Alors que l’allègement thérapeutique et les antirétroviraux (ARV) à longue durée d’action viennent révolutionner la prise en charge des personnes vivant avec le VIH, se pose la question du vieillissement : quels sont les effets des traitements anti-VIH sur le long terme et comment prévenir certaines comorbidités ? C’était l’enjeu d’une série de présentations lors du deuxième jour de la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI) 2021.
Les personnes vivant avec le VIH ont un risque plus élevé de perte osseuse et de fracture, en particulier après initiation des ARV où la perte de masse osseuse se situe entre 2 et 6 %, au niveau des hanches ou des vertèbres. Certaines cytokines (un ensemble hétérogène de protéines ou de glycoprotéines solubles qui jouent le rôle de signaux permettant aux cellules d’agir à distance sur d’autres cellules pour en réguler l’activité et la fonction) pourraient être responsables de cet effet indésirable, déclenché par les ARV. L’alendronate (prescrit habituellement chez les femmes à la ménopause) pourrait empêcher l’action des cytokines.
Dans l’essai, on a administré pendant 14 semaines 70 mg d’alendronate à 26 personnes en comparant avec 24 personnes qui avaient un placebo au moment où l’on initiait les ARV. Après 50 semaines, il y a eu 2,7 % de perte osseuse mesurée sur les hanches chez les personnes ayant le placebo contre un gain de 0,5 % chez celles ayant pris l’alendronate (nouvelle classe de médicaments de plus en plus utilisée dans le monde contre l’ostéoporose et d’autres maladies osseuses telles que la maladie de Paget). Une petite perte osseuse a été observée au niveau des vertèbres, mais moins qu’avec le placebo. Il n y a pas eu d’effets indésirables particuliers sauf pour une seule personne. Cet essai est encourageant, mais nécessite d’être testé chez un plus grand nombre de personnes et à plus long terme.
Autre comorbidité, le risque cardiovasculaire est plus important chez les personnes vivant avec le VIH sans qu’on en comprenne totalement bien les mécanismes. Une étude a recherché des biomarqueurs de l’inflammation afin de caractériser les réponses immunitaires T pour décrire différents profils de marqueurs selon les individus. Trois profils ont été identifiés. Deux profils sont plus représentés chez les personnes vivant avec le VIH, en lien avec une présence plus marquée de plaques d’athérome (plaques graisseuses fixées sur la paroi des vaisseaux sanguins) et l’autre en lien avec la décalcification artérielle. Une autre étude a évalué si les comorbidités cardiovasculaires étaient bien diagnostiquées et prises en charge. Des index de bonne prise en charge ont été utilisés pour plusieurs comorbidités. La comparaison s’est faite sur des groupes de personnes séropositives et séronégatives. Dans ces groupes, il y a une proportion équivalente de comorbidités cardiovasculaires. En revanche, les comorbidités semblent moins bien prises en charge chez les personnes vivant avec le VIH, mais à prise en charge égales, les risques cardiovasculaires entre personnes séronégatives et séropositives semblent similaires.
Autre étude intéressante qui concerne le déclin cognitif chez les personnes vivant avec le VIH. Jusqu’à présent ce phénomène a été décrit, mais peu expliqué. Après douze ans d’observation dans différents groupes, les facteurs identifiés les plus associés au déclin cognitif sont le diabète, les maladies pulmonaires chroniques, la dépression chronique, l’utilisation de cannabis toute la vie et l’hypertension (non traitée).
Nouvelle intéressante : de nouvelles protéines plasmatiques ont été identifiées comme capables de prédire la mortalité chez les personnes vivant avec le VIH due aux comorbidités. Les chercheurs-ses ont identifié ces protéines à partir d’un groupe de personnes vieillissant avec le VIH nommé « la cohorte des vétérans ». Il est possible de développer des scores prédictifs de mortalité à partir des dosages de ces protéines.