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Vendredi 29 mars 2024
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    Le contexte urbain unique de la résidence Marconi

    Pelletier de Fontenay

    Situé dans le quartier Marconi-Alexandra, le projet tient son originalité de conditions urbaines assez uniques pour Montréal. En effet, plusieurs éléments de contexte atypiques pouvant être perçus comme nuisibles ou étranges – les garages environnants, le train, la ruelle piétonne – sont incorporés de façon positive dans le projet.


    Sur la rue Marconi, quelques résidences éparses ponctuent un tissu essentiellement composé de garages automobiles, de petits bâtiments industriels et d’ateliers d’artisans. Le bâtiment original était une maisonnette d’un étage (communément appelé shoebox) construit en 1910. La résidence profite d’un droit acquis permettant son agrandissement dans une rue au zonage
    industriel et commercial. La demande du client était de rénover et d’agrandir la maisonnette pour en faire une résidence capable d’accueillir une petite famille. Rapidement, la décision de conserver la volumétrie existante du bâtiment fut prise afin de respecter la série de trois shoebox voisins, cette typologie typique de Montréal ayant malheureusement tendance à disparaître au profit d’une densification en hauteur. L’addition fut donc pensée en fond de lot plutôt qu’en hauteur, et ce, malgré la présence d’un chemin de fer à l’arrière. La relation aux rails est ici perçue comme positive: lors de leurs quelques passages quotidiens, les trains apportent un mouvement et une dimension cinématique au site. L’animation à la fois visuelle et sonore est
    bienvenue, chaque passage du train devenant un marqueur, un événement ponctuant le quotidien. Cette condition dynamique est mise en scène par la grande baie vitrée arrière, donnant une vue panoramique sur le train et la friche verdoyante située entre les rails et l’arrière-cour.

    Le patio comme cœur de la maison
    Bien que les clients fussent immédiatement séduits par l’activité bourdonnante du site avec ses garages d’un côté, le train de l’autre et la ruelle bordant le site au sud, il semblait important de créer une zone où il est aussi possible d’échapper à la stimulation constante émanant du contexte. En détachant l’addition de la construction existante, un vide est créé au centre du projet, une respiration qui marque la transition entre l’ancien et le nouveau. Ce vide constitue le nouveau cœur de la maison. Il s’agit à la fois d’un espace extérieur où il est possible de s’isoler du contexte et de se concentrer dans un moment d’introversion, mais aussi d’une couche additionnelle d’espace entre le train et l’espace de vie, une sorte de tampon acoustique et visuel permettant de filtrer les stimuli extérieurs. La maison devient donc un gradient ou l’on peut choisir notre position. Les deux cours ont deux identités complètement différentes. Alors que la cour arrière s’ouvre sur un jardin sauvage et luxuriant ainsi que sur la friche ferroviaire, la cour intérieure elle, est caractérisée par son introversion, son dépouillement et le cadrage architectural abstrait de son espace.

    Les espaces de vie sont placés de part et d’autre de la cour intérieure. La cour vide devient un point focal, un espace autour duquel on tourne et que l’on regarde à chaque transition. Elle permet également d’amener une grande quantité de lumière jusqu’au cœur de la maison. Lors de la belle saison, de grandes portes-patio situées de part et d’autre du vide peuvent s’ouvrir et permettent le passage fluide du salon vers la cuisine et enfin vers la cour arrière. La cour devient alors une extension de l’espace intérieur et peut participer à la vie intime de la maison.


    Les limites comme autant d’opportinutés architecturales
    Au premier regard, le désaxement entre l’implantation de la maison originale et celle de l’addition peut sembler le produit d’un certain formalisme architectural. En réalité, cette cassure a été générée par la désynchronisation entre les limites de lot officielles et l’implantation effective de la maison. En effet, la maison originale était fortement désaxée par rapport à ses lignes cadastrales. Du côté nord, le mur à la ligne du bâtiment existant dévie graduellement de la limite de propriété jusqu’à un empiétement de près de 400 mm sur le terrain voisin. L’addition, elle, devait s’implanter à la ligne ce qui a automatiquement généré ce décroché du mur mitoyen Nord. Le plan tire parti de cette articulation pour marquer la transition programmatique entre le salon et le passage vers la cuisine. La cage d’escalier permettant la descente vers le sous-sol vient également s’y nicher. À la limite sud, du côté bordé par la ruelle piétonne, une refonte cadastrale passée avait ajouté une mince parcelle triangulaire à la propriété, ce qui a généré un décroché encore plus important qu’en limite nord. Le bout de terrain additionnel étant tout juste assez large pour une ouverture, il y avait là une opportunité à saisir pour activer la cour. L’ajout d’une porte au coin du patio permet de créer une deuxième entrée vers la maison et d’établir une connexion entre la maison et la ruelle. A posteriori, il est intéressant de constater que les contraintes d’implantation, à la fois celles issues du contexte urbain, mais aussi celles issues du cadre légal, sont réellement devenues les éléments catalyseurs du projet.



    Organisation intérieure
    L’entrée principale est située au coin nord-est. Une grande porte de verre dépoli s’ouvre sur une zone où le plancher existant a été encaissé, sorte d’adaptation du Genkan japonais qui permet de contrôler la dissémination des poussières et petits cailloux de la rue dans l’espace domestique. L’idée d’un seuil plus formel est appuyée par un puits de lumière qui ponctue la pièce et illumine la perspective de l’entrée lorsque vue depuis les espaces de vie. Le rez-de-chaussée comporte également une chambre, une salle de bain donnant sur la ruelle, et un bureau placé contre la façade avant.


    Le bureau, une salle d’écriture, possède une grande fenêtre qui s’ouvre sur une perspective axiale de la rue Alexandra. Un second puits de lumière placé au-dessus de l’escalier permet de mettre celui-ci en scène et d’amener la lumière naturelle jusqu’au sous-sol. Sous la partie existante de la maison, le sous-sol comprend une salle familiale et un grand rangement fermé venant tirer parti de la section avant non excavée.


    La suite des maîtres est placée sous l’addition, un peu à l’écart des espaces principaux. La lumière venant d’une margelle découpée dans la cour baigne la chambre de lumière malgré son placement en sous-sol. La salle de bain est pourvue d’un grand pan vitré donnant sur la chambre, ce qui permet à la fois son éclairage en second-jour, mais cadre également les scènes de la vie intime s’y déroulant.

    Matérialité
    La palette restreinte de matériaux utilisée, tant pour l’extérieur que pour l’intérieur, vient supporter la clarté conceptuelle du plan tout en répondant à certains impératifs économiques. Le crépi blanc de l’addition renforce l’abstraction du projet et met l’accent sur sa volumétrie. La brique existante, rouge à l‘origine, est peinte en blanc afin de donner une cohérence et un effet de continuité à l’ensemble.

    À l’intérieur, l’espace est simplement gardé en blanc, maintenant l’accent sur la richesse de la vie intérieure et sur les vues extérieures. Les planchers de béton se prolongent vers la cour arrière pour créer une plateforme entre la façade et le jardin.

    À propos de Pelletier de Fontenay
    Fondée en 2010 par Hubert Pelletier et Yves de Fontenay, Pelletier de Fontenay est une firme d’architecture basée à Montréal. L’agence s’est rapidement forgée une réputation enviable en tant que concepteurs de projets publics contemporains dont certains sont en train de voir le jour (l’Insectarium de Montréal, le pavillon de Verre au Jardin botanique de Montréal et la Place des Montréalaises). Dans DécorHomme vous avez vu leur Projet Cartier, paru dans l’édition 48 (Automne 2016).

    Fiche technique
    Projet : Résidence Marconi
    Chargé de projet : Hubert Pelletier
    Équipe de conception : Hubert Pelletier, Yves de Fontenay, Yann Gay-Crosier 
    Lieu : Mile-Ex, Montréal, Canada
    Surperficie (brute) : 263m2 
    Architecte concepteur : Pelletier de Fontenay
    Ingénieur en structure : Latéral
    Entrepreneur général : Construction FRX
    Crédits image : Pelletier de Fontenay
    Pelletierdefontenay.com/marconi-1

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