Après un exil de 23 ans, Desiree réalise qu’il est temps de remettre les pieds dans sa ville natale et de se colleter à la première relation dysfonctionnelle qui a marqué son enfance : son père. Un défi de taille puisque, lorsqu’elle a quitté l’Alabama, elle se présentait comme un homme et qu’elle est maintenant une femme trans.
Tous les ingrédients sont sur la table pour générer un savoureux jeu de discorde et de remises en question : une petite ville conservatrice, un fossé générationnel béant, de grandes disparités culturelles et sociales, une peur du changement ou du rejet et une gamme de personnages tous plus excentriques les uns que les autres. Pourtant, la sauce ne prend jamais vraiment et, malgré un sujet résolument moderne, la série donne plutôt l’impression de pasticher un modèle télévisuel éculé depuis déjà plusieurs décennies.
En effet, l’intention semble être d’émuler certaines des séries à succès des années 70, comme All in the Family ou Maude, où un humour mordant est au service d’une remise en question de codes sociaux sclérosés. Malheureusement, cet objectif n’est jamais vraiment atteint, en particulier au regard de la relation entre Desiree (scintillante Laverne Cox) et son père (George Wallace). La montée dramatique autour de la réaction de celui-ci se conclut en à peine quelques secondes, dans une scène où les enjeux émotionnels avoisinent le zéro absolu. Certes, il lui pose quelques questions, mais pas plus que si elle lui annonçait un changement de carrière.
Même chose du côté de son copain Louis (D.K. Uzoukwu) qui est profondément enfoncé dans le placard, alors que tout le monde et même sa mère s’en foutent complètement. Le même type de dynamique d’absence de tension dramatique revient continuellement tout au long de la série, à un point tel qu’on en vient à se demander pourquoi Desiree appréhendait de revenir dans sa ville natale alors que sa population, à de rares exceptions près, constitue un modèle d’amabilité.
Par ailleurs, la plupart des échanges ne semblent opérer que sur le mode des joutes de réparties cinglantes. C’est vaguement amusant au début, mais cette technique devient assez rapidement agaçante, puisque les réparties sont loin de faire mouche et qu’elles paralysent avant tout un réel développement psychologique des personnages.
La série n’est cependant pas sans mérite, puisqu’elle met en scène une relation assez intrigante entre Desiree et Mack (Jay Wilkison), un ex-prisonnier qui est lui-même père d’une jeune fille. De réels enjeux se présentent entre ces derniers, mais pas ceux que l’on pourrait croire. Cette relation constitue donc paradoxalement le point d’ancrage de la série et non pas celui que l’on nous annonçait en prémisse. Bref, une série qui promettait beaucoup, mais qui se révèle, au mieux, simplement sympathique.
INFOS | Les huit épisodes de Clean Slate sont disponibles, en anglais, sur Prime TV.