Celle qui a fait l’actualité dans la dernière année pour avoir brisé le silence sur maintes injustices sociales n’en est pas à ses premières armes en défense de droits. Au cours des deux dernières décennies, ses implications communautaires et dans le milieu des affaires furent nombreuses, que ce soit à la présidence de la Fondation Émergence ou à Fierté au travail Canada. Aujourd’hui impliquée à titre de commissaire à la jeunesse à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Martine est d’autant plus choyée sur le plan personnel, étant fière maman de deux enfants avec son épouse. Discussion avec celle qui a le cœur à ses affaires.
Au moment de m’entretenir avec Martine, elle se prépare à son dîner d’adieu chez IBM. Elle y fait carrière depuis près de 19 ans et son implication est notoire, puisqu’elle œuvrera à rendre les milieux de travail plus inclusifs pour les LGBTQ+. De la création du Blue Q Network (Nouveau-Brunswick), à Nuances (Montréal), jusqu’à Fierté au Travail Canada: «Faire mon parcours avec IBM m’a permis de me rendre où je suis aujourd’hui. J’y ai un attachement à vie! C’est quand même flyé: une fille qui se fait congédier des Forces armées canadiennes pour son homosexualité, à 19 ans, est aujourd’hui engagée à la Banque TD comme Directrice régionale LGBTQ+ au développement des affaires pour le Québec et l’est du Canada!»
Martine en retire une fierté incommensurable, même si «ça prend du guts! À 55 ans, ce n’est pas évident d’appliquer sur un nouvel emploi, puis de l’intégrer… Quand ça fait longtemps qu’on est à un même emploi, sortir de sa zone de confort n’est pas toujours facile!» Martine en sait quelque chose, puisque les dernières années l’amenèrent à sortir de cette zone de confort. Entre autres, mentionnons les excuses reçues du gouvernement fédéral, en lien avec les victimes de la purge LGBT. D’ailleurs, Martine témoigne de cette époque sombre de notre histoire (et de sa vie) dans le documentaire primé The Fruit Machine.
Aujourd’hui, elle a enfin l’impression de boucler la boucle: «Lorsqu’on a gagné, je l’ai dit en Cour, j’aurais pu mourir le lendemain. C’était vraiment un accomplissement dans ma vie! Prendre cette chance de mener un recours, malgré le scepticisme de tous, puis enfin se retrouver avec des excuses du premier ministre. On dira ce qu’on voudra, mais lorsqu’on reçoit de telles excuses, avec un règlement en onze mois, il y a une volonté d’admettre ses erreurs et d’avancer vers l’avenir.»
Parmi les mesures générales de réconciliation et de commémoration, notons les 15 millions voués à une exposition au Musée des droits humains à Winnipeg, puis la création d’un monument à Ottawa pour tous les LGBT, sans oublier de la sensibilisation pour les acteurs gouvernementaux, «afin que l’histoire ne se répète pas», appuie Martine. En novembre dernier, la Citation Fierté Canada, découlant de la mise en œuvre de l’entente de règlement du recours collectif, fut dévoilée. L’insigne aux couleurs irisées (pouvant notamment être apposée sur les uniformes) de tous ceux et celles ayant vécu la purge, pour réussir à faire la paix. «Pour réussir, vous devez avoir le cœur dans vos affaires et les affaires dans votre cœur. » disait l’homme d’affaires Thomas J. Watson, feu président d’IBM. Une citation qui, sans conteste, s’applique à merveille à Martine Roy et son parcours.