Jeudi, 28 mars 2024
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    Risquer le changement

    Le président Obama va finir son second mandat sans majorité démocrate dans aucune des deux chambres du Congrès. Critiqué et politiquement affaibli, il aura au moins gagné une bataille, celle du mariage gai. Le président américain a lentement «évolué» sur la question du mariage gai. Et cette politique des petits pas, que plusieurs gais ont critiqué, est désormais saluée de toutes parts. Elle lui permettra, malgré les résultats électoraux des élections de mi-mandat du 4 novembre dernier, de rester dans l’histoire comme le président qui aura dit oui au mariage gai…

    Le tournant a eu lieu en mai 2012. Invité à un show du matin à la télé, le président déclarait alors : « À un moment donné, et à titre personnel, j’ai fini par me dire qu’il était important d’avancer et d’affirmer que, pour moi, les couples de même sexe doivent pouvoir se marier ». Barack Obama reconnaissait alors qu’il avait longtemps «hésité parce qu’il a pensé que les unions civiles seraient suffisantes», mais après des échanges avec des amis gais, avec sa famille, il a choisi de s’engager. L’annonce n’était que symbolique il est vrai, mais le pari était audacieux et même risqué. N’oublions pas que quelques mois plus tard, en novembre 2012, le candidat devait affronter une réélection tendue. Rarement dans l’histoire politique des États-Unis un président aura pris un risque aussi gros et rarement une prise de position présidentielle se sera traduite par une évolution aussi significative, et aussi rapide, de l’opinion publique. On le remercie bien bas…

    Il est vrai que la question divise encore nos voisins du Sud, mais une majorité d’Américains et de membres de la Cour Suprême pensent aujourd’hui comme lui. Les sondages confirment que l’opinion publique a basculé. Et la justice aussi. Avec une trentaine d’États, qui autorise désormais l’union de personnes de même sexe, le «mariage» est en train de se généraliser sur le sol américain. Si, à ce stade, il existe encore, comme le rappelle la presse, «fifty states of gay marriage» (cinquante nuances sur le mariage gai, comme autant d’États), la situation devrait s’unifier dans les prochains mois.

    Le vent du changement a soufflé aussi sur le monde des affaires. La révélation du patron d’Apple sur son homosexualité devrait permettre de bousculer le monde de l’entreprise encore trop discriminant. Les précisions sur ses orientations sexuelles n’ont rien de très surprenantes, l’homosexualité de Tim Cook était un secret de polichinelle dans l’industrie informatique et dans le milieu des communications. La surprise en revanche vient de la révélation publique qu’il a faite. Si cela est devenu plus banal de la part des célébrités, des athlètes sportifs professionnels et des politiciens, ce type d’annonce est extrêmement rare chez les leaders d’entreprises. Peu de leaders de grandes sociétés ont fait leur coming out. Tim Cook n’est pas n’importe quel patron et Apple n’est pas n’importe quelle société. C’est l’une des entreprises les plus profitables et l’une des marques les plus admirées. Pour toutes ces raisons, cette annonce publique «résonnera» de façon puissante dans le monde des affaires.  La nouvelle pourrait provoquer une fissure importante dans le «plafond rose». Et ce serait tant mieux, spécifiquement pour les jeunes, qui sont la future génération de chefs d’entreprise.

    Le choix de rendre public son homosexua-lité ne devrait pas être un événement en 2014, mais ça l’est encore. Savoir que Tim Cook est gai fera une grosse différence. Rappelons-nous qu’il y a seulement 7 ans, John Browne, l’ancien patron de BP, a dû quitter ses fonctions après les révélations sur son homosexualité dans la presse à scandale britannique. À ce titre, l’annonce du patron d’Apple est perçue comme «un moment décisif pour la communauté gaie». 

    Cela dit, vous pouvez être certain que chez Apple on ne prend pas de décision à la légère. Cette sortie officielle et publique a été planifiée longtemps d’avance et était un risque calculé. Déjà l’été dernier, Tim Cook et 5000 employés d’Apple avaient défilé portant la pomme aux couleurs arc-en-ciel, lors des célébrations de la fierté de San Francisco, question sans doute de mettre la table… 

    Le geste de Tim Cook, tout comme l’évolution du président Obama s’inscrivent dans la même démarche de changement, celle de changer l’Amérique 

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    Prendre un comprimé par jour pour réduire les risques de contracter le VIH : cette pratique, appelée prophylaxie pré-exposition ou PrEP quotidienne, est approuvée par l’agence du médicament américaine (FDA) depuis juillet 2012. Alors que certains hommes gais québécois se demandent s’ils devraient ou non faire appel à la PrEP comme méthode de prévention du VIH, nous avons pensé y consacrer quelques articles dans cette édition annuelle sur le VIH. 

    S’il n’est pas inutile de rappeler que le condom demeure la meilleure protection contre la transmission du VIH via des relations anales (c’est d’ailleurs la stratégie qu’une majorité d’hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes continuent à adopter), les personnes séronégatives qui s’exposent régulièrement à des risques de transmission devraient envisager de discuter avec leur médecin d’un tel traitement qui peut prévenir (à plus de 90%) la transmission du VIH. Cette stratégie de prévention passe encore difficilement dans l’esprit de plusieurs, mais découle, il faut le rappeler, du succès du traitement des personnes séropositives, dont la plupart sont maintenant indétectables.

    Les récentes recherches le montrent : combiner différentes stratégies de prévention permet de réduire les risques de transmission et de faire baisser le nombre de nouvelles contaminations.  Le changement, dans ce cas-ci, n’est pas d’arrêter de porter le condom, mais d’intégrer la PrEP à la panoplie préventive qui s’offre à nous.  Le Truvada (le médicament qui sert à la PrEP, mais ce ne sera, éventuellement, pas le seul) étant déjà commercialisé pour les séropositifs, un médecin a la latitude d’en prescrire (hors autorisation de mise sur le marché) à une personne séronégative. Le médicament est utilisé par des milliers de personnes depuis plusieurs années et des études ont prouvé qu’il était adapté aux personnes séronégatives les plus exposées au VIH. Il faudra toutefois faire attention aux interactions médicamenteuses aussi surveiller la tolérance rénale et la baisse de calcium dans les os. Les prescriptions de PrEP devront donc prendre en compte ce rapport bénéfices/risques. 

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