Devenu un phénomène grâce au succès instantané de son premier album, Parce qu’on vient de loin, Corneille, chanteur miraculé, seul rescapé du massacre de toute sa famille, a marqué notre jeunesse en sublimant son malheur par la musique. C’était en 2002, il y a 20 ans déjà. Depuis, il a fait en 2007 un premier disque en anglais, The Birth of Cornelius. En 2009, il est de retour sur la scène francophone avec Sans titre. Il renoue avec le succès en 2011 avec Les inséparables et, en 2013, parait l’album Entre Nord et Sud.
C’est en février 2019 qu’il lance son album Parce qu’on aime et, en mai 2021, il lance son plus récent simple Pause, premier titre du nouvel album Encre Rose, lancé au printemps dernier. Le vendredi 5 août, dans le cadre de Fierté Montréal, Corneille sera du spectacle ImmiX, une célébration qui fait place à une mosaïque musicale inattendue, réunissant des artistes et musiques d’ici et de tous les horizons. Il a cordialement répondu aux questions de Fugues…
L’an dernier, tu as remis le prix Coup de cœur de la Fondation Émergence à Alicia Kazobinka pour ses actes remarquables, tu as chanté au Carnaval des Couleurs mis sur pied par la Fondation BBCM et maintenant tu seras du spectacle ImmiX à Fierté Montréal. Comment en es-tu arrivé à être un allié de la communauté LGBTQ+ ?
Corneille : Ma rencontre avec Alicia dans le cadre de mon podcast Amour suprême m’a davantage sensibilisé sur les réalités des aliénations multiples que vivent certains membres de nos sociétés au sein même des communautés auxquelles ils sont censés s’identifier. Après mon échange avec elle, je me suis rendu compte que moi aussi j’ai souvent pu être victime d’une certaine aliénation intracommunautaire… Son témoignage m’a énormément touché et m’a donné envie d’en savoir plus sur son combat et de l’accompagner dans la mesure de mes possibilités.
En mars dernier, tu as dit que la bougie d’allumage de ton récent album Encre Rose avait été la mort de George Floyd, mais l’album n’est pas noir et il est même lumineux et bienveillant. On ne t’a d’ailleurs jamais entendu aussi optimiste. C’était le concept dès le départ ou la COVID a-t-elle impacté le contenu des chansons ?
Corneille : Les évènements médiatiques et sociaux qui ont suivi le meurtre de George Floyd ont suscité de réelles remises en question chez moi. Notamment sur mon positionnement quant à la question du vivre-ensemble entre groupes identitaires et mon rôle à jouer comme personnalité publique, mais aussi et surtout comme père de famille. Une fois que les injustices sont reconnues, il ne reste qu’une question pragmatique : comment transformer une colère justifiée en amour ? Trouver des clés pour arriver à cette alchimie. Voilà ce qui m’obsède et nourrit tout ce que je crée, depuis 20 ans… Et Encre rose n’a pas été une exception, c’est juste que pour une fois dans ma carrière, je n’avais pas l’impression d’être seul dans ma colère. Elle rencontrait celle de milliards de gens sur la planète.
Comment fait-on pour écrire des chansons aussi optimistes dans une période aussi compliquée ?
Corneille : C’est le seul intérêt de créer pour moi. Imaginer une réalité en opposition avec ce que l’on perçoit comme réel. Imaginer le beau là où il en manque. C’est mon boulot d’artiste… de rêveur. Sinon j’aurais fait journaliste.
Le format album, c’est toujours important pour toi, malgré les modes de consommation qui évoluent ?
Corneille : Ça dépend pour qui… Je n’aime pas les livres d’instructions en général. Il y a des artistes qui imaginent un univers cohérent de A à Z avant d’écrire une chanson et là un album fait sens. Pour d’autres, non. L’important pour un artiste est de respecter ses pulsions créatives et de les présenter d’une manière qui ne dénature pas l’art au profit du marketing. Plus que jamais j’urge les artistes à être têtu et n’écouter que leurs instincts. Streaming, album, EP, NFT’s, blockchain. Tout ça, ce ne sont que des outils. L’artiste est d’abord le garant de la matière. Quand cette dernière est honnêtement conçue, le reste suit.
Et maintenant, en rafale…
Ton principal défaut ?
Je ne sais pas.
Le défaut que tu détestes le plus chez les autres ?
Tous ceux que je partage à un moindre degré.
Ta plus grande qualité ?
Je ne sais pas…
Ton endroit préféré ?
Sur le sofa, devant un film avec mon épouse et nos deux enfants.
Que considères-tu comme superficiel ?
Rien n’est jamais vraiment superficiel si on lui accorde ne fut-ce que la moindre importance.
Ta plus grande peur ?
Voir ma famille souffrir.
La personne vivante que tu admires le plus ?
Mon épouse.
Ton idée du bonheur ?
Un idéal impossible, qui peut nous élever comme il peut nous être traitre.
INFOS | ImmiX, le vendredi 5 août, de 20 h à 23 h, sur l’Esplanade du Parc olympique.
Pour plus d’infos : www.fiertemtl.com