Lundi, 22 septembre 2025
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    Lyraël Dauphin, l’artiste derrière Claude l’infirmière d’Empathie

    Si Lyraël Dauphin vogue dans le monde culturel québécois depuis plus de 10 ans, l’artiste multidisciplinaire — qui fait de la télévision et du cinéma, mais aussi de l’écriture, de l’art visuel — a vu sa popularité augmenter par son interprétation de l’infirmière Claude dans la série Empathie, de Florence Longpré, diffusée sur Crave ce printemps.

    La série Empathie a connu un grand succès critique et populaire. T’a-t-on souvent apostrophée dans les dernières semaines ?
    Lyraël Dauphin : Oui. D’une manière tellement douce et belle. Je reçois tellement de témoignages d’amour de personnes de tous les horizons depuis que la série est sortie. J’ai quand même été dans plusieurs projets dans le passé, et là c’est vraiment celui qui résonne le plus émotionnellement. Les gens sont tellement attachés à la série. Il y en a qui me disent : « J’aimerais tellement que Claude me soigne ! » Je me fais reconnaître plus que jamais et ça m’étonne un peu quand même, parce que depuis le tournage, j’ai tellement changé dans la dernière année. On a tourné ça en juillet, et moi j’ai commencé mon laser après, les hormones continuent leur chemin, mes cheveux ont poussé comme de la mauvaise herbe, je trouve tellement que je ne me ressemble pas.

    Personnellement, beaucoup de mes proches m’ont indiqué que rarement ils n’avaient autant été investis dans une série québécoise…
    Lyraël Dauphin : Les gens me disent : « Je n’écoute pas beaucoup de télé québécoise, je me sens pas représenté, j’accroche pas nécessairement dans le rythme… » Pis là, tout d’un coup, c’est unanime, on me dit : « J’ai jamais autant été accroché à une série et engagé émotionnellement dans des personnages. » C’est vraiment la plume de Florence [Longpré] et la confiance qu’elle a donnée à tout le monde sur le plateau qui fait que ça rayonne autant. On s’est vraiment fait offrir des rôles en or et on s’est fait dire : « Ça t’appartient, fais-en ce que tu veux. » Donc, tout le monde a donné de l’amour à son personnage.

    J’imagine que tu as pu bénéficier de cette liberté ? Que tu as apprécié d’avoir les coudées franches pour jouer un personnage LGBTQ+ ?
    Lyraël Dauphin : Quand t’as un gars straight qui joue un personnage gai, il joue un personnage gai. Si t’as un gars gai qui joue un personnage gai, il joue tout sauf le personnage gai : il joue le personnage. Selon moi, ça ajoute tellement plus de dimensions d’avoir des vraies personnes queers. Moi, c’est mon cheval de bataille, c’est la chose que je vais le plus répéter dans ma vie. Cette idée-là de l’acteur qui se transforme n’avantage que les hommes blancs cis hétéronormatifs. On a des corps qui sont nos vaisseaux, qui nous aident à interpréter des choses d’une manière plus sensible et plus vraie. Ce n’est pas vrai qu’un homme straight va mieux jouer un personnage queer qu’une personne queer. C’est impossible, on va toucher à des canaux que ces personnes-là n’ont pas accès. Ça ne veut pas dire que ce ne sont pas de bons interprètes et ça ne veut pas dire qu’ils n’ont pas le droit de jouer ça.

    C’est juste une question de représentation et d’équité. Je me suis déjà fait refuser des rôles, en me faisant dire que c’est un rôle queer, mais que j’étais trop queer pour le rôle, et qu’ils préféraient avoir une personne straight-passing pour le jouer. Soyez amis avec des personnes queers, pis vous n’allez pas engager des personnes straight pour jouer des personnes queers. Ce rôle-là, il n’a tellement pas été écrit d’une manière stéréotypée. Il y a une scène où on parle de mon identité de genre, pis c’est fait. OK, Claude utilise « iel », super, c’est fini, on a une petite joke le fun bien écrite et drôle, j’ai eu l’espace de renchérir là-dessus dans la journée de tournage… Après, c’est fini : je suis juste l’infirmière qui est là et on n’a pas de drame sur mon identité. Ça fait du bien de sentir que j’ai une utilité et mon utilité, ce n’est pas d’être queer, mon utilité c’est d’être infirmière, c’est de pratiquer mon métier. Et dans ben des projets, mon utilité c’était d’être queer.

    Tu fais aussi de la consultation au développement de personnages LGBTQ+ pour des productions. Qu’est-ce que les créateurs ont (encore) besoin qu’on leur dise ?
    Lyraël Dauphin : Qu’est-ce qu’ils n’ont pas besoin qu’on leur dise ? Pour vrai, selon moi, il y a tellement d’angles morts chez les personnes hétéronormatives, cis straight. Je pense qu’il manque beaucoup d’empathie malheureusement. Les personnes qui écrivent une histoire souvent n’ont pas l’intérêt à cœur de comment nos histoires sont racontées et comment on est représentés. [Il y a des] erreurs qui sont continuellement répétées, comme de sensationnaliser la transition comme étant la chose la plus importante dans la vie d’une personne trans. C’est fou comment je suis célébrée pour les choses qui me rendent aussi détestable : mon intégrité et le fait que je speak up. Les gens straight et cis sont comme : « Omg, c’est tellement inspirant ton histoire, et tu es tellement belle et rayonnante ! », mais dès que je parle et que je dis « Ouin, non, ça, ça ne se fait pas », là tout d’un coup je deviens un ennemi, parce qu’il y a beaucoup d’égos et ils ont de la difficulté à accepter qu’ils ne font pas les choses d’une manière sensible.

    On t’a d’abord connue pour ta participation à la téléréalité Mixmania 2. Tires-tu de bons souvenirs de ton expérience ?
    Lyraël Dauphin : Pour toutes les personnes qui ont participé, c’est un trauma. Un trauma qui est quand même positif et qui a amené plein d’opportunités, mais il n’y a rien de normal à faire de la téléréalité quand tu es adolescent. C’est absolument anormal de voir des gens s’évanouir devant toi, pleurer ou te faire dire des choses absolument terribles comme : « Je veux un autographe de tout le monde, sauf toi. » C’est violent. Mais quelle expérience incroyable ! J’ai rencontré des gens que je vais aimer pour le restant de ma vie. C’est des souvenirs qui sont à jamais gravés dans ma mémoire. Mais est-ce que je pense que les choses devraient être faites différemment pour les jeunes qui font de la téléréalité ?
    Absolument. Comme avoir un suivi psychologique.

    Aussi, une des choses vraiment particulières par rapport à mon parcours, c’est que, si on regarde tous les projets que j’ai faits, on voit absolument ma transition étape par étape, ce qui est weird pour une personne trans, parce que généralement on n’a pas full accès [au] « avant » d’une personne trans, genre on découvre qu’elle fait de la télé quand elle a fait une « transition ». On a vu toutes mes phases. En même temps, c’est nécessaire. Je ne vais pas arrêter de travailler parce que je ne suis pas « au bout » d’une transition.»

    INFOS | La série télévisée EMPATHIE est financée, entre autres, par le FMC (le Fonds des médias du Canada). Les 10 épisodes sont diffusés sur CRAVE. Une seconde saison est déjà confirmée.

    On peut suivre Lyrael Dauphine via instagram
    https://www.instagram.com

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