Debbie Lynch-White a le vent dans les voiles. Du théâtre à la télé, l’actrice est partout. Celle qui s’est installée dans le salon des Québécois, il y a de cela quelques années, avec le rôle de Nancy Prévost dans Unité 9, a par la suite fait sa marque dans le folklore québécois en incarnant la Bolduc au grand écran.
En 2018, elle publie un livre. En 2019, elle part en tournée musicale à travers le Québec pour son spectacle Elle était une fois. Puis, elle débute l’année 2020 en chantant à La Fureur alors que vous pouvez la retrouver dans la série Une autre histoire. Comme si cela n’était pas assez, elle animait le Gala Arc-En-Ciel en novembre dernier. Celle qui a uni sa destinée en 2017 avec sa femme Marina Gallant a d’abord hésité à s’impliquer dans la communauté LGBT québécoise. L’actrice-chanteuse-animatrice nous explique pourquoi dans cette entrevue accordée au Fugues.
Il y a un an, en février dernier, Debbie s’apprêtait à perdre la route pour présenter son premier spectacle musical, mettant à l’honneur la chanson au féminin : « Je venais de faire La Bolduc, alors j’étais très imprégnée depuis 2-3 ans de l’histoire de cette femme et de l’histoire du féminisme au Québec. Pour moi, rendre hommage aux femmes dans la musique ça allait de soi, c’était une continuité logique. Aussi, parce que j’aime les femmes et il faut qu’on puisse entendre leur parole aussi souvent que celle des hommes. Les femmes ont une part importante dans ma création, que ce soit par ce spectacle, qui s’est terminé à l’automne, ou par les personnages que je choisis de défendre ».
Présentement, Debbie termine sa maitrise en théâtre, débutée il y a trois ans, à temps partiel : « Je présente ma création en mai prochain. Ensuite, je vais rédiger mon mémoire et compte terminer à Noël. J’avais du temps faut croire… », explique à la blague Debbie, qui est sur divers projets de théâtre, dont Silence on tourne, qui sera présenté cet été. D’ailleurs, lorsqu’on demande à Debbie son « rôle de rêve », elle répond, après mure réflexion, « un personnage de Tremblay! Je pense que j’ai l’énergie pour incarner les personnages qu’il écrit. Sinon, j’aimerais, par curiosité, faire une tragédie. C’est quelque chose qu’on travaille beaucoup à l’école de théâtre, mais qu’on a rarement la chance de faire ensuite. »
Qu’à cela ne tienne, le rôle de sa vie est aux côtés de sa femme, avec qui elle unit sa destinée en 2017. Pour Debbie, le mariage revêt une signification particulière : « Peut-importe l’orientation sexuelle, c’est cette façon de dire devant témoins qu’on se choisit. Je trouve que c’est beau et que c’est d’autant plus puissant aujourd’hui, car on dirait que c’est de plus en plus rare », confie celle qui se décrit comme une éternelle romantique.
« C’est sûr qu’il va y avoir des boutes de garnotte, mais on se retrousse les manches. Se choisir à chaque fois, c’est une belle symbolique. J’avais dit à ma blonde, je me marie une fois dans ma vie! » Cela dit, en termes de demande, il n’y a pas eu de grosse scène comme dans les films, appuie Debbie « les films, ça, c’est ma job! » Et pour les enfants? « On en a parlé, mais on n’est pas branchées, ce n’est pas dans les plans à court terme », confirment les principales intéressées.
Cela dit, les deux femmes vivent les grands moments ensemble, à commencer par le fait de s’afficher sur les tapis rouges, notamment celui de Québec Cinéma, en juin dernier : « Évidemment, il faut que les deux soient confortables. À partir de ce moment-là, je ne vais jamais me gêner d’aller dans un Gala avec ma blonde. C’est avec elle que je veux vivre ces moments, comme n’importe quel couple! On s’est toujours dit qu’on vivrait ça le plus normalement du monde. Je me dis que de nous voir sur un tapis rouge ça peut aider la jeune en région qui se pose des questions sur son orientation sexuelle ».
D’ailleurs, l’an dernier, Debbie s’est beaucoup impliquée au sein d’organismes LGBT, notamment à titre de présidente d’honneur du Gala Arc-En-Ciel. Pourtant, pendant des années après son coming-out, elle refusait tout engagement dans la communauté, ne se sentant pas prête, pas outillée, devant d’abord comprendre ses émotions et gérer son coming-out médiatique. « J’ai fait mon coming-out sur le tard, à 29 ans. Je savais depuis des années, mais je ne savais pas comment le faire. Le jour où j’ai décidé, j’étais prête et solide. Il y a eu des choses à gérer, mais je n’avais aucun doute ».
Au Québec, si peu de lesbiennes s’affichent, chez les actrices «y’en a pas des masses qui sont out » confirme Debbie, qui n’a pas eu peur de devenir la lesbienne de service pour autant. «Des commentaires homophobes ou niaiseux, sur les médias sociaux, j’en ai reçu comme plusieurs personnalités publiques. Lorsque les revues à potin ou le Journal de Montréal sortent des articles avec des titres sensationnalistes, les gens commentent sans même lire l’article. Quand ça arrive, il y a plein de commentaires homophobes de gens qui ne savent pas quoi faire de leur vie… Parfois ça concerne mon orientation sexuelle, parfois mon poids… Quand ils s’en prennent à ma blonde, là je me fâche et je réponds. Souvent, quand y’a des commentaires sur moi, c’est ma blonde qui répond! On remet les pendules à l’heure! », explique Debbie. « Avant, je n’étais pas capable de ne pas les lire, mais maintenant je me sens plus solide professionnellement et personnellement qu’il y a 4 ans».
En 2018, avec la publication de son livre Faut que je te parle, Debbie prend la parole dans l’espace public; une façon de susciter les discussions, mais aussi d’aider son prochain. « Je suis consciente que j’ai une tribune. C’est un privilège. Aussi bien tenter d’aider », explique humblement Debbie « je pense être un modèle pour plusieurs jeunes filles. C’est rare que les répercussions soient tangibles, mais l’autre jour, une mère m’a écrit en me disant : grâce à toi, je comprends mieux ma fille. Aussi, une fille de vingt ans me disait que je l’avais aidée à faire son coming-out. Quand je reçois ce type de témoignage, ça devient concret. Tant mieux, car on est là pour toutes s’aider ».
Cela dit, il demeure du travail à faire, explique Debbie, notamment pour les femmes LGBT: « L’égalité homme-femme n’est toujours pas atteinte. Je trouve ça aberrant ! C’est ridicule que certains hommes se sentent menacés par les féministes; ça n’a pas rapport, on n’est pas là pour menacer qui que ce soit! On est là pour dire : Allo on existe! C’est fini l’époque où vous êtes meilleurs que nous. Ce n’est pas dans l’idée de surpasser, mais dans le but que tous travaillent ensemble dans la même direction. C’est une demande d’équilibre. »
Et concernant les femmes de la communauté LGBTQ, « il faut continuer d’en parler, de s’afficher. De juste être et de l’affirmer. Il y a encore beaucoup d’ignorance et de peur et, à ce niveau-là, il y a encore du travail à faire. » Cela dit, la jeune génération donne espoir à Debbie. Sur le tournage d’Une autre histoire, elle demandait à deux actrices de onze ans, s’il y avait beaucoup de couples d’homosexuel(le)s à leur école secondaire et la répondre fut positive, conclu Debbie : « Pour eux, c’est comme n’importe quel couple. Les jeunes s’affirment plus ouvertement, alors j’ose croire que nous sommes sur la bonne voie vers une meilleure acceptation ».
TA PREMIÈRE SAINT-VALENTINE ?
Hey boy!… Au primaire, j’avais genre écrit un Valentin à un gars. Évidemment, je n’avais jamais eu de réponse. Ça m’avait fait de la peine genre une heure, pis après j’étais correcte.
RECEVOIR DES FLEURS OU DU CHOCOLAT ?
Des fleurs
MEILLEURE CHANSON D’AMOUR ?
Je l’écoutais récemment… Je vais y aller avec ma belle Céline. Pour que tu m’aimes encore. Je pense que c’est une des plus belles!
CE QUE TA FEMME PRÉFÈRE DE TOI ?
C’est tout un morceau de bons côtés… (rires) Je pense qu’elle aime mon côté gamine, dans le sens que je m’émerveille facilement. Je pense que je la fais beaucoup rire!
POUR LE MEILLEUR ET POUR LE PIRE, CE QU’ELLE TE REPROCHE ?
Elle me trouve essoufflante. J’ai comme une espèce d’urgence de vivre. Je suis ben intense, j’ai ben de l’énergie et des fois je peux surcharger les agendas… Et là, elle est juste «on peut-tu se reposer deux minutes ?» Tsé quand on va en voyage, je t’organise ça moi là! (rires) Donc j’apprends à laisser et pas tout le temps vouloir tout faire…
MEILLEURE COMÉDIE ROMANTIQUE À REGARDER COLLÉE-COLLÉE ?
Euh… Je viens de réécouter Titanic, pour la centième fois, alors je pense juste à ça… Pour moi, Forrest Gump, ça reste un classique. Marina et moi on a beaucoup braillé. C’est rare qu’on écoute des comédies romantiques…. Oh, oui je le sais c’est quoi mon film, j’ai le goût de le réécouter bébé (dit-elle à sa blonde dans la voiture) …. C’est vraiment un film quétaine…. A Walk to Remember avec Mandy Moore! Oh, c’est romantique… J’avais braillé! Ma blonde ne l’a jamais écouté, alors on va l’écouter pour la Saint-Valentin!