres films de la compétition par des MENTIONS SPÉCIALES.
C’est le cas du long métrage BABY de Marcelo Caetano;
À São Paulo, un beau gosse de 18 ans, tout juste sorti de prison, et un dieu grec, prostitué et petit dealer, qui pourrait être son père, entretiennent une relation aussi âpre que tendre. Un film fiévreux et émouvant. Couronné à la Semaine de la critique du Festival de Cannes, Baby déjoue toutes les attentes en n’étant jamais là où on l’attend. Ni sentimental, ni misérabiliste, ce portrait superbement filmé d’un couple désassorti montre avec force et finesse toutes les nuances d’un monde de marginaux brésiliens – drags flamboyantes, reprises de justice et paumées ordinaires qui tentent de survivre dans l’implacable mégapole brésilienne. Avec, comme cœur battant, cette histoire érotique et tendre entre deux êtres écorchés qui entretiennent autant un rapport sexuel qu’amical et presque filial. Dans les rôles principaux, João Martino Mariano et Ricardo Teodoro sont bouleversants, le premier tout en sensualité sauvage et le second, en puissance à fleur de peau. Ce second long métrage de Marcelo Caetano confirme tout le talent qu’on pressentait avec le premier, Body Electric
De la performance de Michaela Kurimsky et Elle-Máijá Tailfeathers pour SWEET ANGEL BABY (un film de Melanie Oates);
C’est bien connu : les secrets ne restent jamais cachés bien longtemps dans les petites villes. Contrairement aux autres habitant·es d’un village de pêcheurs en Terre-Neuve-et-Labrador, Eliza mène une double vie : elle explore la photographie transgressive tout en manoeuvrant une idylle tacite avec une femme bannie et l’insistance des avances d’un homme marié. Les ouï-dires ne sont qu’à quelques pas… En se faufilant parmi les voisins, Eliza (Michaela Kurimsky) met en scène des séances photo de plus en plus révélatrices dans des endroits à la fois éloignés et proches de chez soi, peut-être trop proches parfois. À chaque nouvelle publication adressée à ses 318 000 abonné·e·s sur Instagram, elle met en péril l’équilibre délicat qu’elle a su bâtir entre sa coexistence avec d’autres villageois·es, sa romance naissante avec Toni (Elle-Máijá Tailfeathers) et l’homme marié (Peter Mooney) dont le désir pour elle titille autant qu’il terrifie. En tant que collectrice de fonds pour l’église, elle aide à organiser les démarches, tout comme les ragots, et des choix se font qui pourraient la briser à jamais. Tour à tour pervers et bienveillant, le deuxième long métrage de Melanie Oates explore nos êtres les plus dément·e·s avec une complexité qui continue de s’approfondir jusqu’au cadre final saisissant. Tout en incarnant un véritable sentiment d’appartenance, dépeignant les côtes râpeuses et les personnalités pleines d’entrain de l’un des endroits les plus isolés et les plus spectaculaires du Canada.
Et du scénario du film LANGUE ÉTRANGÈRE, signé Claire Burger avec la collaboration de Léa Mysius.
En arrivant en Allemagne chez sa correspondante Lena, Fanny semble être de trop dans cette maison. Lena, au caractère pointu et intimidant, face au malaise et à la timidité de Lena décide tout de même de faire visiter sa ville et ses endroits de prédilections à Fanny. Petit à petit, des liens se tissent. Des sentiments forts s’immiscent dans la vie des deux jeunes filles, qui doivent chacune faire face à des figures parentales bancales. Entre secrets, champignons enrobés de chocolat, expérimentations sexuelles, affiliations aux mouvements de protestation Antifa et Black Bloc : chaque tentative de connexion devient plus audacieuse que la précédente, leur « amitié franco-allemande » reflétant les affrontements houleux de notre époque. Sur fond de toile allemand, c’est Fanny qui s’exprime, mais à Paris, Lena prend toute sa place. Langue étrangère nous plonge au cœur d’un moment crucial dans la vie de ces deux jeunes qui tentent d’exister au-delà d’elles-mêmes, de trouver un refuge, de tout exploser, de révolutionner et de hurler, tout en s’efforçant de garder l’apparence et un semblant de raison.
En partenariat avec Fierté Montréal, un premier prix VOIX ÉMERGENTES a été remis au court métrage de Fanny Perreault LE FLOU DES ARBRES.
Bravo à toustes les lauréat⋅es et les équipes des films pour leur travail
Le jury était composé de :
JENNA DUFTON
Jenna Dufton, directrice de la programmation à Inside Out, où elle est reconnue pour son talent de curatrice dans les festivals LGBT2SQ+ de Toronto et d’Ottawa depuis 2015. Elle est également chargée de la programmation à St. John’s International Women’s Film Festival, le plus ancien festival de films de femmes du Canada. Elle compte à son actif de programmatrice des expériences à OUTeast, à l’Atlantic International Film Festival, Viewfinders Film Festival for Youth, et la conférence “Making Waves” de WIFT-AT.
LARRY HU
Larry Hu (胡启鸿) est à la fois membre du conseil d’administration et directeur par intérim du Festival du Film Queer de Beijing, le plus ancien festival de cinéma queer de Chine et le seul à encore exister aujourd’hui. Né en 1996, Larry est diplômé du Centre de Recherche du Film de Chine (China Film Archive), avec une étude portant sur la satire dans les films pendant l’ère Mao et ses influences soviétiques. Il a travaillé comme créateur de contenu et programmateur pour le Festival International du Film Documentaire de Guangzhou, le Festival International du Film de l’île Hainan, et le Festival International du Film de Pingyao.
ANDREW NOBLE
Andrew Noble est un producteur, distributeur et agent de ventes passionné par le cinéma. Fondateur de Noble Arts Inc., une société innovante, il développe, produit et distribue des longs métrages, contribuant activement au rayonnement du cinéma canadien. Andrew a produit plusieurs longs métrages et documentaires qui témoignent de son engagement envers des récits captivants. Ancien président fondateur du RDIFQ, un groupe de lobby pour la distribution indépendante, il siège sur divers conseils d’administration et agit également en tant qu’agent d’artistes.
Il n’est pas trop tard pour découvrir certains des films présentés à image+nation37. Une sélection de films peuvent encore être vus jusqu’au 8 décembre. Pour la liste voir sur le site du festival au https://image-nation.org